Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
20 mai 2009 3 20 /05 /mai /2009 13:02

 

A PROPOS DU SPLEEN BAUDELAIRIEN
ET AU SUJET D'AUTRES PETITS RIENS

Cet article date du 20 juillet 2006. C'est pour ça qui y est évoqué le villepinisme de la tentative du Contrat Première Embauche et les grèves que cette tentative engendra dans les Lycées. Nous ne sommes plus en plein villepinisme ; c'est maintenant le sarkozysme qui énerve, et surtout les Universités dont, pour certaines d'entre elles, on ne sait pas à l'heure où j'écris ces lignes (le mercredi 19 mai 2009) si elles sont en grève ou pas. J'ai entendu tout à l'heure, aux informations de France Culture que beaucoup d'étudiants de type "bloqueurs" (ah les boeufs !) commençaient un peu à se sentir "floués" par leurs chers professeurs qui les ont menés à la grève et qui, à quelques poignées de jours des examens, reprennent leurs cours, vu que les examens, il faut quand même les faire passer, sinon là, on risque quand même de gros problèmes, et puis, flûte ! on a quand même prévu de passer les vacances en Grèce (ou en Turquie), alors, soyons sérieux, on passe les examens, tout le monde part en vacances et l'on verra à la rentrée !

A PROPOS DU SPLEEN BAUDELAIRIEN
Notes sur les deux premières strophes de Spleen (« Quand le ciel bas et lourd...)

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle (1)
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,  (3)
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle (4)
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ; (5)

Quand la terre est changée en un cachot humide, (6)
Où l’Espérance, comme une chauve-souris, (7)
S’en va battant les murs de son aile timide (8)
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ; (10)
    (Charles Baudelaire, Spleen ,"Quand le ciel bas et lourd...", Les Fleurs du Mal, LXXVIII., vers 1 à 8).

NOTES DU 20 JUILLET 2006 
(1)    J’ai souvent pensé que la veille, Charles s’était certainement sévèrement boissonné et que c’est à l’excès de flacon-pourvu-qu’on-ait-l’ivresse que l’on doit cet alexandrin où l’accent porté sur la septième syllabe « pèse » effectivement de tout son poids de gueule de bois. (2)

(2)
   
A propos du bois dont on fait des flûtes, j’ai entendu ce matin Gonzague Saint-Bris évoquer dans une chronique les conjurés de l’attentat du 20 juillet 1944 contre Adolf Hitler en ces termes : « C’est une chevauchée des Walkyries menée par des chevaliers teutoniques ». On ne saurait être plus prétentieux et plus obscène. Ou plus sot. Il faudrait peut-être, chers responsables de France Info, confier vos chroniques historiques à de véritables historiens et vos billets littéraires à de véritables écrivains !

(3)
   
C’est qu’est-ce que j’disais ! Il a mal aux cheveux, le Baudelaire !

(4)
   
On notera l’effort de volonté du narrateur qui a pris sur lui d’ouvrir ses volets et en profite pour faire cette observation : l’horizon est circulaire et donc la terre est courbe.

(5)
   
Il est possible que dans la vie dissolue que l’auteur des Fleurs du Mal a souvent menée, il ait peut-être oublié de remonter sa montre et qu’en conséquence, il fasse encore nuit lorsque le poète, planant encore dans les lourdeurs de l’alcool, se soit aventuré à ouvrir ses fenêtres.
Il est possible aussi qu’il ait gardé les yeux fermés.

(6)
   
Le poète se sent prisonnier de la terre entière comparée à un « cachot humide ». Ah la la !

(7)
   
L’originalité de la comparaison ne saurait nous leurrer : il s’agit là évidemment des premiers signes du delirium tremens.
En tout cas, comme le versificateur, l’Espérance en a un sacré coup dans l’aile !

(8)
   
Imaginez la scène : l’ombre d’une chauve-souris maladroite et affolée sur les murs de la casa Baudelaire. En soi, rien d’exceptionnel et pourtant, Charles vous en fait du gothique ténébreux à souhait ! Grand succès chez les Lycéens tourmentés, surtout chez ceux qui savent lire. (9)

(9)
   
Cette année les chiffres de réussite au baccalauréat ont été une nouvelle fois excellents (+ de 80% de reçus, Allelouia, mes frères et Gloire à Sainte IUFM !)
Sachant que, pour cause de villepinisme galopant, à partir du mois de mars, on peut dire que, dans de nombreux établissements, les cours furent donnés à la carte (et je ne parle pas des émeutes de novembre), je suggère au gouvernement de faire des économies en raccourcissant l’année scolaire. A mon avis, à partir de février-mars, il ne serait sans doute plus nécessaire de maintenir l’ensemble des cours. Quelques dizaines d'heures de lectures de polycopiés dans les matières à fort coefficient seraient utiles. Pour les matières-alibis culturels (pipeau, pinceau, sport à gogo, et autres projets et travaux rigolos), les professeurs seront invités à pratiquer leur art chez eux ou à soutenir les équipes administratives dans leur dur labeur de distribution de coups de tampons, de timbrage, de surveillance des chenapans et de remplissage des nécessaires inutilités administratives. Corne d’Aurochs ne pourrait en être que satisfait : il n’aurait alors que l’embarras du choix pour faire corriger l’orthographe défaillante de ses rapports.

(10)
                     
Il n’y a donc pas que pour l’homme mélancolique que le « le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle », la chauve-souris elle aussi doit se sentir « l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis » en se cabossant le carafon au plafond pitoyable de l’individu Baudelaire Charles ! D’ailleurs, elle n’arrête pas de râler comme le prouvent les nombreuses occurrences de l’assonance [i] : « esprit gémissant, ennuis, horizon, triste, nuits », elle râle même en rythme, - au rythme même de ses heurts domestiques – puisqu’on trouve à la rime : « humide, chauve-souris, timide, pourris ».

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 20 juillet 2006

Partager cet article
Repost0

commentaires

Recherche