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3 mai 2012 4 03 /05 /mai /2012 11:07

MALKA

En araméen, "malka" signifiait "roi" (source l'Histoire, n°375, mai 2012, p.51) : Joli prénom possible. Le prénom existe bel et bien, on le trouve sur la toile. Elise me signale que le prénom Malika, plus connu, signifie "reine" . Que ces deux prénoms soient si proches, moi, ça me plaît bien. Y a-t-il des objections ?

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 3 mai 2012

 

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3 mai 2012 4 03 /05 /mai /2012 10:45

DU RETOUR DU BÂTON ET DE CELUI DE LA HACHE

1.
"L'essentiel, pour lui [Nicolas sarkozy], reste peut-être en histoire comme ailleurs, de "toucher les coeurs" : non l'appel à la réflexion, mais à l'émotion."
("Nicolas Sarkozy face à l'histoire", auteur collectif, L'Histoire n°375, mai 2012, p.16)
C'est là l'erreur politique la plus commune. Elle permet certes, pour peu qu'on soit habile, de s'attirer rapidement des sympathies et donc de se faire élire sur un malentendu. Mais les hommes d'Etat qui comptent sur l'affectivité finissent souvent par décevoir puisque leur fonction les oblige à prendre, tôt ou tard, des mesures impopulaires, voire à faire preuve d'une impulsivité, d'une réactivité affective hors de propos, déplacée, outrancière.

2.
"Mais ce qu'on ne voit pas, c'est que cette vieille énergie populaire, cette passion populaire, que la guerre et les tournois transfiguraient de manière magnifique, s'est éparpillée maintenant en passions privées innombrables qui sont seulement moins visibles"
(Nietzsche, Le Gai Savoir, Livre Premier, 23, traduit par henri Albert, revu par Marc Sautet, Le Livre de Poche n°4620, collection "Les Classiques de la Philosophie, p.).

Ah, revoilà les coups ! Une vieille énergie populaire, une passion durable, la fameuse furia francese, les Gaulois belliqueux, l'amour de l'uniforme, le bonapartisme, la castagne, les bals tragiques, mythes et légendes, romans de chevalerie, épopée, tout ça disséminé, éparpillé, diffusé - succés des films de guerre, des jeux violents, attrait de l'armée, du cinoche moche ultra violent.
Emietté l'art de la guerre dans les "passions privées innombrables" et "seulement moins visibles". Oui, mais avec la technologie qui s'est mise à galoper partout, le "moins visible" d'antan est de plus en plus visible ; la sphère privée est de plus en plus transparente : nous sommes à l'époque de la représentation de la représentation. Big Brother ? C'est Facebook, plus malin, subtil, qui fait adhérer les gens eux-mêmes à leur propre surveillance ; et la voilà remise au goût du jour, la "servitude volontaire". Mais surtout, il y eut les Deux Guerres Mondiales, comble de l'horreur, paroxysme de l'épouvante, ce qui aurait dû tuer tout béguin du guerrier, toute tentation de la guerre, tout retour de la hache. Mais il est curieux de voir comment les difficultés économiques, les soubresauts de la crise, ses accélérations soudaines, préparent les nouvelles barbaries aussi sûrement et aussi démocratiquement que les années trente préparèrent les camps d'extermination.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 3 mai 2012

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2 mai 2012 3 02 /05 /mai /2012 11:36

DU CRIME DES SOEURS PAPIN

1.
Ceux qui croient que l'on peut passer sa vie sans se faire d'ennemis se mettent le doigt dans l'oeil. Ce ne sont pas les envies de meurtre qui manquent, c'est seulement l'exception des circonstances.

