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5 décembre 2013 4 05 /12 /décembre /2013 11:14

BREFS SUR UNE UTOPIE EROTIQUE

 

1.
"Du temps que la Nature en sa verve puissante
Concevait chaque jour des enfants monstrueux,"
(Baudelaire, La Géante)

 

Y a des lunes et des lunes et des lunes, la Nature, elle faisait dans le monstre, le mégasaurien, le diplodocus, et puis, elle s'est perfectionnée, elle a miniaturisé.

 

2.
"J'eusse aimé vivre auprès d'une jeune géante,
Comme aux pieds d'une reine un chat voluptueux."
(Baudelaire, La Géante)

 

Quidam fantasme sur une "jeune géante" des temps légendaires; ce qui ne se trouve pas au coin d'la rue là-bas, la fille de joie.

 

3.
Baudelaire, La Géante. "jeune géante", comme cette harmonie post-alvéolaire est agréable à prononcer. De même, cette "reine"  qui allonge sa syllabe au centre du vers, préparant le détachement délicat des quatre syllabes de l'épithète "voluptueux" (cf "Comme aux pieds d'une reine un chat voluptueux").

 

4.
Baudelaire, La Géante. La suite "jeune géante", "reine", "chat voluptueux", voilà qui vous flanque une de ces ambiances d'Egypte à légendes, d'Egypte pharaonne fantasmée.

 

5.
"J'eusse aimé voir son corps fleurir avec son âme
Et grandir librement dans ses terribles jeux;"
(Baudelaire, La Géante)

 

Du "corps qui fleurit avec son âme"... On imagine la plante carnivore, fatale, vénéneuse comme une vamp des films d'Hollywood. Quant à ses "terribles jeux", on la voit bien, la "jeune géante" s'boulottant pour son quatre heures veau, vache, cochon, couvée, puis jouant à la tempête et aux petits bateaux rien qu'en prenant un bain de pieds dans la mer.

 

6.
Cela fait longtemps que je n'ai pas entendu le mot "vamp". Les mots passent; les choses restent, plus tout à fait les mêmes, comme si elles avaient changé d'ombre.

 

7.
"Deviner si son coeur couve une sombre flamme
Aux humides brouillards qui nagent dans ses yeux;"
(Baudelaire, La Géante)

 

Le coeur, parfois, couve longtemps une flamme qui ne demande qu'à surgir, phénix à la vue de l'unique visage.

 

8.
Sa "jeune géante", à Baudelaire, c'est carrément des brouillards qui lui mélancolisent les mirettes, que je suppose que ses verres de lunette, ils sont faits avec des phares, de ces puissants faisceaux qui indiquent la côte aux navires glissant sur les gouffres amers.

 

9.
"Parcourir à loisir ses magnifiques formes;"
(Baudelaire, La Géante)

 

Il en rit du "i", quidam; il en jouit.

 

10.
"Ramper sur le versant de ses genoux énormes,
(Baudelaire, La Géante)

 

"A l'assaut !" s'dit le vermisseau, "à l'assaut de la jeune géante !".

 

11.
"Et parfois en été, quand les soleils malsains,"
(Baudelaire, La Géante)

 

Ceusses-là qui vous flanquent des sales mouches partout, et d'la moiteur plein les d'ssous d'bras.

 

12.
"Et parfois en été, quand les soleils malsains,

 

Lasse, la font s'étendre à travers la campagne,"
(Baudelaire, La Géante)

 

La tête sur un oreiller de collines, les pieds dans l'azur, une couverture de nuages...

 

13.
"Dormir nonchalamment à l'ombre de ses seins,
Comme un hameau paisible au pied d'une montagne."
(Baudelaire, La Géante)

 

C'est qu'il prétend s'y installer, le bougre, sur sa "jeune géante". C'est que, cette histoire, ça en devient géographie, utopie érotique.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 5 décembre 2013

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4 décembre 2013 3 04 /12 /décembre /2013 23:29

PLOUF PONK SPLEEN

 

1.
"Du fond du gouffre obscur où mon coeur est tombé"
(Baudelaire, De Profundis Clamavi)

 

Ton coeur, en tombant, a-t-il fait plouf, ou bien ponk ?

 

2.
"Recueille-toi, mon âme, en ce grave moment,
Et ferme ton oreille à ce rugissement."
(Baudelaire, Le crépuscule du soir)

 

Mais qui c'est-y qu'a mis ce lion dans ma chambre ?

 

3.
"Cependant des démons malsains dans l'atmosphère"
(Baudelaire, Le Crépuscule du soir)

 

Ils foncent en battant d'leurs ailes de cuir et
L'on peut lire sur leurs tee-shirts "Iron Maiden".

 

4.
Pascal avait son gouffre, avec lui se mouvant"
(Baudelaire, Le Gouffre)

 

Et, très pensif, Pascal prenant ce gouffre pour
Sa poche, y perdit une infinité de choses.

 

5.
"Tout le jour, où tu veux, tu mènes tes pieds nus"
(Baudelaire, A une Malabaraise)

 

Et c'est fort heureux, car sinon, tes pieds iraient
Là et le reste ailleurs, ce qui provoquerait
A tout le moins un affront au bon sens commun.

 

6.
Baudelaire, Spleen. Du "ciel bas et lourd" à les cogner étourdis, aux fenêtres les anges... ça fait "couvercle", cocotte à minutes de brume.

 

7.
Baudelaire, Spleen. "L'esprit est gémissant", bouche ouverte à face triste encadrée de longues mains d'os, traînant dans un crépuscule de lendemain qui déchante.

 

8.
Baudelaire, Spleen. "L'horizon", c'est un "cercle". Tout revient tout le temps; on se cogne au même mur; on se retrouve devant le même sphinx.

 

9.
Baudelaire, Spleen. Si "la terre est changée en un cachot humide", c'est que nous en sommes les prisonniers, les relégués, les bannis d'un autre monde.

 

10.
Baudelaire, Spleen. " L'Espérance", quelle gourde ! Elle ne sait où aller, elle tâte du mur, "se cognant la tête à des plafonds pourris", elle chute en torche éteinte.

 

11.
Baudelaire, Spleen. Avec le mot "barreaux", il file la métaphore, le poète... Barreaux de pluie d'une prison à ciel bouché.

 

12.
Baudelaire, Spleen. Il a le ciboulot boulotté "d'araignées, quidam, que ses pensées s'y piègent à leurs toiles, s'y immobilisent, s'y exsanguent.

 

13.
Baudelaire, Spleen. Quel fracas de "tout à coup", quelle "furie" ça doit faire toutes ces cloches qui hurlent plus qu'elles sonnent, vierges de fonte, sorcières de métal.

 

14.
Baudelaire, Spleen. C'est plus tous ses esprits qu'il a quidam, mais d'autres, des âmes grises, sans feu ni lieu, et qui ne sont que plaintes opiniâtres.

 

15.
Baudelaire, Spleen. Pour finir, marche funèbre "sans tambours ni musique", que corbillards qui passent dans le brouillard.

