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2 février 2013 6 02 /02 /février /2013 10:22

GLISSER LA PLUME DANS SA POCHE
De quelques bribes tirées du roman "Le Meurtre de Roger Ackroyd" d'Agatha Christie, traduit par Miriam Dou-Desportes, Le Livre de Poche n°617.

 

- y attacher un peu trop d'importance : c'est toujours l'auteur qui décide de ce qui est important ou pas ; heureusement, on n'est pas obigé de le suivre.
- prendre une mauvaise tournure : se dit d'une affaire, et dans le cas d'une énigme policière, pour qu'elle soit bien alambiquée, bien club des masques, il est nécessaire qu'à certains moments, l'affaire prenne une mauvaise tournure, sinon on s'ennuie.
- d'en donner les détails : pas trop tout de même, sinon on s'ennuie aussi, et puis on s'y perd, et d'ailleurs on s'en fout.
- un fauteuil un peu plus avancé : dans les demeures à mystères, j'ai souvent remarqué que les meubles ont tendance à prendre leurs aises avec la réalité, enfin, ce que l'on appelle réalité, et qui n'est que convenance.
- cacher son embarras : on s'embarrasse les uns les autres ; vivre en société, c'est gérer ses embarras ; c'est éviter de s'entremêler - il faut faire attention, un accident est vite arrivé, et, soudain, vous voilà avec deux têtes, trois yeux (elle est borgne), quatre pattes, quatre pinces et un nom composé à aller se cacher sous les pierres.
- un mystérieux inconnu : il s'agit donc de le nommer ; l'enquête est la mise au point d'une liste de noms. Ensuite, il s'agit de hiérarchiser les nomenclatures, d'en préciser leur légitimité, leur spécificité, leur éligibilité.
- les vivants et les morts : l'énigme est dans ce rapport entre les vivants et les morts.
- regarder respectueusement Poirot : c'est la moindre des choses quand on est en présence d'une telle pointure déductive.
- un regard aigu : qui coupe donc dans le réel, qui coupe et recoupe.
- un sentiment d'angoisse : rien que de très normal dans un roman policier que cette culture de la plante parasite qui, la nuit, vous pousse entre les doigts de pied, vous remonte dans les jambes, les reins et vient appuyer ses gants de lierre sur votre poitrine, comme si elle voulait vous ranimer, ou vous étouffer.
- la mauvaise habitude de ne pas terminer mes phrases : c'est quand le cogitif prend le pas sur l'énonciatif, qu'un essaim de pensées éparses coupe la route des syllabes. Ou que vous trouvez ça tellement évident, la fin de vos phrases que, n'est-ce pas ? ou que vos mots se font la malle et partent sur les chemins sourds de l'ailleurs.
- élucider davantage ce point : des points aveugles que l'on éclaire en sont-ils moins aveugles ?
- une fenêtre ouverte : l'assassin est-il passé par là ? Ou par la porte de derrière, ou par l'escalier dérobé, ou par l'entremise, ou par la dunette, ou par une meurtrière, ou par la gargouille, le miroir sans tain, la saucerfoule off sicrets, le chapeau de mon oncle sur la table basse de ma tante, l'oreille d'un sourd ? Mystère et carambar !
- Pong et Mah-jong : on joue beaucoup au Mah-jong dans Le Meurtre de Roger Ackroyd ; je ne connais absolument rien des principes de ce jeu ; ça participe de l'effet de bizarre.
- cet affreux petit Français ou Belge : pauvre Poirot !
- du "fussent mariés" : si les gens en viennent à se marier clandestinement, où allons-nous ?
- la visite d'un étranger : c'est toujours suspect car dans ces microcosmes qu'analysent les romans d'Agatha Christie, y a pas tellement de place pour les étrangers : il faut que tout se tienne. Les romans d'Agatha Christie sont des définitions d'ensembles problématiques à nombre restreint d'éléments.
- glisser la plume dans sa poche : j'aime bien cette expression; quand j'arrête d'écrire, c'est comme si je glissais la plume dans ma poche.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 2 février 2013

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