2.
Le crime des soeurs Papin :
Le président du tribunal s'adresse aux deux accusées.
"Je l'ai "alourdie" (assommée), répond-elle. "Et qu'avez-vous dit à votre soeur Léa, quand elle est descendue ? - Réponse : "Je lui ai dit : "Arrache-lui les yeux" "Et vous Léa, qu'avez-vous fait sur le cadavre de Mlle Lancelin ?" poursuit le président. "Des "encisures", répond-elle."
(Frédéric Chauvaud, Le crime des "bonnes", l'Histoire n°342, mai 2009, pp82-87)
Que Christine Papin ait décidé d'arracher les yeux de Madame Lancelin rappelle l'expression "je vais lui arracher les yeux". Arracher les yeux de quelqu'un, c'est l'empêcher de voir, c'est l'empêcher désormais de porter le regard du maître (Madame Lancelin) sur sa servante (Christine Papin).
Le langage des soeurs Papin n'indique pas ici qu'elles soient folles. C'est un français populaire, essentiellement parlé. Il ne fallait pas s'attendre à ce que deux filles sorties de l'orphelinat dès l'âge de 14 ans pour être placées comme bonnes dans un ménage bourgeois parlassent un français châtié. Sans doute, la langue des maîtres s'opposait-elle à la langue des serviteurs : "Une grande distance existait. Léa Papin, âgée de 21 ans, déclare au magistrat instructeur : "Monsieur ne nous parlait jamais"; mais les deux soeurs ne semblent pas s'en plaindre." (Frédéric Chauvaud)
Dès lors, la question est légitime de savoir ce que se sont dit Christine Papin et sa patronne. L'aînée des soeurs Papin (Christine, 28 ans) serait allée à la rencontre de Madame Lancelin, annonçant : "Madame, le plomb est encore une fois fondu en repassant comme hier." Autrement dit, quel message est-il réellement passé entre Madame Lancelin et sa servante - "Quels gestes ont été esquissés ? Quels mots ont été prononcés ?" se demande Frédéric Chauvaud - qui ont déclenché le massacre, et ce que l'on peut appeler une fureur meurtrière ("Deux femmes assassinées, coupées, tailladées, les yeux arrachés..", in "rapport du greffier Bouttier" cité par Frédéric Chauvaud) .

5.
La fureur meurtrière est certes ici spectaculaire ("les visages des victimes furent frappés au point de devenir méconnaissables" ; les meurtrières utilisèrent des couteaux et même un marteau). Elle n'est pourtant pas si étonnante. L'humain est capable de la plus grande violence, l'histoire de la justice en fait foi. Il n'y a pas à considérer, parce qu'un crime est particulièrement violent, et qu'il semble tout à fait odieux, que, pour autant, le criminel soit fou. Il se trouve que, dans l'éventail des réactions humaines, la plus grande violence, comme la plus grande tendresse, a sa place. Ce qui a peut-être étonné dans le cas des soeurs Papin, c'est que, selon les déclarations de leur patron, Monsieur Lancelin, les deux filles étaient des "servantes modèles, donnant entière satisfaction à leurs employeurs depuis le début, les deux soeurs, par ailleurs, sortaient peu, n'avaient pas d'amies, aucune relation masculine - ce qui renforce leur réputation de bonne moralité." (Frédéric Chauvaud).
Bref, elles jouaient parfaitement bien leur rôle, se tenaient à leur place, mais c'est un lieu commun que de rappeler que la fonction n'est pas l'homme. D'une certaine manière, les bonnes étaient trop bonnes, se contentant, semble-t-il, de peu et, du reste, ne semblant pas en souffrir : "Si nous avions eu à nous plaindre, nous serions parties !" (propos de Christine Papin cité par Frédéric Chauvaud). Qu'elles aient fini par être prises de colère, de soudaine fureur, jusqu'à en tuer, indique seulement que les humains sont capables de parfaitement rentrer dans un rôle, de se maîtriser pendant des années, et puis soudainement, pour un mot de travers, une vexation de trop, d'éclater, de laisser leur force physique prendre le dessus sur leur habituelle maîtrise d'eux-mêmes et de devenir semblables au chien qui se retourne, sans raison apparente, contre son maître.

4.
Au jugement de Lacan concernant une éventuelle "homosexualité inconsciente" (et alors ?) et une "perversion sadomasochiste" (et alors encore ?) qui auraient amené les soeurs Papin, "dans l'anxiété d'une punition imminente", à massacrer leur patronne et sa fille, je préfère ces paroles d'André Salmon : "Les soeurs Papin ? Deux orphelines tirées de l'orphelinat par une dame et sa fille faisant des deux orphelines deux bonnes à tout faire. Les orphelines ? Complètement abruties par leurs longues années d'orphelinat." Selon Salmon, les deux jeunes femmes auraient longtemps été "accablées de tâches sordides", auraient longtemps supporté la méchanceté de leurs patronnes jusqu'à ce que : "Un soir, comme ces dames revenaient de la promenade, les deux orphelines leur sautèrent sur le poil et leur firent la peau." (cités, Lacan et Salmon, par Frédéric Chauvaud).

