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14 juillet 2012 6 14 /07 /juillet /2012 09:39

AU MÊME TOUT A FAIT AUTRE,
(En feuilletant La Traversée, de Sylvia Plath, traduit par Valérie Rouzeau, Poésie/Gallimard, "Arbres d'hiver précédé de La Traversée").

1.
"The blue night plants"
(Sylvia Plath, Parliament Hill Fields)

La poésie, du songe en syllabes... A la lettre, la rêverie... voyez-moi cette serre de la nuit avec ses plantes bleues... c'est la drôle de lumière... le soir change les couleurs... chat gris, la nuit, le v'là chat bleu... les herbes, les plantes font ça aussi... un infini de métamorphoses, le temps... tout change tout le temps, revient au même tout à fait autre.

2.
"A bonewhite light, like death, behind all things."
(Sylvia Plath, Insomniac)

On dort pas... le macabre songeur vous danse macabre dans la caboche... vous pensez à la mort... les corps, montages d'osses qui arpentent le réel... collections d'organes, maladies sur pattes... latents crabes... tout ça pour finir terre, vers, boue... ossements, souvenirs... ombre, néant... on prend pas la vie assez au sérieux... en considération... c'est pas gai... vous voyez le mépris d'une autre façon... jalousie, envie, dépit d'une autre façon... relativité générale... c'est la camarde qui tient les comptes... vous calculez rien. Ce qu'il y a, c'est la "blancheur d'os" de la "lumière" qui est curieuse... la mort, c'est du noir, du sous-terre, du grouillant recyclant - en cela la terre fait le même genre de boulot que nos organes digestifs - c'est aussi la blancheur des os dans les tableaux... Memento mori, le crâne à côté de la Bible, cellule du moine... cette lumière, j'y reviens, vient-elle de l'os, ou de l'extérieur de l'os ?... Bien sûr, de l'en-dehors de l'os... la vraie couleur des choses, la couleur de Dieu, moi, je la sais pas... sans doute n'importe quel étudiant en physique pourrait me renseigner... mais il y a tout de même, dans ses vers à Sylvia Plath, quelque chose d'essentaliste dans le genre nihiliste... c'est le dernier rempart sérieux de l'essentialisme... derrière toute chose, la mort... tout masque, la mort... tout soleil, la mort... tout, la mort... Dans ce poème de Sylvia Plath, partout la mort qu'elle a l'air de s'être insinuée, qu'elle fait "passer la lumière" des étoiles... "judas après judas"... d'un "ciel de nuit" qui "n'est qu'une sorte de papier carbone" à l'oeil qui songe :

"The night sky is only a sort of carbon paper,
Blueblack, with the much-poked periods of stars
Letting in the light, peephole after peephole -
A bonewhite light, like death, behind all things."
(Sylvia Plath, Insomniac)

"Le ciel de nuit n'est qu'une sorte de papier carbone,
Bleu-noir, aux périodes très marquées d'étoiles
Qui laissent passer la lumière, judas après judas -
Lumière d'une blancheur d'os, comme la mort, derrière toutes choses."
(traduction : Valérie Rouzeau)

3.
Même poème, Insomniac... les yeux ouverts dans la nuit, les souvenirs affluent... remontent jusqu'aux jours anciens, les maisons... "les jours bruineux de l'enfance et de l'adolescence, tout poisseux de rêves" ("the mizzling days / Of childhood and adolescence, sticky with dreams").... bon, il pleuvait... filigrane du film... noir et blanc grêlés de gris... c'est du nord que ça songe... L'Angleterre à parapluies ; mon nord de France... l'humide et le "poisseux"... texture du rêve, le poisseux... on s'en souvient pas... nous, poissons dans nos poisseux aquariums oniriques, c'est d'impressions que nous nourrissons nos gueules béantes, celles qui clapent dans nos têtes tandis qu'on bavarde dans le monde... s'ouvrent et se ferment... s'ouvrent et se ferment... une impression de poisseux... on colle au réel, fût-il fichu l'camp depuis un bail.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 14 juillet 2012

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