 

16.
Baudelaire, Spleen. Qu'on finit par le désespoir, "L'Espoir qui pleure"; qu'on finit "crâne" à "drapeau noir", façon emblème pour cavaliers d'la mort et autres hussarderies à sabre et bottes.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 4 décembre 2013

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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 08:21

DANS BAUDELAIRE L'IRREMEDIABLE

 

1.
Dans Baudelaire, L'irrémédiable, le Ciel a beau se tordre le coup d'oeil, aucune de ses mirettes n'y met les palmes, dans le Styx.

 

2.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, un Ange qu'a tâté du bizarre, qu'a fricoté l'étrange, i s'débat, s'étouffe, prend une tasse de remous du cauchemar.

 

3.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, des fascinés chantent à la noirceur venue, font les pitres, jonglent dans les ténèbres avec leurs têtes coupées.

 

4.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, un fasciné du vaudou, un attrapé du Baron Samedi, un aveuglette cherche à s'échapper de son cercle reptilien.

 

5.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, ça s'vertiginise, ça songe aux "éternels escaliers sans rampe", qui filochent l'infini, à s'y casser l'âme et le reste.

 

6.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, y a comme un goût de Lovecraft, de glauque de nuit, de phosphore guetteur, de voyeur monstre.

 

7.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, la gueule du pôle a attrapé le navire, le souffle froid du loup court sur la glace.

 

8.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, cet aphorisme :
"Le Diable fait toujours bien ce qu'il fait".

 

9.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, le "Styx bourbeux et plombé", l'Ange corrompu par le bizarre, le "malheureux ensorcelé", le "damné descendant sans lampe", les "monstres visqueux", le "navire pris dans le pôle" font "Enblêmes nets, tableau parfait", tarot dont les cartes dans nos mains changent continuellement de figure jusqu'à ressembler à nos miroirs.

 

10.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, la "fortune irrémédiable", c'est cette fille, qui, quoi qu'elle fasse, vous imaginez qu'elle vous fascinera, et vous vous gourez : si la fascination ne vous cloue pas sur place, sidéré lapin, vous irez irrémédiablement chercher fortune à tous les diables.

 

11.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, ce qui est "sombre" est "limpide", ce qui est "clair" est "noir", comme la devinette puérile du Sphinx qui laisse si facilement Oedipe se jeter dans son destin.

 

12.
Dans Baudelaire, L'Irrémédiable, louange est faite à l'esprit lucide qu'aiguise la pensée du "Mal", ce qui n'est pas gentil.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 24 novembre 2013

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19 novembre 2013 2 19 /11 /novembre /2013 00:57

ET LE RESTE AVEC

 

1.
"J'ai longtemps habité sous de vastes portiques"
(Baudelaire, La Vie antérieure)

 

D'où, des aériennes galeries, les dieux me jetaient des anges.

 

2.
"Et le ciel regardait la carcasse superbe"
(Baudelaire, Une Charogne)

 

D'un côté, le haut oeil, bleu de dieu, et de l'autre, la superbe étrangeté et son cortège de carcasses.

 

3.
"Pour bâtir dans la nuit mes féeriques palais"
(Baudelaire, Paysage)

 

Le féerique trace dans l'air ses arabesques de palais, ses esquisses merveilleuses, puis on s'endort.

 

4
"Voilà le souvenir enivrant qui voltige"
(Baudelaire, Le Flacon)

 

La voltige virevolte ses v ivres du souvenir des syllabes sifflées au passage des petites vendeuses de magasin.

 

5.
"En rouvrant mes yeux plein de flamme"
(Baudelaire, Rêve parisien, II)

 

L'oeil parfois, ciel qui révélerait sa garde d'éclairs, montre sa flamme.

 

6.
"Une mer de brouillards baignait les édifices"
(Baudelaire, Le Crépuscule du matin)

 

L'édifice estompé, que brouille - je saisis soudainement le sens propre du mot brouillard, auquel je n'avais jamais fait attention, pas plus qu'à l'expression "feux de brouillard", qui, soudain, se met à briller d'une étrange flamme dans la nuit.

 

7.
"Je vois se dérouler des rivages heureux"
(Baudelaire, Parfum exotique)

 

Dont on entend surtout la claire rumeur.

 

8.
"Au bord d'un lac de sang, sous un grand tas de morts"
(Baudelaire, La Cloche fêlée)

 

Le rythme binaire - quelqu'un s'approche, et - au quatrième mot du second hémistiche, découvre le charnier.

 

9.
"Pauvre et triste miroir où le jadis resplendit"
(Baudelaire, Le Cygne)

 

C'est au miroir du jadis que l'on s'obscurcit, que l'on pâlit, que l'on se regrette l'autrefois.

 

10.
"Depuis l'éternité je parcours et j'habite"
(Baudelaire, Le Mauvais Moine)

 

Qui suis-je ? - Je suis l'âme humaine, à la flamme nombreuse.

 

11.
"Plonger dans vos beaux yeux comme dans un beau songe"
(Baudelaire, Semper eadem)

 

J'aime cet écho du songe et de la plongée.

 

12.
"Ils me disent, tes yeux clairs comme le cristal"
(Baudelaire, Sonnet d'automne)

 

Ils, tes globes à t'pas t'cogner tout l'temps,
Me disent des choses; elles me
Disent des j'sais pas quoi,
Tes mirettes mirifiques, ma mignonne, tes
Yeux, tes alambics à liqueur d'âme, tes yeux
Clairs comme une nuit de pleine lune,
Comme feu qui couve, comme
Le rébus d'un sphinx, clairs comme
Cristal qui songe, et moi, moi, j'pige nib, comme d'hab'.

 

13.
"Vers le ciel ironique et cruellement bleu"
(Baudelaire, Le Cygne)

 

Vers le bleu de l'oeuf qu'on zieute -
Le soleil y frit - vers le bleu, vers le
Ciel passant l'humaine mesure
Ironique comme le vieillir
Et cruellement, si cruellement bleu,
Cruellement bleu, bleu,
Bleu à se moquer de la mer glauque.

 

14.
"L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre"
(Baudelaire, Paysage)

 

L'étoile - ô crotte de bique d'or -
Dans la prairie sans clôture, dans
L'azur des patiences, ô bijou du loin
La nuit éveille le cyclope de la
Lampe près de moi qui m'adonne
A l'inutilité rythmique, à
La petite poésie, celle qu'on jette par la
Fenêtre des années qui se ferment.

 

15.
"Toi qui sais tout, grand roi des choses souterraines"
(Baudelaire, Les Litanies de Satan)

 

Toi, mon vieux satan, toi
Qui nous promènes yoyo, qui
Sais toutes nos langues, toutes nos bouches, qui sais
Tout et tarabustes, alambiques et biscornes,
Grand soutier de sous le sol, ô
Roi des Ombres et
Des Crépuscules, grand appariteur des
Choses malsaines, des manoeuvres
Souterraines, toi, mon vieux satan, et puis après ?