5.
A propos du marxisme, j'ai entendu à la radio ceci (je cite de mémoire) : "Il ne peut y avoir de lutte finale, puisqu'après la lutte, il n'y a plus rien." C'est qu'en admettant que la lutte des classes trouve une solution dans une hypothétique lutte finale, ou, plus probablement, dans la fin de la rareté naturelle (et donc la satisfaction de ses besoins vitaux), gageons qu'aux luttes sociales et aux revendications salariales se substitueront conflits individuels, agressivité des consciences, frustrations nées de désirs nouveaux et nécessairement insatisfaits.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 2 mai 2012

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2 mai 2012 3 02 /05 /mai /2012 06:56

SE MACHINER

1.
Pour que l'ordre et la méthode puissent gouverner une existence, rien ne vaut l'automatisation du vivant : "Laide, mais connaissant admirablement son affaire, elle n'était jamais malade, jamais fatiguée, jamais énervée et jamais elle ne se trompait. Dans son travail, ce n'était pas une femme, mais une machine : la parfaite secrétaire." (Agatha Christie traduit par Michel Le Houbie, Pension Vanilos, Club des Masques n°62, p.5). La laideur garantissant la sagesse de ses moeurs, c'est par les jamais du parcours parfait que Miss Lemon, la secrétaire d'Hercule Poirot est, quoi qu'il arrive, une "parfaite secrétaire."
Aussi, en ce début de roman, que Miss Lemon ait pu commettre "trois fautes en dactylographiant une lettre qui ne présentait aucune difficulté" relève pour Poirot de l'inconcevable : "Il n'était pas fâché, il était stupéfait. Comme on peut l'être quand arrivent des choses qui ne peuvent arriver." (op. cit. p.6)
C'est que l'existence ordonnée et méthodique a pour but d'éviter le "ce qui ne devrait pas arriver" en "ce qui ne doit pas arriver" et donc en "ce qui ne peut arriver" : on passe ainsi du probable au possible, du possible à l'impossible, du concevable à l'inconcevable de telle sorte que l'on ne peut être que "stupéfait" si l'inconcevable finit par arriver. C'est là l'origine de l'illusion des civilisations qui finissent par s'écrouler sous le poids de "ce qui ne peut arriver".

2.
L'administration a justement pour but d'organiser la société de telle sorte que ce qui ne doit pas arriver n'arrive pas. Elle ne peut donc qu'évoluer dans le sens d'une infinie complexité puisqu'au fur et à mesure de la complexification des rapports sociaux, les exceptions du vivant sont de plus en plus nombreuses. C'est cette infinie complexité qui finit par la rendre inopérante, voire insupportable, cependant qu'elle court toujours après toujours plus d'efficacité, tendant même à simplifier ses procédures, ce qui, en général lui rend service pourvu que cette simplification soit bien pensée.

3.
Qu'est-ce donc qui trouble la "machine" Lemon ? L'affectif, bien sûr. Or, ce qui relève de la machine n'a pas d'affectif, pas de sexualité et pas d'autre désir que l'efficacité : "Pour lui [Hercule Poirot], Miss lemon s'identifiait si complétement à une machine, à un instrument de précision, qu'il lui eût paru extravagant de seulement supposer qu'elle pouvait avoir des affections, des chagrins ou des soucis." (op. cit. p.6). L'humain tend à la plus grande des précisions cependant que son affectivité le rend plus imprécis, le trouble. Aussi, ne devrait-il pas y avoir d'humain qui ne se comporte que machinalement : ce dont je ne suis pas si sûr. Pourquoi n'y aurait-il pas d'humain que l'affectif troublerait si peu qu'ils n'agiraient jamais que dans un souci de pure efficacité ? Pourquoi n'y aurait-il pas d'humains ayant, consciemment ou inconsciemment, révoqué l'affectif, ou ayant perturbé leur fonctionnement affectif de telle sorte qu'il ne puisse plus s'exprimer que par pulsions plus ou moins violentes ?

