CES PALAIS SOMBRES DE NOS NEURONES
SONGE A CECI POLITIQUE
1.
Tiré de Tristan Corbière: "Tour du cadran"; "à tout déshérité"; "Coup de rapière dans l'eau du fleuve Léthé !" (cf "Litanie du sommeil").
2.
Porteurs du message, ils firent le tour du cadran, afin d'être assurés que chaque aiguille de chaque heure soit informée.
3.
Passant dans la rue, devant les vitrines qui agitaient leurs mannequins, nous nous demandions si nous n'étions plus.
4.
Avec la crise, le sentiment d'être "à tout déshérité" croît et se fortifie, semant d'obscures vengeances.
5
"Coup de rapière dans l'eau du fleuve Léthé!" écrit Corbière; ce qui fait qu'on ne s'en souvient plus, et qu'on recommence, sempiternel frappeur d'eau.
6.
Tiré de Tristan Corbière: "des grands hallucinés !"; "Aile des déplumés !"; "Arche où le hère et le boa changent de peaux !"
(cf "Litanie du sommeil").
7.
Lors, l'aveugle me dit: "Avec de si grand yeux, êtes-vous de la compagnie des grands hallucinés ?"
8.
Déplumé, il ne lui resta guère plus qu'une plume avec laquelle il se plaignit de n'être plus que déplumé.
9.
Déplumé, il rêva que cette plume qui lui restait devenait un couteau. De l'être qu'il aiguisait comme on aiguise une lame, au tranchant.
10.
Il se pourrait bien que cette crise donne des ailes à quelques déplumés. Songe à ceci, politique: ils ont encore bec et griffes.
11.
Nous eûmes beau changer de peaux, passer du "hère au boa", de l'être au paraître, elle nous reconnut tout de même.
12.
Tiré de Tristan Corbière: "Arc-en-ciel miroitant !"; "Faux du vrai ! Vrai du faux !"; "Tityre sous l'ombrage essayant des pipeaux" (cf "Litanie du sommeil").
13.
Alors, les guerrières de la pluie, tentant de séduire le soleil, aveuglant les fenêtres, se mirent à miroiter comme arc-en-ciel.
14.
Emettre des opinions, ce n'est sans doute pas autre chose qu'être dans le "faux du vrai", à moins que cela ne soit dans le "vrai du faux".
15.
Grinçant Tityre, il me faut d'abord essayer quelques pipeaux, afin d'en trouver un d'assez faux pour.
16.
La crise envoie l'honnête homme et l'humaniste aux orties; belle âme, tu n'es qu'un fantoche.
17.
Dépit français; ça sert à rien d'être si intelligent! Nos beaux "Rafale", on les vend pas, et même nos voyous préfèrent la Kalach au Famas.
18.
Les gens de gauche qui ont des actions EADS - si, si, j'en connais -, pleurent-ils des larmes en forme de faucille et de marteau ?
19.
Depuis la crise des subprimes, je ne regarde plus mon banquier de la même façon: maintenant je sais qu'il n'en sait pas plus que moi.
20.
Heureusement, j'suis anar. Y a que quand j'suis bourré que je suis de droite, ou de gauche... Oh la la ! j'sais plus.
21.
Ce qui explique la montée de l'extrême-droite, c'est cet état de crise où l'être social des autres devient une menace, une insulte, une humiliation.
Patrice Houzeau
Hondeghem, le 5 janvier 2014
NON ELECTRIQUE RAGOUT N'EST PAS UN TITRE DU GROUPE GONG
1.
Parfois, en lisant des vers de mirliton,
Je m'interroge... Pourrais-je en faire au thon ?.
2.
Le rock n' roll, ces minutes d'un jour sans fin, explosé, éclaté, puzzlé de partout.
3.
Môme, je fus fasciné par Corto Maltese. Je ne comprenais rien, mais je trouvais ça magnétique. De même, certains visages ont cette grâce de rester énigmatiquement beaux.
4.
"Couveur de magistrats et Couveur de lézards !"
(Tristan Corbière, "Litanie du sommeil")
Un travail de politique, ça, couver des magistrats et aussi des lézards.
5.
Tiré de Tristan Corbière: "marmite d'Arlequin"; "changer de patte au cormoran pensif"; "Pavillon de la Folle" (cf "Litanie du sommeil").
6.
Je fais de la littérature arlequine, avec de l'émietté d'auteur, des bouts d'prose et des vers tombés d'l'os, je me fais mon ragoût.
