MIROIR
Dans une intrigue policière, le miroir est ce qui peut refléter ce que voit le témoin à l’insu du meurtrier. Le miroir est ainsi un révélateur. On peut supposer que l’on peut, en fiction, traverser le miroir, rendre fluide cette surface lisse et fidèle comme l’eau claire, et se trouver dès lors plongé dans un monde inverse ou différant de la logique qui a cours dans ce monde dans lequel nous nous mouvons, et où nous contemplons nos visages dans les miroirs à qui les reines demandent : « Miroir, mon beau miroir, dis-moi qui est la plus belle ? », ce qui implique que les miroirs ont des yeux pour voir, et donc une mémoire visuelle, ce qui contredit le fait que les images se succèdent dans les miroirs sans que ceux-ci puissent en retenir aucune. On peut rappeler aussi qu’autrefois, il était d’usage, dans les maisons endeuillées de voiler les miroirs (comme si le deuil ne pouvait se contempler) et que les vampires ne peuvent être vus dans les miroirs, lesquels, révélant les présences, et donc, l’état présent des êtres, ne sauraient refléter ce qui relève du présent de vérité générale, - les vampires sont immortels – et ne reflètent donc que des objets ou des êtres mortels, dans une saisie synchronique, fugace, à un moment de leur lente métamorphose, entre la jeunesse et le vieillissement, entre l’apparaître et le disparaître, entre la conformité et la difformité. On peut supposer aussi qu’un miroir brisé peut constituer un mauvais présage, ou que, comme je l’ai vu dans un film, l’éclatement du miroir en milliers de petits éclats provoque la division du visage de la sorcière, son émiettement, sa dispersion en milliers de minuscules fragments, indiquant ainsi que le Mal peut être pulvérisé en milliers de petites malignités qu’un coup de vent, ou un coup de balai, suffit à faire disparaître.
Patrice Houzeau
Hondeghem, le 2 janvier 2010