4.
Se peut-il qu'il y ait des consciences machinales comme il y a des consciences hyper-affectives ? Il y a en tout cas, des consciences fascinées par la machination, l'utilisation des esprits en vue d'un but caché.

5.
En français populaire, il arriva qu'on machinât beaucoup. Machiner, c'est bricoler quelque chose, faire en sorte que quelque chose fonctionne. On peut penser qu'il y a aussi des esprits qui se machinent fort. En ancien français, le "meschin", c'est aussi le serviteur (cf Greimas, Dictionnaire de l'ancien français, Larousse), celui qui se machine est ainsi celui qui met son esprit à son service, ou celui qui se met au service de son esprit. Dans les romans policiers, l'enquêteur traditionnel (le spéculatif) se machine beaucoup l'esprit afin de déjouer une machination.

6.
On peut voir la Seconde Guerre Mondiale comme une lutte entre des esprits qui refusèrent de se laisser machiner (Churchill, De Gaulle, Roosevelt) et des esprits voués à la machination (les dirigeants du parti nazi).

7.
Se peut-il que l'esprit machinant se laisse fasciner par sa propre machination et finisse par devenir purement machinal? C'est peut-être là l'origine des grands systèmes philosophico-totalitaires.

8.
Le spéculatif est souvent énigmatique (qui sait ce qu'il pense ?). Dans les romans policiers, il laisse parfois échapper, sans la commenter, quelque citation littéraire :
"- Le persil qui tombe dans le beurre, par une journée de chaleur...
Miss Lemon le regarda d'un air étonné.
- Le persil ?
Il [Hercule Poirot] sourit.
- C'est une citation d'un de vos classiques. Vous connaissez, je suppose, Les Aventures de Sherlock Holmes, et peut-être aussi ses Exploits ?"
(Agatha Christie, op. cit. p. 10)
C'est que, comme les grands maîtres des échecs, la stratégie et ses façons de penser ne sont pas si faciles à comprendre, et même à déterminer. C'est ce qui fonde l'aristocratie de son esprit et le fait qu'il puisse trouver matière à réflexion dans Les Aventures de Sherlock Holmes alors que, pour la "parfaite secrétaire", tout cela n'est que "sornettes".

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 2 mai 2012

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1 mai 2012 2 01 /05 /mai /2012 08:26

COMPTE A REBOURS

13.
Je pense parfois à ce collègue que je croisais régulièrement sur un quai de gare, qui s'en revenait après être allé voir son fils que la maladie obligeait à des séjours répétés à l'hôpital. je pense à leur discrétion, à lui et à son épouse. Je crois que peu savaient. Je lui suis reconnaissant de sa confiance.

12.
Ce monde est tellement peu fait pour nous que, sur un coup de tête, un malentendu entre ce qui est et notre propre être, il arrive qu'il finisse par nous quitter.

11.
Avoir besoin d'argent est chose fort répandue. C'est même à ça qu'ça sert, l'argent, à en éprouver le besoin.

10.
Il arrive qu'on ait le coeur si gros que si c'était une patate on pourrait en faire des frites congelées.

9.
Ah nom de moi, je suis triste... je sais bien que la tristesse est une impolitesse ontologique et un manque de savoir-vivre quand on songe à ceux qui ont de vrais soucis... mais que voulez-vous, on se ne refait pas, on se défait.

8.
On me l'a dit il y a longtemps que je suivais une stratégie de l'échec. Je finis toujours par échouer, par m'échouer même, sur quel maudit rivage ? ah bah, ça n'a pas d'importance.