7.
Dans ma "marmite d'Arlequin", vous y retrouvez-vous, guignols et polichinelles ?
8.
Je relève dans Corbière l'expression "changer de patte au cormoran pensif". Je ne sais pas ce que ça veut dire, mais ça m'amuse.
9.
Doit être un petit métier disparu, ça : "changeur de pattes des cormorans pensifs"...
10.
A la réflexion, je me demande si "changer de patter au cormoran pensif" ça ne voudrait pas dire "changer de disque".
11.
Marrant, c'est marrant; mais rigolant, c'est rigolo.
12.
Que me reste-t-il ?... Mon talent... Peu de chose donc.
13.
- Et Machin ?
- Tu savais pas... il est mort... un accident domestique avec soi-même.
14.
"Grosse nudité du chanoine en jupon court !"
(Tristan Corbière, "Litanie du sommeil")
Ceci n'est pas un vers de Victor Hugo.
15.
Quand Corbière évoque "le pavillon de la Folle", il reformule l'expression "folle du logis", l'imagination, avec qui nous vivons et à qui nous devons tant.
16.
L'expression "folle du logis" rappelle qu'en théorie nous ne serions jamais être absolument seul. Ceci dit, quand on n'a plus rien à imaginer....
17.
La folle du logis, son plat préféré, c'est la salade d'hyperboles, avec ses doutes en lardons. Se déguste en se faisant un film.
18.
"SOMMEIL ! - Dédale vague où vient le revenant !"
(Tristan Corbière, "Litanie du sommeil")
Je dois être possédé; dès qu'ça évoque du spectre et du revenant, faut qu'je touitte !
19.
Des fois, je me demande si les disques de Jimi Hendrix ne seraient pas des cercles parallèles, dans lesquels il ne cesserait pas, à chaque fois qu'on le joue, l'électrique phénix, de revenir, et de nous demander, avec une voix d'outre-son "-Are you experienced?".
20.
"SOMMEIL ! - Long corridor où plangore le vent !"
(Tristan Corbière, "Litanie du sommeil")
Evidemment, pour l'écho, et les sons "on", "en", qu'on se prend, comme s'il était, ce corridor, traversé par une guitare fantôme qu'aurait l'air, aux mains d'un guitariste d'autrefois, de jouer "The Wind Cries Mary".
Patrice Houzeau
Hondeghem, le 2 janvier 2014.
ACOUSMATIQUE DE LA FORÊT
1.
L'enseignement délivré derrière un rideau, afin que ses disciples puissent se concentrer uniquement sur le sens de ses phrases, Pythagore, dit-on, l'appelait "acousmatique".
2.
"Crépuscule flottant de l'Être ou n'Être pas !...
Sombre lucidité ! Clair obscur ! Souvenir"
(Tristan Corbière, "Litanie du sommeil").
3.
Fantômas, c'est l'être flottant comme un crépuscule, et qui allonge son ombre sur tout un paysage.
4.
Se sentir sans cesse entre l'Être et le n'Être pas, franchement, c'est pas une existence, mais une vocation au fantômat.
5.
Remarquez que nous sommes tous plus ou moins partagés par le n'être que et l'être qu'on voudrait être.
6.
Les gens dans la rue, ces clairs obscurs qui passent, plein d'ombres et de lucidités, de cercles et de perspectives.
7.
Un médium qui regarde dans un visionnaire, risque-t-il une oculocution ?
8.
Tiré de Tristan Corbière: "Souvenir de l'inouï"; "Lampiste d'Aladin qui sais nous éblouir !"; "l'épicier du Sort"; "Corne de Diane". (cf "Litanie du sommeil").
9.
Les musiciens acousmatiques (acousmatique, quel beau mot) ne sont-ce point des explorateurs du son qui se souviendraient de l'inouï ?
10.
Les explorateurs acousmatiques progressent dans une forêt folle de sons.
11.
Les explorateurs acousmatiques cherchent-ils le latin perdu des oiseaux ?
12.
Le coupable, c'est toujours le lampiste; on ne songe jamais à interroger le génie de la lampe.
13.
Je ne peux lire ce vers -"Lampiste d'Aladin qui sais nous ébouir"[Corbière] - sans entendre dans mon oreille sourde un cri électroacoustiquement sombre dans une grande lumière aigue.
14.
"Eunuque noir ! muet blanc ! Derviche ! Djinn ! Fakir !"