 

16.
La langueur qu'on a de la douceur d'un visage, c'est bien étrange, la peau n'étant que le masque de ce sac d'organes qui se débat avec sa chimère.

 

17.
"cette après-midi qui n'a jamais de fin"
(Baudelaire, Le Voyage)

 

Cette langueur qu'on a de cette
Après-midi songée, genre après-
Midi qui n'en finit pas de préluder son faune,
Qui n'en finit pas de suspendre son temps, qui
N'a pas d'autre sens que sa plénitude déliée,
Jamais nous n'y étalerons nos viandes;
De nous, il n'est déjà qu'ombre; la
Fin, c'est nous, et le reste avec.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 19 novembre 2013

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17 novembre 2013 7 17 /11 /novembre /2013 07:41

AH TIENS

 

1.
"Que diras-tu ce soir, pauvre âme solitaire"
(Baudelaire, "Que diras-tu...")

 

Je dirai - ah tiens, je vais me faire des frites.

 

2.
"Le vin sait revêtir le plus sordide bouge"
(Baudelaire, Le Poison)

 

Que l'on ôte le "revêtir" et le "bouge", et l'on a : "Le vin sait revêtir le plus sordide". Certes, parfois, il est vrai.

 

3.
"Et ton corps se penche et s'allonge"
(Baudelaire, Le Serpent qui danse)

 

Et parfois je suis plein de et, et, et, et, comme si j'avais l'âme bégayée, et qu'j'étais enchaîné au "et".

 

4.
"Je ne sais quoi d'étrange et d'enchanté
En l'isolant de l'immense nature"
(Baudelaire, Un Fantôme, III)

 

"L'étrange" et "l'enchanté", isolés, coupés de "l'immense nature", comme un prince en exil d'un peuple d'idiots.

 

5.
"La puanteur était si forte, que sur l'herbe
          Vous crûtes vous évanouir."
(Baudelaire, Une Charogne)

 

Ce "crûtes-là" me plut dès que j'ai lu; c'est le craquement du radis sous la dent, c'est le uh long de la donzelle s'évanouissant.

 

6.
"On dirait ton regard d'une vapeur couvert;
Ton oeil mystérieux (est-il bleu, gris ou vert ?)"
(Baudelaire, Ciel brouillé)

 

Me semble, lisant ces vers, l'oeil immense, à fleur de tourmente d'eau, d'une bête monstrueuse, ignorée, qui s'approche parfois des bords du lac. Ou serait-ce une vouivre, belle comme la nuit, et féroce comme une humaine ?

 

7.
"Et promène ses yeux sur les visions blanches"
(Baudelaire, Tristesses de la lune)

 

Ah il y a des asticots dans l'calendos.

 

8.
"La Prostitution s'allume dans les rues"
(Baudelaire, Le crépuscule du soir)

 

La fille de joie, au coin d'la rue là-bas, fume.

 

9.
Donzelle s'évanouissant : j'aime bien ce mouvement de spirale qui effondre l'élan de la donzelle dans les syllabes précipitées du participe.

 

10.
"Partout elle se fraye un occulte chemin"
(Baudelaire, Le Crépuscule du soir)

 

Je la pressens, griffue dans la nuit, sphinge nosferatu, allongeant son ombre le long des murs, dans la clarté des feuillages.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 17 novembre 2013

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3 septembre 2013 2 03 /09 /septembre /2013 09:27

CE QUE REVELE L'OBSCUR
Notes sur le poème "Le Crépuscule du soir", de Baudelaire, pièce XCV du recueil Les Fleurs du mal.

 

1.
"LE CREPUSCULE DU SOIR

 

Au sujet du titre, quelle remarque pouvez-vous faire ?

 

Le titre "crépuscule du soir" induit qu'il y a un crépuscule du matin. Ce qui ne nous étonne point, qu'il y ait crépuscule au point du jour comme il y a crépuscule au point du soir. Et quand il y a point, il y a tricoti-tricota.

 

2.
"Voici le soir charmant, ami du criminel ;
Il vient comme un complice, à pas de loup ; le ciel
Se ferme lentement comme une grande alcôve,
Et l'homme impatient se change en bête fauve."
(vers 1-4)

 

a) Quelle atmosphère induit le premier vers ?

 

L'apparente opposition entre "soir charmant" et "ami du criminel" se réduit dans l'alliance poétique - comprenez créatrice d'atmosphère - de l'enchantement - puisque le soir est plein de charmes - et du mystère - puisque le soir est assez vivant pour être "ami du criminel" et même qu'au vers 2, "il vient comme un complice, à pas de loup".

 

b) Comment se ferme-t-il, le ciel ?

 

Comme une grande bouche, une immense bouche, une bouche infinie, celle de je ne sais dieu, qui se "ferme lentement" et quand elle sera fermée définitivement, ce sera la grande nuit éternelle de la fin des mondes.
Sinon, il "se ferme lentement comme une grande alcôve", mais l'humain n'y dort point, puisqu'il est "impatient", et un poil loup-garou sans doute, vu qu'il "se change en bête fauve."

 

3.
"Ô soir, aimable soir, désiré par celui
Dont les bras, sans mentir, peuvent dire : Aujourd'hui
Nous avons travaillé ! - C'est le soir qui soulage
Les esprits que dévore une douleur sauvage,
Le savant obstiné dont le front s'alourdit,
Et l'ouvrier courbé qui regagne son lit."
(vers 5-10)

 

a) Par qui est-il "désiré", le soir ?

 

Par la tête et les jambes.

 

b) Quel réseau de connotations pouvez-vous relever dans ces six vers ?

 

L'occupation fait désirer le soir, le rend "aimable". L'occupation par le travail (cf "aujourd'hui nous avons travaillé" ; "le savant obstiné" ; "l'ouvrier courbé") mais aussi celle de la douleur, qui obsède (cf "les esprits que dévore une douleur sauvage").

 

c) Analysez le rythme du vers 6.

 

Ce vers confirme le rythme ternaire initié au vers 5 et qui domine d'ailleurs ces six vers :
"Ô soir, / aimable soir, / désiré / par celui
Dont les bras, / sans mentir, / peuvent di- / -re : Aujourd'hui
Nous avons / travaillé ! / - C'est le soir / qui soulage
Les esprits / que dévo - / - re une douleur / sauvage,
Le savant / obstiné / dont le front / s'alourdit,
Et l'ouvri- / -er courbé / qui rega - / -gne son lit."

On peut y noter aussi, dans ce vers 6, l'assonance "i / ui" qui marque les accents 6, 9 et 12 de l'alexandrin ("sans mentir,/ peuvent di - / -re : Aujourd'hui"). Plainte de l'exténué peut-être. Ou alors, c'est le cri de celui qui pousse des "i", la nuit, dans les soupirs. Notons cette bizarrerie de faire parler des "bras". Des bras qui parlent, voilà qui épate. Peut faire penser aux tatouages qui sont, si l'on veut, jactances de peau. Mais tout de même, des bras qui causent, c'est bien curieux.