7.
Il n'y a guère que les livres et les soucis domestiques qui ne m'auront pas manqué.

6.
Je ne sais pas si l'on se pardonne d'avoir vu son père pleurer.

5.
A la mort de Serge Gainsbourg, quelqu'un a déclaré - il me semble que c'était Bashung, mais je n'en suis pas si sûr - que l'auteur de L'histoire de Melody Nelson et de L'Homme à tête de chou était l'homme le plus seul qu'il ait jamais rencontré. Cela semble exagéré. Car enfin, il y avait Jane Birkin, ses enfants, Bambou, et des amis, des relations, évidemment !Evidemment... évidemment... et pourtant, on l'imagine assez bien, Gainsbourg, en proie à la solitude, comme si certains êtres ne pouvaient qu'en passer par là, par le sentiment de solitude, par le besoin de se retrouver seul et d'en souffrir.
Bon, si ça se trouve, tout ça, c'est que du story-telling, comme on dit chez les faiseurs, de la légende pour faire vendre. A ce propos, c'est-y-vrai que - j'ai entendu ça sur France Culture, figurez-vous, que Patti Smith a toujours eu la plus grande affection pour la figure de Jeanne D'arc au point de s'en être fait une sorte d'ange gardien, ou bien, c'est que du pipeau, du flûtiau, du flageolet ?

4.
Je ne m'apprécie que modérément : j'ai beaucoup trop de défauts pour cela. Je ne me reconnais qu'une certaine lucidité et un certain talent de scribe. Pour le reste, je suis nul. Je suis tellement habitué à ce ressentiment envers moi-même que j'ai toujours trouvé saugrenu qu'une fille puisse s'intéresser à moi. Du reste, cela ne durait jamais bien longtemps, juste le temps d'un pincement au coeur et la belle allait voir ailleurs. Eh bien, tant mieux, au moins, leur aurai-je évité cet embarras d'avoir à me présenter à leurs amis.

3.
Il est tout de même assez étonnant que, même méprisé, critiqué, ignoré, avec peu de perspectives d'avenir et un souffle qui commence singuliérement à me manquer, je continue à penser à mes échecs sentimentaux. C'est pas étonnant, c'est merveilleux. Je dois être un simple d'esprit.

2.
Certains ne pardonnent pas aux gens qu'ils considéraient jusque là comme d'aimables zozos, assez sympathiques et influençables, avec qui on peut en user avec la condescendance de ceux dont on dit "ce sont des gens bien", certains donc ne pardonnent pas que l'on ait soudain du talent alors qu'eux n'ont que de la méthode.

1.
Compte à rebours : 5 - 4 - 3 - 2 - 1 - moi.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 1er mai 2012

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30 avril 2012 1 30 /04 /avril /2012 22:38

LA MORT DE C'T'HOMME MÊME QUI S'APPELOT ARTHUR

Regardez c't'homme il a des douleurs
La main sur le coeur il chancelle Ah
Vite vite vite faut qu'on le secoure
Et qu'on l'entoure de soins sinon au
Cimetière on lui portera des fleurs.

Le quasi mouru se remémore
Tout ce qui s'a passé dans
Son passé avant qu'il soye
Tout à fait très mort v'là
D'abord que ça commence un
Jour qu'il croyait encor à
L'amour et tout çi tout ça

Ce soir youp la lop ! c'est la fête
Ce soir j'vas lui dire tout l'amour
Qu'j'avions pour elle oh ce soir ça
Va être mon jour c'est ainsi que de
L'espoir plein la figurative Arthur
Se faisait des illusions because la
Donzelle a des amours qu'elle tient
Secrètes et en pince pour Jean-Yves
C'est sûr ce soir Arthur va y avoir
Droit à l'amertume d'la déconfiture

Après voyez comme c'est bizarre il
S'a remémoru la légende du marquis
Qu'a mouru dans les roses même que
Tout son corps c'était franchement
Pas beau à voir un drôle de bazar.

Las sans bras ni jambes ni tête je suis vaincu
Se disait le chevalier me voilà dans les roses
Se disait le chevalier qu'était tout percé une
Fois que t'as vécu que veux-tu faut bien qu'tu
Te reposes sans bras ni jambes ni tête & c'est
Pas encore ce soir que tu iras faire la fête &
Lui dire tout l'amour qu't'avions pour elle la
Donzelle qu'est si mignonnette avec sa tête si
Bien frisée qu'on dirait une salade blonde ses
Gambettes qu'on dirait les boudins blancs qu'à
La nouvel-an on dévore goulûment aussi qu'elle
A de mignonnes menottes si habiles à casser le
Cou des lapins pour dimanche qu'est le jour du
Seigneur qu'on va à l'église entendre la messe