(Tristan Corbière, "Litanie du sommeil")
Silences lourds de secrets ! Tours et vertiges ! Nuées étranges ! Clous ! "Secret des poignards volants" !
15.
L'embuscade...
D'abord m'suis r'trouvé assoupi par du vin gris,
Puis me suis fait assommer par du cassoulet.
16.
Dans la forêt-vierge acousmatique, nos explorateurs dénichèrent de sifflants zigouigouis et des portes à grincements.
17.
Qui qu'a bouffé l'Ogre ? Je l'ai dit mille et une fois, ça, qu'il ne faut pas laisser traîner les Contes de Fée !
18.
"Où Femme Barbe-Bleue oyait l'heure mourir !...
Où Belle au Bois dormant dormait dans un soupir !"
(Tristan Corbière, "Litanie du sommeil")
19.
J'aime assister aux agonies des horloges, ouïr leurs heures mourir; c'est ma - bien que vaine, si vaine - revanche sur le temps.
20.
Dans la profonde forêt des sons, nos explorateurs acousmatiques cherchaient-ils le soupir où dormait la Belle au Bois dormant ?
21.
Quand on a affaire à "l'épicier du Sort", des fois, on a la moutarde qui vous monte au nez.
22.
Et la nuit, la chaste Diane chassant, un croissant de lune illuminant sa chevelure, passe, au loin, dans la forêt perdue.
Patrice Houzeau
Hondeghem, le 1er janvier 2014.
DE L'IMPLACABLE DANS LA LANTERNE
1.
Twitter, on dirait une pièce de Ionesco, avec des répliques dans tous les sens de partout.
2.
Tiré de Tristan Corbière: "Grand Dieu"; "Clair de lune / Des yeux crevés"; "Balayeur de rancune". (cf "Litanie du sommeil")
3.
"Grand Dieu", c'est vite dit ! Si ça se trouve, il est infiniment microscopique.
4.
"avoir clair de lune et yeux crevés" : Ne pas voir ce qui pourtant crève les yeux.
5.
J'ai beau faire, je n'arrive pas à la balayer, ma rancune; elle s'accumule plutôt, en moutons noirs.
6.
Nous sommes relativement à un absolu dont nous nous méfions comme d'un maître trop puissant.
7.
L'humain, sans doute, a inventé le Diable pour contrer le monopole divin sur l'absolu.
8.
Un seul absolu ? Je ne crois pas, tout un tas d'absolus plutôt, en infinis, et résolus à en découdre, absolument.
9.
Twitter, une pièce de Ionesco qui n'en finirait pas, décousue de partout, avec des répliques dans toutes les langues, et du flou dans les liens logiques. C'est intéressant.
10.
Twitter, si ça avait été un exercice donné dans un cours, les élèves auraient dit : "- N'importe quoi !"
11.
Tiré de Tristan Corbière: "la Planète lourde"; "hanter l'oreille sourde"; "mis à la porte"; "puits de vérité". (cf "Litanie du sommeil")
12.
J'ai la Planète lourde, qu'il dit Dieu, ça tape cogne, pis ça grouille, comme si j'avais des humains dedans.
13.
Si un jour, je deviens sourd, la nuit, des musiques spectrales et des chansons fantômes viendront-elles me hanter la feuille ?
14.
Le réel est plein de portes que l'on passe, ou que l'on ne passe pas, et parfois même, on les prend.
15.
Vous savez, dans le puits, y a que d'l'eau, et puis la lune...
16.
"Soupirail d'en haut ! Rais de poussière impalpable
Qui viens rayer du jour la lanterne implacable !"
(Tristan Corbière, "Litanie du sommeil")
17.
Tout le temps, les scribes ailés, avec le zèle des serviteurs de Dieu, en rayant du jour des noms, des noms, des noms, actualisent sans cesse la liste des vivants.
18.
J'ai la lanterne implacable, qu'il devait se dire en grec et dans sa barbe, Diogène, lorsqu'il se promenait dans les rues en plein jour, lanterne allumée et prétendant chercher "un homme" (comprenez la prétendue nature humaine).
19.
C'est qu'nous y lanternons aussi, dans l'implacable, en l'attendant, Godot.
20.
Et puis, en lanternant ainsi, à force, c'est qu'on en avale, de l'impalpalble, de la poussière d'indicible, qu'elle finit par nous étouffer.
Patrice Houzeau
Hondeghem, le 31 décembre 2013.