 

4.
"Cependant des démons malsains dans l'atmosphère
S'éveillent lourdement, comme des gens d'affaire,
Et cognent en volant les volets et l'auvent."
(vers 11-13)

 

En quoi les vers 11 à 13 sont-ils remarquables ?

 

Enigmatiques, ces trois vers, qui, dans le paysage familier des gens fatigués, introduit l'onirie de "démons malsains", le sifflement de leur forme indistincte ("cependant" ; "malsains dans l'atmosphère" ; "s'éveillent"), perturbent la régularité du rythme ternaire (cf l'épithète "malsains" qui empêche de marquer la césure après le mot "démons"), font penser à ces chauve-souris du spleen, cf Les Fleurs du mal, pièce LXXVIII :
"Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
S'en va battant les murs de son aile timide
Et se gognant la tête à des plafonds pourris"
(Spleen, vers 5-8)
Ce qui fait que si ces trois vers sont énigmatiques, il sont comiques aussi, évoquant la maladresse supposée des chauve-souris, lesquelles n'y voient goutte et sont comparées à des "qui s'éveillent lourdement gens d'affaire".

 

5.
"Et cognent en volant les volets et l'auvent.
A travers les lueurs que tourmente le vent"
(vers 13-14)

 

Analysez les sonorités des vers 13 et 14.

 

L'assonance "o" qui parcourt le vers 13, comme une sorte d'écho aux coups que font les "démons malsains" en se cognant partout, l'alternance des consonnes "l" et "v" ("volant" ; "volets" ; "l'auvent" ; "à travers les lueurs" ; "le vent"), l'assonance "an" ("en volant" ; "auvent" ; "tourmente le vent"), le léger écho de la consonne "t" ("travers", "tourmente"), la modulation "travers / lueurs" : autant de traits d'une scène de nuit, une rue sombre et pleine de vent, aux lumières flottantes, aux esprits flottants.

 

6.
"A travers les lueurs que tourmente le vent
La Prostitution s'allume dans les rues ;
Comme une fourmilière elle ouvre ses issues ;
Partout elle se fraye un occulte chemin,
Ainsi que l'ennemi qui tente un coup de main ;
Elle remue au sein de la cité de fange
Comme un ver qui dérobe à l'Homme ce qu'il mange."
(vers 14 à 20)

 

Quoi donc qui "s'allume dans les rues" ?

 

C'est "La Prostitution". Une entité fourmillante, la "Prostitution", hyperactive, souterraine, tentaculaire (cf "elle ouvre ses issues" et  puis "elle remue"), sournoise et secrète (cf "elle se fraye un occulte chemin"), adverse et inhumaine, animale (cf "fourmilière", un "ennemi qui tente un coup de main" ; "un ver qui dérobe à l'Homme ce qu'il mange"), et glauque qui grouille "au sein de la cité de fange". Le mot sans doute désigne le commerce du sexe, mais c'est aussi la matière même de la nuit humaine qui est ainsi révélée.

 

7.
"On entend çà et là les cuisines siffler,
Les théâtres glapir, les orchestres ronfler ;
Les tables d'hôte, dont le jeu fait les délices,
S'emplissent de catins et d'escrocs, leurs complices,
Et les voleurs qui n'ont ni trêve ni merci,
Vont bientôt commencer leur travail, eux aussi,
Et forcer doucement les portes et les caisses
Pour vivre quelques jours et vêtir leurs maîtresses."
(vers 21-28)

 

a) En quoi le rythme des vers 21 et 22 est-il intéressant ?

 

Rythme ternaire. Les finales des mots "cuisines", "théâtres", "orchestres" soulignent l'attaque des infinitifs "siffler", "glapir", ronfler". Cette houle régulière suggère les modulations des sons dans l'air, modulations que traduisent aussi assonances et redoublements de sons : "On / ronfler" ; "entend" ; "çà et là ; théâtres glapir ; " ; "cuisines siffler / glapir". Jeu d'échos traversé par la neutralité de l'article "les" et ponctué par la rime "siffler / ronfler".

 

b) De quoi "s'emplissent les tables d'hôte" ?

 

Les tables d'hôte s'emplissent de la rime "délices / s'emplissent / complices". Le vers se fait ainsi susurrant, traînant et allusif.

 

c) Pour quelle raison, selon le narrateur baudelairien, les voleurs volent-ils ?

 

Je dis narrateur baudelairien, et non Baudelaire : la poésie est une fiction à laquelle le poète prend part et où la pensée ne peut, par définition, qu'être subjective. Ici, les raisons qu'il donne aux actions des voleurs vont de soi puisqu'il s'agit de vivre et vêtir. Du reste, le vol est un "travail" lui aussi, un travail qui demande assez de maîtrise pour "forcer doucement les portes et les caisses".

 

8.
"Recueille-toi, mon âme, en ce grave moment,
Et ferme ton oreille à ce rugissement."
(vers 29-30)

 

Que veut-il qu'elle fasse, son âme ?

 

Qu'elle se "recueille" - quel drôle de verbe français, qui suppose que l'on se reprenne soi-même, que l'on se rentre en dedans, que l'on se ferme son oreille, que l'on se coquillage - d'autant qu'en l'occurence, tout se condense dans l'intensité de la métaphore. Le paysage nocturne rugit et ce rugissement répond à la métamorphose de l'homme du vers 4, l'impatient qui se change en bête fauve.

 

9.
"C'est l'heure où les douleurs des malades s'aigrissent !
La sombre Nuit les prend à la gorge ; ils finissent
Leur destinée et vont vers le gouffre commun ;
L'hôpital se remplit de leurs soupirs. - Plus d'un
Ne viendra plus chercher la soupe parfumée,
Au coin du feu, le soir, auprès d'une âme aimée."
(vers 31 à 36)

 

a) Que permet au narrateur la décision qu'il prend de se recueillir ?

 

En fermant l'oreille au rugissement de la bête fauve qui tracasse la caboche de l'humain "impatient", ainsi qu'aux grondements, glapissements et sifflements de l'humaine bestialité, qui semble l'appeler à sortir de chez lui pour se mêler à la Prostitution qui court les rues, le narrateur n'en médite pas moins pour autant, mais ce sont maintenant les mourants qui occupent sa pensée. La Nuit dès lors devient l'étrangleuse des malades (cf "La sombre Nuit les prend à la gorge"), celle qui aigrit les douleurs et remplit "le gouffre commun".

 

b) En quoi l'expression "gouffre commun" est-elle particulièrement signifiante ?

 

En rappelant que la mort est le lot de tous, l'expression rend plus mélancolique encore la lucidité du discours, puisque le narrateur signifie ainsi qu'il est, lui aussi, voué au gouffre.

 

c) Quel est le tableau évoqué par les vers 35 et 36 ?