Enfin tandis qu'il allait laisser ses osses
A la terre et son âme à diable sait qui une
Mine féroce lui apparut sur la face et v'là
Qu'i s'montra assez curieux dans le loquace

Nous sommes sur la terre qu'y faisons-nous
Voici le genre de questions qui sert à nib
Voici le genre de fariboles qui à l'envers
Vous la mettent la coupe au bol et vous le
Secoue le bocal qu'vous v'là phénoménal Ah
Certes en voilà bien de beaux mystères des
Etants plutôt que rien et du rien plus que
Tout que voulez-vous c'est ainsi pas autre
Ment beaucoup qui dit savoir pourquoi tout
ça voici et voilà ment beaucoup voilà tout

Pis il mourut.
Pis on l'enterra.
Pis on a bu.
Pis on s'rentra.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 30 avril 2012

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30 avril 2012 1 30 /04 /avril /2012 15:33

RENDS-TOI COMPTE

1.
En manière de reproche, ma mère, parfois, me disait alors que, grand dadais, j'avais fait quelque bêtise : "Rends-toi compte, Patrice, rends-toi compte..."

2.
"Quand il eut terminé, quand les soleils épars,
Eblouis, du chaos montant de toutes parts,
Se furent tous rangés à leur place profonde,
Il sentit le besoin de se nommer au monde"
(Victor Hugo, Les Contemplations, Nomen, numen, lumen)

a) Ces soleils épars du chaos montant de toutes parts me font penser à des bulles de champagne, et aussi, au bouillonnement qui prélude au surgissement de quelque monstre marin.

b) Dieu a sans doute une boîte à soleils où chacun a sa place profonde. Dieu les y range, les astres, selon un ordre connu de lui seul.

c) Dieu est le gestionnaire de la matière. Au fond, il n'est qu'un intendant.

d) Est-ce le besoin qui précède le langage ou le langage qui précède le besoin ? Et puis, pourquoi Dieu aurait-il un besoin? N'est-il pas parfait et donc parfaitement auto-suffisant ? Peut-être alors que Dieu est en fait ce besoin, n'est en fait que besoin, et tout d'abord besoin de donner sens à ce qui est en le nommant, c'est-à-dire en divisant ce qui est, en autant de référents qu'il y a de noms sur la liste que l'humanité ne cesse de compléter, d'enrichir, d'infiniser.

3.
"Une nuit que j'avais, devant mes yeux obscurs,
Un fantôme de ville et des spectres de murs"
(Victor Hugo, Les Contemplations, Les Malheureux)

Des "spectres de murs", évidemment c'est plus facile pour passer à travers les murailles. A du genre univers parallèle qu'ils font penser, cet urbain fantomal et ces murs tout en rien, que le plus étonnant, c'est qu'il y rencontrât, le narrateur totorien, un réel comme vous et moi, le laitier, ou un marchand de glaces, ou Valérian et Laureline, ou un chat, ou un loup-garou sortant d'une trompette, ou Alice s'étant trompé de miroir.

4.
"Le vallon où je vais tous les jours est charmant,
Serein, abandonné, seul sous le firmament,
Plein de ronces en fleurs ; c'est un sourire triste.
Il vous fait oublier que quelque chose existe,
Et, sans le bruit des champs remplis de travailleurs,
On ne saurait plus là si quelqu'un vit ailleurs."
(Victor Hugo, Les Contemplations, Pasteurs et troupeaux)

Le là est ici ce lieu d'être singulier car critique. Nous circulons sans cesse entre lieux pleins et espaces déliés. On va ainsi de chez soi à la place du marché en passant par des voies qui font communiquer les lieux entre eux. Tout semble s'y articuler logiquement, c'est-à-dire en fonction de la logique des urbanistes. Mais la ville est hantée, mais l'espace est troué. A tout moment, dans un café désert, un bout de place excentré, le bout d'une très longue avenue qui débouche sur un parc quasi désert, il peut se trouver que vous vienne l'idée que ce qui est, est infiniment étrange, et même, à certaines heures, infiniment malin. La campagne multiplie la prégnance de cette idée, et il est en effet que certains lieux assez déserts pour y appeler l'être en proie à lui-même, vous font oublier que quelque chose existe.

