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14 février 2009 6 14 /02 /février /2009 17:51

ELOGE DE L'ANARCHIE DOUCE
NOTE SUR ALEXANDRE LE BIENHEUREUX DE YVES ROBERT

Vu ce soir, et même revu, Alexandre le bienheureux de Yves Robert.
Décidément, j'aime bien ce film éloge de la paresse et du repli sur soi. On pourra le trouver égoïste, ce "fichez-moi la paix, moi je roupille" mais comme ce n'est jamais que de la fiction, ce n'est pas grave.
Disant cela, je sais que je puis en faire hurler quelques uns qui estiment que l'oeuvre littéraire doit être plus ou moins au service d'une "morale" qu'ils appellent même "éthique" pour faire plus philosophique.
Je suis plutôt bon public et donc cela ne me gêne en rien, ce rêve de campagne et de complicité avec un toutou d'un bonhomme, cultivateur de son état, qui a trimé pendant dix ans sous les ordres de sa femme, "la Grande", et qui, le jour de l'enterrement de sa bourgeoise, décide de n'en plus faire qu'à sa tête .
D'autant plus que la paresse d'Alexandre (formidable Philippe Noiret) s'oppose à l'aliénation par le boulot à tout prix pour gagner des sous et faire tourner la machine : "Faut suivre l'escalade" comme dit la délicieuse et en fin de compte vipérine Agathe (Marlène Jobert en sa jeunesse).
D'autant plus que la paresse d'Alexandre s'oppose à la sainteté des hiérarchies que les fondateurs d'industries tentent de nous faire passer pour des modèles "naturels" : Il faut que chacun fasse sa part de boulot dans le respect des lois et la peur des gendarmes. (Ceci dit, tous les personnages du film sont plutôt braves types et n'en veulent à Alexandre que parce que son comportement est "déplacé" : puisqu'il est propriétaire de 120 hectares, il a le devoir de les faire fructifier ; sans doute, s'il était "l'idiot du village" ou "le rentier" ou "le pensionné" ou "le fonctionnaire", le regard porté sur lui serait moins désapprobateur).
D'autant plus que la paresse d'Alexandre s'oppose à la tyrannie de la loi commune, à la cupidité générale, à la "tradition" qui voudrait qu'un homme soit obligé de vivre avec une femme, "tradition" très utile lorsqu'effectivement on a la charge de 120 hectares (il est même nécessaire alors de faire des enfants qui aideront d'une manière ou d'une autre) mais "tradition" hautement grotesque lorsque l'on a décidé de se reposer et de faire "à s'mode" selon la très sage expression de Madame ma mère.
Bref, j'aime ce film parce qu'il est doucement anarchiste, quelque peu "s'fiche du monde".
J'aime ce film parce qu'il est doucement poétique (les dialogues entre Alexandre et son chien, quelques gags dont on retrouvera l'esprit chez Woody Allen : cf la séquence du jeu télévisé où le spectateur, de sa ferme et devant "l'étrange lucarne" dans laquelle le Général De Gaulle dans les années 60 créa des sketchs incroyables, souffle les réponses au candidat).
J'aime ce film parce qu'il me fait penser à l'atmosphère des films de Jacques Tati ou de certains contes de Marcel Aymé.
J'aime ce film parce que, de la même manière que le spectacle de mes chats endormis me donne envie de sommeil, le spectacle d'un homme mettant le repos au centre de sa vie me fait considérer égoïstement mon lit comme un de mes lieux de réflexion, - sinon de méditation ! -, favoris.

          Patrice Houzeau
          Hondeghem, le 24 octobre 2005

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