 

Les vers 35 et 36 décrivent l'univers réconfortant du foyer, celui que l'on retrouve, en filigrane, sur le ton du regret, dans la pièce C des Fleurs du mal :
"Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs
Et quand Octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
Son vent mélancolique à l'entour de leurs marbres,
Certes, ils doivent trouver les vivants bien ingrats,
A dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps,
Tandis que, dévorés de noires songeries,
Sans compagnon de lit, sans bonnes causeries,
Vieux squelettes gelés travaillés par le ver,
Ils sentent s'égoutter les neiges de l'hiver"
(vers 4 à 14)

 

10.
"Encore la plupart n'ont-ils jamais connu
La douceur du foyer et n'ont jamais vécu !"
(vers 37-38)

 

Quel effet produisent les deux derniers vers du poème ?

 

Ces deux derniers vers expriment la pitié du narrateur pour les déclassés, les exclus, les hors-la-vie, les spectres vivants des rues, ceux qui vivent sans vivre, les stagnants, ce que le marxisme appelle le "lumpenproletariat" (le "prolétariat en haillons"), ceux qui sont à la marge de la marge. Ils achèvent ainsi une méditation sur la mélancolie du soir qui tombe sur la ville, mais aussi sur ce gouffre des âmes que, paradoxalement, cette obscurité éclaire.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 3 septembre 2013.

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29 août 2013 4 29 /08 /août /2013 02:40

L'HABITANT DU TOMBEAU
Notes sur le sonnet "Le mauvais moine", de Charles Baudelaire. Citations entre guillemets.

 

1.
"LE MAUVAIS MOINE

 

Les cloîtres anciens sur leurs grandes murailles
Etalaient en tableaux la sainte Vérité,
Dont l'effet, réchauffant les pieuses entrailles,
Tempérait la froideur de leur austérité."

 

a) Qu'est-ce que "les cloîtres anciens sur leurs grandes murailles étalaient" ?

 

"La sainte Vérité", comme quoi la vérité se voit comme le Christ sur la Croix.

 

b) Quel effet le narrateur attribue-t-il à cet étalage de la sainte Vérité ?

 

Cette monstration de la Vérité a pour effet de réchauffer les pieuses entrailles. Ce n'est donc pas la Vérité en elle-même qui réchauffe, mais le spectacle de la Vérité. Les moines, ceux dont il était nécessaire de tempérer la froideur de leur austérité, exact contraire d'un plus attendu tempérer la chaleur de leurs embrasements - c'est dire qu'ils ne rigolaient pas, les frères - sont ici représentés par le mot "entrailles", lequel renvoie à une sorte d'intériorité consommatrice de piété, comme si, aussi bien que l'âme, le corps lui était voué, à cette sacro-sainte Vérité.

 

2.
"En ces temps où du Christ florissaient les semailles,
Plus d'un illustre moine, aujourd'hui peu cité,
Prenant pour atelier le champ des funérailles,
Glorifiait la Mort avec simplicité."

 

Comment, dans le second quatrain, sont présentés les moines des premiers temps du christianisme ?

 

Bien que "peu cités", et donc ignorés, les premiers moines sont appelés "illustres", puis dans un "atelier", en bons artisans de la foi, on suppose, surtout que cet atelier, c'est "le champ des funérailles" - autant dire qu'on plante des morts - et puis simples, simples, mais simples, ils "glorifiaient la Mort" comme tu achètes des pêches au marché, dis !

 

3.
"- Mon âme est un tombeau que, mauvais cénobite,
Depuis l'éternité je parcours et j'habite ;
Rien n'embellit les murs de ce cloître odieux."

 

En quoi est-elle étrange, la façon dont le narrateur se présente dans le premier tercet ?

 

Le narrateur se présente comme étant l'habitant de son âme, laquelle est "un tombeau" (dit-il). Donc, le narrateur habite le tombeau de lui-même. C'est un mort qui marche, qui se parcourt, se hante, et finit par ne plus se sentir, qui ne vit plus dans le temps des vivants, mais dans la durée, laquelle est bien ennuyeuse, j'imagine, cependant que le temps est bien court, c'est vous dire qu'il nous l'a mis profond dans l'os, Chronos.

 

4.
"Ô moine fainéant ! quand saurai-je donc faire
Du spectacle vivant de ma triste misère
Le travail de mes mains et l'amour de mes yeux ?"

 

Quelle est la question que se pose le narrateur ?

 

Après s'être traité lui-même de "moine fainéant", c'est-à-dire de tout seul qui n'en fiche pas une, le narrateur se demande comment faire de ce qu'il est - une "triste misère" - un "spectacle vivant", celui de sa propre vérité humaine, dont il serait l'acteur et le promoteur, au lieu d'en être le spectateur passif et dégoûté. On peut noter que ce dégoût est exprimé tout au long du sonnet par l'emploi de rimes peu agréables à l'oreille ("murailles", "entrailles", "semailles", "funérailles", "cénobite", "habite", "faire", "misère") et d'un lexique dépréciatif qui en devient quasi ironique, autodérisoire, plaisant presque (évidemment, le "cénobite", c'est-à-dire le moine des premiers temps, il sonne cocasse, le cénobite, façon crustacé bizarre) .

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 29 août 2013

 

 

 

 

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24 août 2013 6 24 /08 /août /2013 13:11

ET LES DIEUX LA LAISSERENT CHOIR
Notes sur le sonnet La Muse vénale, de Charles Baudelaire. Citations entre guillemets.

 

1.
"O muse de mon coeur, amante des palais,
Auras-tu, quand Janvier lâchera ses Borées,
Durant les noirs ennuis des neigeuses soirées,
Un tison pour chauffer tes deux pieds violets ?"
(La Muse vénale, premier quatrain)

 

Quelle figure de style vous semble dominer cette strophe ?

 

Baudelaire personnifie. Il humanise les phénomènes. Janvier n'est plus seulement un mois, mais une entité qui a le pouvoir de commander aux divinités du vent (les "Borées"). C'est que l'hiver nous bourre de borées, nous borde de neige, nous fout le froid partout. La forme "lâchera" est ici particulièrement expressive : Janvier lâche ses Borées comme on lâche les chiens.
On peut noter l'absence de majuscule à "muse". C'est qu'elle n'est plus la divine inspiratrice, mais une compagne de pauvreté ; d'ailleurs, elle a "deux pieds", comme tout le monde, ou presque. C'est par ironie que le narrateur l'appelle ici "amante des palais", celle qui inspira ses plus beaux vers à Racine, mais aussi celle que le poète a rêvé d'installer dans une belle demeure, avec cézigue tiens, dans le "luxe, le calme et la volupté". Au lieu de cela, la belle a des "noirs ennuis", pendant qu'il neige, et ne sait même pas si elle pourra se chauffer cet hiver.

 

2.
"Ranimeras-tu tes épaules marbrées
Aux nocturnes rayons qui percent les volets ?
Sentant ta bourse à sec autant que ton palais,
Récolteras-tu l'or des voûtes azurées ?"
(La Muse vénale, second quatrain)

 

Comment est-elle présentée, la "muse", dans ce second quatrain ?