5.
- Ton adversaire est mieux que toi ; il est plus aimable, plus serviable, mieux organisé, moins impulsif, plus sérieux, plus sympathique.
- Je n'en serai que plus féroce.

6.
"Rends-toi compte de Dieu. Comprendre, c'est aimer."
(Victor Hugo, Les Contemplations, Les luttes et les rêves, VIII)

Mais je me rends compte, je me rends compte de la puissance de Dieu puisqu'il est dans toutes les bouches. Pour ce qui est de comprendre, c'est aimer, il ne faut pas s'emballer : comprendre un énoncé ne veut pas dire que l'on va aimer le problème, ou alors, c'est que l'amour a plus d'un fouet dans son sac.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 30 avril 2012

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30 avril 2012 1 30 /04 /avril /2012 13:55

DES VIES RÊVEES

1.
Napoléon : tambours de la marche et trompettes de la renommée puis funèbre fut le tambour et hallucinés les cris des trompettes.

2.
"Néanmoins, l'empathie n'est pas suffisante car il faut, pour pouvoir porter un jugement sur ce qui est bien ou mal, être capable de faire la distinction entre les choses telles qu'elles sont et les choses telles qu'elles devraient être."
(Frans de Waal, propos recueilli par Alexandre Lacroix, Philosophie Magazine n°59, mai 2012, p.58)
Certes, "porter un jugement", mais c'est que les choses telles qu'elles sont ne sont jamais telles qu'elles semblent être, et les choses telles qu'elles devraient être, par définition, relèvent de l'imaginaire.

3.
Nous louvoyons entre des catégories d'étants que nous nous efforçons de faire passer d'une colonne à une autre : étants possibles, étants probables, étants improbables, étants impossibles. Tout cela vous fait une soupe fort absurde que nous sommes pourtant bien forcés d'avaler.

4.
Il n'y a qu'un monde possible, celui-ci, comme il n'y a qu'une seule liberté possible, celle qui est conditionnée par le plus grand des déterminismes. On peut changer tous les gouvernements que l'on veut et ceux-ci peuvent promulguer d'autres lois et d'autres lois encore, on en arrivera toujours au seul monde possible.

Note : c'est une des leçons que l'on peut retirer de l'excellente série télé canadienne : Les vies rêvées d'Erica Strange. Je vous la recommande, c'est assez bien vu.

5.
Nous croyons saisir ce qui n'est que fumée cependant que nous nous cognons à ce que nous ne voyons pas.

6.
Penser que notre adversaire vaut mieux que nous, c'est déjà préparer la victoire.

7.
Certains pensent qu'il y a peut-être eu complot contre DSK, et que si cela a permis d'éviter à la France une honte certaine - puisque, dit-on, la victoire aux Présidentielles lui était quasi acquise - le complot était donc légitime. J'ai tout de même du mal à partager ce point de vue, le rôle de l'Etat n'étant pas de court-circuiter la justice, même si je pense qu'en fin de compte, il vaut mieux qu'une certaine vérité ait enfin éclaté puisqu'apparemment, elle était jusque là soigneusement occultée.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 30 avril 2012

 

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30 avril 2012 1 30 /04 /avril /2012 07:30

AUTRE FLÛTIAU BOURRU

1.
A propos de Black Cat's Blues, on y ajoutera des griffures d'électrique guitare, bien sûr.

2.
"Moins d'enfants, plus d'argent !" Voilà un slogan qui me va comme un gant.

3.
"L'orchestre de musique de chambre dont il [Jacques Théjardin] faisait partie acceptait, en effet, car les temps étaient durs, de se produire dans un simple couloir..."
(Boris Vian, L'Ecrevisse in Blues pour un chat noir, Le Livre de Poche n°19310, collection Libretti, p.65)
En général, ce qui se produit dans les couloirs, ce sont les vaches, que je ne manque jamais de louper, évidemment, car je suis maladroit.

