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31 mai 2009 7 31 /05 /mai /2009 07:22

D’UN ŒIL AUTRE

On a pu rêver d’un « théâtre de la cruauté ». Il y a aussi un cinoche de la pétoche. C’est ce qui m’a frappé dans la vision récente de trois films éprouvants : Irréversible (Gaspard Noé, France, 2002), Calvaire (Fabrice Du Welz, France, Belgique, Luxembourg, 2005), « Ils » (David Moreau, Xavier Pallud, France, 2006).

La caméra est un œil autre. Le cinéma de la mise à l’épreuve tend à la vision froide d’une civilisation en proie à la barbarie. Ou à une vision sans concession. Ou distanciée. Ou indifférente.

Le cinéma de la froide mise à l’épreuve tend à l’effroi, à la perte de sympathie, à l’antipathie : les personnages de Irréversible ne sont intéressants que par leurs réactions en face de la barbarie à l’état brut : le viol suivi du meurtre.

Les personnages des films de la mise à l’épreuve se définissent par leur régression : réduits à l’instinct de survie, les proies du film « Ils » s’enfoncent dans l’épouvante et leur humanité même les y conduit. Ainsi, hésitent-ils avant de frapper leurs bourreaux (mais qu'attend-t-il pour frapper ?) et sont en fin de compte abusés par l’illusion du sauveur.

La danse barbare et homosexuelle du film Calvaire relève d’un surréalisme de l’ignoble. Au surréalisme élégant des artistes de l’énigme a succédé un surréalisme du sordide, de la régression, de la laideur. Au baroque inventif et magnétique succède un gothique angoissant.

Le cinéma de la mise à l’épreuve relève du regard phénoménologique. Il décrit la régression sociale et induit cette mort dans l’âme, cette désolation du spectateur fasciné devant le spectacle de la barbarie.

Le cinéma de la mise à l’épreuve est peut-être un outil de réflexion sur l’avenir de nos sociétés. C’est peut-être le cas du film « Ils » qui tend à montrer que l’exercice de la violence est aussi devenu un jeu. Le film Irréversible me semble avant tout un brillant exercice de style (c’est d’ailleurs en cela, - cette narration à rebours -, qu’il s’inscrit dans l’histoire du cinéma). Calvaire est un film d’acteurs au service d’une narration du malaise, de l’écoeurement, de la nausée.

Le cinéma de la mise à l’épreuve constitue une phénoménologie prémonitoire. Il prévoit le temps des assassins, des barbaries à venir.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 31 mai 2009

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