 

Je ne sais pas si vous connaissez l'excellente et télévisuelle série Kaamelott, d'Alexandre Astier, mais si vous la connaissez, vous savez qu'à un moment, lassés des échecs et des fantaisies de la cour d'Arthur, les Dieux lâchent La Dame du Lac, la désenchantent, la renvoient à son humaine condition. La Muse spirituelle soudain connaît maintenant la faim, la soif, le froid. Réfugiée à Kaamelott, elle fait l'expérience amère de la fragilité de l'existence et de ses contraintes. Elle l'a dans l'os, la Dame du Lac. Et bien, la muse baudelairienne, l'ici vénale, elle est pareille. Si elle est encore de marbre (les divinités sont insensibles, sinon c'est qu'elles sont un poil trop faibles, et elles sont aussi statufiées - en tout cas jadis, car maintenant, je ne sais pas trop - taillées dans le, et dans le bronze, et la posture avantageuse et la belle jambe), ses marbrures peuvent être aussi causées par le froid ; c'est qu'elle se gèle peut-être, la muse. Ah on est bien loin des muses avec lesquelles le Joachim du Bellay se voyait faire des galipettes dans les prés la nuit, l'été, la poésie ! Si elle est toujours nocturne, elle ne peut guère qu'attendre les pleines lunes et leurs "rayons qui percent les volets". Est-elle encore du palais, la muse ? Certes, le mot est employé. Mais il n'a rien pour le flatter, le délicat de Mademoiselle. Elle a faim, elle a soif, et la "bourse à sec". L'or ? Il est aux étoiles, l'or, dans les "voûtes azurées", là-haut, là-bas, dans ton ancienne maison, du temps où tu fus divine, t'as qu'à croire.

 

3.
"Il te faut, pour gagner ton pain de chaque soir,
Comme un enfant de choeur, jouer de l'encensoir,
Chanter des Te Deum auxquels tu ne crois guère,"
(La Muse vénale, premier tercet)

 

Que nous apprend ce tercet sur le véritable statut de cette muse ?

 

La muse, par définition, elle tombe des nues peuplées de dieux divers et variés, aussi divers et variés que peut l'être la poésie. Elle est polythéiste. Et la voilà soumise au dogme du dieu unique, menée au Te Deum, vaporisée dans "l'encensoir". Est-ce elle qui chante ? Oui, si l'on admet que le narrateur, en parlant de son inspiratrice, parle de lui-même. Ma muse, c'est moi, nous dit-il en substance, et qu'en dépit de ses opinions, il est bien obligé de louer ce en quoi il ne croit guère. Il est vrai que l'on imagine mal l'auteur des Litanies de Satan et autres gothiques agaceries se mettre à bondieuser à la Hugo. Est-ce crédible ? Evidemment que oui : les rayons pieux des librairies sont chargés de livres très dévots écrits par des mécréants fumeurs de pipe et buveurs de bière (1). Et je ne serais pas plus étonné que ça d'apprendre que tel saint homme, que telle conscience éclairée par une spiritualité profonde, composât, dans ses moments d'égarement sans doute, des odes pornographiques, de licencieux romans, de roses rosses romances , sous pseudonyme, évidemment.

 

4.
"Ou, saltimbanque à jeun, étaler tes appas
Et ton rire trempé de pleurs qu'on ne voit pas,
Pour faire épanouir la rate du vulgaire."
(La Muse vénale, second tercet)

 

Comment dans ce tercet se confirme la vénalité de la muse ?

 

Il n'y a pas que le bon dieu bien sûr, il peut aussi faire le pitre, le scribe nécessiteux (cf "pour faire épanouir la rate du vulgaire") ou faire la pute (cf "étaler tes appas") (2), et, quoi qu'il en soit, il doit faire bonne figure. Remarquez que le pleurnichisme a aussi ses clients. Dans notre début de XXIème siècle, où l'on publie à tour de bras des tas de livres qui ne se vendent pas, il y en a pour tous les mauvais goûts. Ce qui a l'air de marcher, c'est la sentimentalerie déguisée en aiguisée chronique contemporaine, les tourments du couple, cause qu'il y a toujours des gogos pour confondre littérature et psycho-mag. Il y a quelques jours encore, j'ai entendu un pauvre diable d'auteur étaler sur France Culture d'anémiques évidences sur les femmes qui nous quittent, ou que l'on quitte (je sais plus trop), que c'en est à se demander si les femmes et les hommes sont vraiment faits pour vivre ensemble, et qu'appelle-t-on vivre ensemble, et ne vaudrait-il pas mieux partager son existence avec :
- un pingouin,
- un tamanoir,
- une banque suisse,
- la discographie complète de Luc Ferry, accompagnée par les petits chanteurs à la croix de, et subventionnée par l'Association des Porteurs de Dentier Anonymes,
- une banque luxembourgeoise, ou monégasque (je ne suis pas difficile),
- la discographie complète de Jean-Luc Mélenchon, illustration sonore des Béruriers Noirs, et épingle à nourrice collector (dans sa version "tirage limité"),
- un paquet de promesses électorales (avec ruban rose, ou bleu, pour faire rêver selon les opinions),
- un tableau historique, car daté de 1994, dans le style "réalisme soviétique" représentant un Inpecteur d'Académie vantant les mérites du Travail en Séquences devant une assemblée jeune et dynamique d'Adhérents à la MGEN,
- un autre tableau, tout aussi historique (car daté de 2008) et de la même croûte, représentant un Inspecteur d'Académie dénonçant publiquement (c'est-à-dire devant une assemblée jeune et dynamique d'adhérents à la MGEN) les dérives technicistes du travail en séquences, dérives dues à une bande de rédacteurs de manuels auxquels l'Inspecteur a eu tort de faire confiance (Ah les social-traîtres !),
-  un faux vrai mensonge de Bernard Tapie,
- un vrai faux mensonge de Cahuzac,
- les "Oeuvres complètes" de Philippe Mérieu préfacées par Placid et Muzo,
- un abonnement à Ploutocrate Magazine,
- un étang sans eau avec son canard auquel manque l'oiseau,
- un redis-meuh-le-que-tu-m'aimeuh (avec ses cornes),
- les Collected Papers de Dominique Strauss-Kahn (Conférences, articles, notes de blanchisserie) préfacés par Ulla Turlute,
- un manuscrit du même Dominique Strauss-Kahn intitulé "Comment que j'm'a planté !" (authenticité non confirmée cependant),
- un échantillon de discernement communiste (fourni avec loupe, et même, dans certains cas, télescope),
- une hache avec toutes ses mains tendues tranchées,
- un plat qui se mange froid,
- un disque d'Elvis, un disque de Félix, un autre de Robert,
- les 60 ans de dessins de Siné (avec tout son talent),
- un élu local (avec ses menottes),
- un industriel local (avec ses pots-de-vin),
- une tranche de droit naturel,
- une paire de mains lavées (avec son Ponce Pilate),
- un vélo volé à Pérec,
- une langue verte quand on voit rouge,
- un scrongue (3) et tu aurais quand même pu faire la vaisselle pendant que j'étais au (là vous pouvez mettre n'importe quel cours de technique de bien-être asiatico-gymnaste, à moins que vous préfériez une réunion de militants indignés, ou la convivialité d'un club de n'importe quoi), bon, bref, un pauvre diable d'auteur donc, évoquant sur un ton sérieux les avanies du couple moderne, que j'en eus envie d'éventrer la radio, d'en extraire le petit bonhomme et de lui souffler dans les bronches - "Bouffe-donc un boeuf, bougre d'âne, et dévore un champ de patates, et engloutis quelques barriques de bières, puis va voir les filles, et après tu verras si ça t'intéressera encore les états d'âme de Totor et Titine !". C'est ce que j'avais envie de lui dire, moi, à l'écrivain. Ceci pour dire que le narrateur de La Muse vénale, il le voit pas très beau, le public, bigot, grossier, rate qui s'dilate, pas belles sonorités (cf l'assonance "guère" / "faire / vulgaire"). Pouah.