4.
L'expression "Mort aux vaches !" est une insulte envers tous les ruminants.

5.
Je me demande si à force de ruminer des idées noires on finit par voir passer des corbillards.

6.
"transpiriner" : trouvaille de Boris Vian dans L'Ecrevisse : "Il se réveilla en sursaut. L'aspirine l'avait fait transpiriner" (op. cit. p.68) Marc Lapprand, dans une note en bas de page, signale que "le mot-valise naît littéralement sous nos yeux, et en toute logique." A la façon des trouvailles du jazz, les vannes à Vian semblent tout à fait spontanées, comme si la fantaisie lui coulait du stylo aussi facilement que le swing d'une trompette.

7.
"... pendant les vagues de chaleur, les gens des quartiers populeux, qui dorment sur les paliers des échelles d'incendie, quelquefois cinq six gosses, et des filles de seize ou dix-sept ans, presque à poil..."
(Boris Vian, Martin m'a téléphoné..., op. cit. p.43)
Effet de réel. L'écriture de Boris Vian est essentiellement fantaisiste. Certes, elle évoque des événements tragiques, mais cette tragédie est elle aussi marquée par le surréalisme, cependant qu'elle est aussi, par endroits, contaminée par le réalisme du sordide, celui des romans noirs et de la ségrégation. C'est ainsi que, dans ce passage, Boris Vian évoque le photographe américain Weegee et la crudité de ses clichés. On pourra noter aussi l'allusion à l'omniprésence du corps sexualisé qui est le sujet principal du célèbre J'irai cracher sur vos tombes.

8.
"Des individualités imprécises..."
(Boris Vian, Blues pour un chat noir, op. cit. p.27)
Les gens, des "individualités imprécises". Puis vous en connaissez certains - c'est fatal -, ou croyez les connaître, et c'est de plus en plus précisément qu'ils s'imposent à vous, les gens, jusqu'à vous étouffer parfois; c'est pas ce qu'ils veulent d'ailleurs, mais c'est ce qu'ils font.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 30 avril 2012

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30 avril 2012 1 30 /04 /avril /2012 06:32

LE FLÛTIAU BOURRU PEUT-ÊTRE

1.
Il y a une nouvelle de Boris Vian qui a pour titre Blues pour un chat noir. L'association du blues (musique qui exprime sinon le désespoir, en tout cas la scoumoune, le maudit vaudou, le mauvais oeil, le spleen, le mal d'être, l'âme qui s'effiloche) et du chat noir (traditionnellement porte-poisse) va de soi que le titre Black Cat's Blues vous semble une évidence et que vous l'imaginez même ce blues, avec miaulements des cuivres - poussera-t-on l'ironie jusqu'au wah-wah ? - basse ronronnante et soubresauts, piano souple, félin, tendu, détendu et batterie cognant à coeur.

2.
"agriffer" : trouvaille de Boris Vian : mot-valise créé sur agripper et griffer.
"On trouva une ficelle, mais, de toute évidence, le chat ne pouvait pas s'y agriffer."
(Boris Vian, Blues pour un chat noir, Le Livre de Poche n°19310, collection Libretti, p.25)

3.
"... elle est blonde et elle a une bouche mouillée..."
(Boris Vian, Martin m'a téléphoné..., op. cit., p.58)
Juste comme une frite avec un peu trop de vinaigre dessus.

4.
"Alors il prit un grand couteau et se coupa la tête."
(Boris Vian, L'Ecrevisse, op. cit. p.75)
C'est le cas de le dire que, des fois, il arrive qu'on la perde, la tête. Voilà le genre de phrase qui prête à rire autant qu'elle rappelle que le fait d'exister expose au tragique. En cela, Vian est plus important que bien des écrivains réalistes qui font rien qu'à nous prendre pour des éplucheurs d'oignons.

5.
"Le flûtiau bourru peut-être..."
(Boris Vian, L'Ecrevisse, op. cit. p.69)
Y a des fois qu'on a le flûtiau bourru, le violon grognon, le clavecin chagrin, la clarinette aigrelette... ça vous fait une musique d'ours à pas danser dessus, à méditer des crânes et des pas marrances.

6.
Y a des fois, je me sens triste et surréel comme une phrase de Boris Vian ; oh alors, j'en ferais des moulinets avec ma canadienne à en abîmer des vieilles dames encore intactes.
(Boris Vian, Blues pour un chat noir, op. cit. p.21).

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 29 avril 2012

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