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14 mai 2009 4 14 /05 /mai /2009 15:54

DU PAYSAGE IMMOBILE
Notes sur le recueil Le paysage immobile de Jean Le Boël (Les Ecrits du Nord, Editions Henry, janvier 2009, pages 3 à 7).

 

Contempler.
Ce que le narrateur du « paysage immobile » de Jean Le Boël octroie en temps et en lieu : « chaque matin / le paysage immobile » de tous ces matins du monde qui ne sont plus qu’à jamais, voués à cette vie fourmillante des humains et des autres.

 

« ne pas fuir plus loin »
C’est là l’humilité de celui qui tient lieu d’être : bien malin, et malin plus que le malin lui-même, qui prétend pouvoir définir l’être de toute chose qui est partout comme cette énergie noire des physiciens actuels, omniprésent et énigmatique, dans la place que j’occupe et dans le plus loin. Le temps de l’être ici n’est pas temps perdu ; il est au moins cette mesure du passage de l’être.

 

Comme chez Guillevic.
Comme chez Guillevic, il y a dans la manière blanche de Jean Le Boël mise en œuvre de l’aphorisme : « qui a vu le divin / dans les foules avides / qui a rencontré l’homme / parmi les hommes // sinon exclu / renié / fatigué du chemin » : le messie n’est tout d’abord jamais reconnu et l’homme de bien compte moins qu’une armée en campagne. Ce que l’on appelle humanité n’est souvent qu’une humanité reniée.

 

« Gimmie Shelter »
On se souvient de l’intro épatante du morceau Gimmie Shelter des Stones : elle m’est revenue en tête à la lecture de cette tresse de sons : « un jour, la vie / le vent glissant sous / le ventre blanc de la mouette ». Rien de plus simple que cette image, et rien de plus nécessaire que ce jeu de la constrictive [v] avec  la nasale « an » et l’orale « ou », que ce rythme qui souligne chaque quatrième syllabe et qui se suspend sur la préposition « sous » de telle sorte que la mise en musique de ce passage obligerait le compositeur à placer une blanche sur le mot « sous », à suspendre le tempo, à suggérer l’ailleurs.

 

Médiéval.
Ceux qui ont pu approcher Jean Le Boël connaissent sa légendaire courtoisie. (Nous autres à côté, nous sommes des brutaux gorgés de gothique électrique et de baroque à cheveux longs, et nous ne nous flattons point). Il y a dans sa poésie quelque chose de la « cour d’amour », du « jeu-partie » des anciennes magies versifiées : « J’ai douté de pouvoir dire / de cette douceur où nous fûmes / devisant d’amour »

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 14 mai 2009

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