 

Notes :
(1) Consultez l'excellent blog d'Orlando de Rudder, vous serez édifié !
(2) : Lecteur lycéen, toi qui me lis, au moment de la rédaction de ta copie, je te conseille de préférer au vulgaire "faire la pute" le plus élégant "mimer la péripatéticienne". Sinon, il te reste le banal "faire le trottoir". Je ne te conseille pas non plus "pratiquer l'art de l'arpente des boulevards en bas nylon",  beaucoup trop littéraire - même si la tournure te ferait gagner une ligne - que ton professeur, il en écrira dans la marge, cf "Houzeau, Oeuvres complètes". Ou alors, tu me cites. J'en serais flatté.
(3) : Cependant, attention, vivre avec un scrongue suppose l'acquisition d'un gong, et la maîtrise de la langue gorgongne. Là-dessus, vous pouvez vous pencher sur certains écrits de Patrice Houzeau, qui est un auteur crypto-chose, évidemment, que sous la peau de ses écrits s'agite le ténébreux monde de la Gorgongne, qu'il ne peut expliciter sous peine de voir les yeux de ses lecteurs s'enfuir de leurs orbites en courant sur les cils de leurs mille-pattes. (4)
(4) - Monsieur Houzeau, où donc allez-vous chercher tout ça ?
- Dans le puits de mon génie où que j'suis tombé en regardant si la lune avait des nichons.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 24 août 2013

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21 août 2013 3 21 /08 /août /2013 14:20

NOTES SUR ELEVATION DE BAUDELAIRE
Notes sur le poème Elévation de Baudelaire. Citations entre guillemets.

 

1.
"Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,

Par-delà le soleil, par-delà les éthers,
Par-delà les confins des sphères étoilées,"

 

a) Analysez le rythme de ce quatrain.

 

Le rythme ternaire est omniprésent et ne se rompt que dans le dernier hémistiche ("des sphé-/-res étoilées"). Cette rythmique affirmée souligne la régularité de l'élévation du point de vue et met en évidence les répétitions des mots-outils ("au-dessus" ; "par-delà").

 

b) Analysez le lexique employé.

 

Gradation dans l'énumération : les deux premiers vers sont terrestres et concrets ("étangs", "vallées", "montagnes", "bois") puis évocateurs du ciel et de la mer (cf les pluriels "nuages" et "mers"). Les deux vers suivants évoquent l'espace et se font plus abstraits : "soleil", "éthers", "confins", "sphères étoilées". On passe ainsi du "au-dessus", qui délimite, au "par-delà", qui ouvre.

 

2.
"Mon esprit, tu te meus avec agilité,
Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,
Tu sillonnes gaiement l'immensité profonde
Avec une indicible et mâle volupté."

 

a) A qui s'adresse le narrateur ?

 

Le narrateur s'adresse à son "esprit". A l'époque, le poète n'était point mort, puisque sinon, il n'aurait pu s'adresser à son "esprit", car seuls les vivants s'adressent aux esprits. Notons d'ailleurs qu'il est rare que les esprits, ceux du pas d'ici et de l'au-delà donc, s'adressent aux vivants. En tout cas, ce n'est pas prouvé. Le narrateur s'adresse à son "esprit" car il le sent tout planant, son esprit, comme s'il s'évadait de sa carcasse, comme si sa caboche, au narrateur, s'affranchissait de la lourdeur du corps, se libérait de l'étant pour plonger dans l'être.

 

b) Ce à quoi il s'adresse, à quoi le compare-t-il ?

 

Il s'agit bien de plonger dans l'être puisque le narrateur se compare à un "bon nageur" (ce qui vaut mieux sinon on risque de se noyer), un nageur pâmé même. C'est que l'esprit est dans l'espace virtuel de l'élévation comme un nageur sachant nager dans l'onde.

 

c) Ce à quoi il s'adresse, que fait-il dans l'onde ?

 

Il sillonne gaiement, l'esprit, comme un joyeux laboureur. Il file dans "l'immensité profonde" ; il trace dans la planerie ; il circule dans "l'indicible", que c'en est "volupté", et même "mâle volupté". C'est qu'il est viril dans la volupté, le narrateur.

 

3.
"Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides ;
Va te purifier dans l'air supérieur,
Et bois, comme une pure et divine liqueur,
Le feu clair qui remplit les espaces limpides."

 

a) Que conseille-t-il à son esprit de faire ?

 

Il lui conseille de s'envoler "bien loin de ces miasmes morbides". C'est vrai que le monde est une succession infinie de décompositions et de recompositions. Tout se recycle donc sans cesse que c'en est une vraie dégoûtation quand on y pense. Mais c'est comme ça, et comme y a pas d'avance, il faut faire avec ce qu'on a, et swingue le riz et skate le rat. Mais le narrateur baudelairien, lui, dans l'espace du poème, il lui flanque des ailes, à son esprit, et le fait voler loin de tout ça.

 

b) Où l'envoie-t-il voler, son esprit ?

 

Il l'envoie voler dans "l'air supérieur" (qui s'oppose donc à celui des "miasmes morbides"). Là, il pourra "se purifier" puisqu'il sera dans le "pur", dans le "feu clair qui remplit les espaces limpides." Autrement dit, le poète postule l'existence d'un temps hors du temps, d'un espace hors de l'espace, d'une énergie hors de l'énergie dans laquelle l'esprit se régénère, un lieu en-soi de l'être. Et puis, en plus, c'est beau, avec son rythme ternaire : "Le feu clair / qui remplit / les espa - / - ces limpides".

 

4.
"Derrière les ennuis et les vastes chagrins
Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse,
Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse
S'élancer vers les champs lumineux et sereins ;"

 

Sur quelle opposition est basé ce quatrain ?

 

Ce quatrain est basé sur l'opposition entre "le poids", la lourdeur d'une "existence brumeuse" (c'est-à-dire où rien n'est clair, et qui est donc absurde, imprévisible) et la légéreté que l'on suppose à "l'aile vigoureuse", qui quitte la brume, les "chagrins et les charges" (notez la lourdeur volontaire de la répétition de la syllabe "cha" qui, dans le dernier vers, s'ouvre en "champs") et s'affranchit de la pesanteur pour un espace fertile, visible (cf "lumineux") et écarté des périls qui pourraient surgir façon vaisseau fantôme à spectres féroces de féroces pirates, que mène avec lui le fog de John Carpenter.

 

5.
"Celui dont les pensers, comme des alouettes,
Vers les cieux le matin prennent un libre essor,
- Qui plane sur la vie, et comprend sans effort
Le langage des fleurs et des choses muettes !"

 

A quoi Baudelaire compare-t-il "les pensers" ?

 

Les "pensers" (la forme vieillie en "e-r-s" affranchit le mot de son actualité sociale, rappelle que la pensée est un exercice qui a son propre temps, un acte en lui-même et non une production réflexe induite par les nécessités de l'humain civilisé), les "pensers" sont comparés à des "alouettes" (sortiraient-ils d'une caboche plus nid d'oiseau que forge à réflexion ?) ; c'est qu'elles s'envolent, les alouettes, et les pensées aussi donc - puisque que tout le poème est traversé d'une aile libre (cf "libre essor"), et planante, c'est-à-dire bien au-dessus, largement au-dessus, radicalement au-dessus de ce monde lourd et brumeux, et libérées qu'elles sont ainsi les pensées, de la malédiction de l'effort (cf "sans effort"), et surtout dotées de la faculté de saisir la langue dégagée de son utilité sociale, la langue que l'on n'entend pas, que l'on ne veut pas entendre, la langue inutile et superbe des "fleurs et des choses muettes", langue qui, évidemment, n'existe pas en elle-même, mais qui est une pure production de la façon dont nous pouvons user poétiquement du langage, façon qui nous a permis de voir en l'autre non plus seulement une conscience étrangère, plus ou moins ouvertement hostile, mais un être complexe envers lequel on peut déployer un large éventail de sentiments et de jugements. Et c'est d'ailleurs là que ça se complique.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 21 août 2013

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18 août 2013 7 18 /08 /août /2013 06:36

AVEC UNE SALUTAIRE MAUVAISE FOI

 

"Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre"
(Baudelaire, La Beauté)

 

1) L'être quelque chose est une affirmation de l'être. Encore ne peut-il s'affirmer que s'il y a quelqu'un pour confirmer ou infirmer. L'être quelque chose est donc une affirmation de l'en-soi ("Je suis belle en dépit de vous") et une confirmation du pour-soi ("Je suis belle car je vois dans vos yeux que je suis belle").

 

2) L'affirmation de l'être quelque chose tend à la transcendance. Il se trouve que dans ce vers de Baudelaire, il s'agit de la beauté. Mais, la langue n'interdit pas les énoncés suivants :
- "Je suis bête, ô génies ! comme un paquet de nouilles."
- "Je suis gong et ouate et chant neigeux"(Henri Michaux, Je suis gong, "La nuit remue", La bibliothèque Gallimard n°90, p.230).
Autrement dit, l'être quelque chose est une affirmation dans un temps donné qui transcende ce temps donné pour accéder au statut de présent de vérité générale. Ainsi, je n'aime pas Machin parce qu'il est méchant. Comment sais-je qu'il est méchant ? Parce qu'il a déjà fait preuve de méchanceté. L'énoncé : "Machin est méchant" affirme une transcendance. Bien sûr, je puis bien admettre que l'être quelque chose est complexe : "Machin est méchant mais il a du talent". C'est la plus ou moins grande reconnaissance de la complexité de l'être quelque chose qui tisse nos relations aux autres. Ainsi, je dirai dans un cas :
- "Machine est méchante mais elle a du talent."
ou :
- "Machine a du talent, mais qu'est-ce qu'elle est méchante !"
S'il se trouve que Machine qui est méchante mais qui a du talent a aussi de beaux yeux bleus et la mignonne frimousse, il y a de fortes chances que l'on passe sur sa méchanceté pour reconnaître son talent, et même des fois le subir (si si!).

 

3) L'être quelque chose est une opposition. En ce qu'il tend à la transcendance, l'être quelque chose s'oppose aux autres tentatives transcendantales. Ainsi, la Beauté en soi s'oppose à la bête mortalité des étants éphémères, qui s'affirment pourtant comme autant d'en soi transcendantaux ("Je suis bête", "Je suis gong", "Je suis méchant", "Je suis talentueux", "Je suis complexe"). Et nous savons bien que la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu'elle a, que la beauté ne se mange pas en salade, et que tout passe, tout casse, tout lasse. Il n'en reste pas moins qu'il y a la beauté de Greta Garbo. Cependant, est-ce que Greta Garbo est belle pour un Indien d'Amazonie ? De même, Napoléon est-il un tyran ou un libérateur ? Un massacreur ou un bâtisseur ? On voit bien qu'appliquées aux humains, les transcendances de la Beauté et du Bien sont pour le moins problématiques.

 

4) L'affirmation de l'être quelque chose induit la comparaison. L'être quelque chose est un comme si ("Je suis belle comme un rêve de pierre" ; "Je suis bête comme un paquet de nouilles parce qu'il n'y a rien d'intelligent à attendre d'un étant qui n'est que ce qu'il est" ; "Je suis belle parce qu'il y a des laides"). Ainsi, si au pays des aveugles, les borgnes sont rois, c'est que le fait d'être d'une intelligence moyenne est une transcendance plus appréciable que celle qui tend à ne rien comprendre à rien.

 

5) Il n'y a de transcendance positive (le Bien, le Beau, le Vrai) que parce qu'il y a des transcendances négatives (le Mal, le Laid, le Faux). Un monde où tout serait bien, beau et vrai, ne se reconnaîtrait pas lui-même. Aussi ne pouvons-nous être que de mauvaise foi : nous faisons comme si un monde où tout serait bien, beau et vrai, était possible. Nous avons même rêvé à une "Fin de l'Histoire", laquelle a servi de prétexte à bien des saloperies. Je gage, moi, que la transcendance la plus humaine qui soit est celle de la mauvaise foi. En cela, Baudelaire a fait preuve de génie : le vers "Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre" signifie littéralement : la beauté existe en soi parce que les pierres peuvent rêver. Or, les pierres ne peuvent pas rêver (eh non !). C'est égal, nous dit Baudelaire, faisons comme si. Et c'est ainsi que nous faisons, comme si, comme si Dieu existait, comme si Machin avait du talent (mais il est surtout teigneux et comme personne n'ose l'affronter, alors...), comme s'il y avait un sens à tout ça, comme si nous n'étions pas que du comme si, c'est ainsi que nous faisons, à chaque instant, avec une salutaire et inébranlable mauvaise foi.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 18 août 2013

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