Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
22 février 2009 7 22 /02 /février /2009 08:54

LE TEMPS ET LE DIABLE
Notes sur L'astrologue de Bruges, 20ème album des aventures de Yoko Tsuno par Roger Leloup (éditions Dupuis, 1994).

Planche 18 (page 21) :
- "N'est-ce pas imprudent de l'emmener au 16ème siècle ?
- Je n'ai pas le choix, Van Laet l'y a rencontrée."

- "Is het niet onvoorzichtig haar mee te nemen naar de 16de eeuw ?
- Het moet wel, Van Laet heeft haar toen ontmoet."

La fiction est un trompe-temps.
Une tromperie si l'on veut : on a beau jeu de se raconter des histoires. Nous ne faisons que passer. Nous ne sommes jamais que des phénomènes spatio-temporels.
La fiction est un trompe-la-mort.
Mais toujours la mort nous attend à Samarkande et la partie d'échecs du chevalier, si longue et belle soit-elle, a toujours une fin.
Le Commandeur finit toujours par répondre à l'invitation de Dom Juan.
La mort en fin de compte tient toujours ses promesses ; elle finit toujours par venir.

Dans ce récit de "l'astrologue de Bruges", ce sont deux jeunes femmes et une petite fille qui remontent le temps (Yoko Tsuno, Monya, Rosée) comme s'il s'agissait d'évoquer ce qu'il y a de matriciel dans ce phénomène du temps que l'on remonte.
Les corps sont des horloges.

Planche 11 (page13) :
- "Croyez-moi, Juffrouw Yoko, à part Dieu, nul ne sait où j'ai enseveli le diable !
- Si, moi."

- "Geloof me, Yoko, behalve God weet niemand waar ik de duivel heb verborgen.
- Ya, ik."

Entendu dans un film par ailleurs assez moyen (le "Arsène Lupin" de Jean-Paul Salomé, 2004) cette idée selon laquelle la plus grande ruse du diable est de nous persuader qu'il n'existe pas.
Du reste, le diable est un fabuleux personnage de fiction ; il n'existe pas, certes, mais il est bien vivant, partout à l'oeuvre dans les romans, - Bernanos ne situait-il pas la résidence du diable à Lumbres et Rimbaud ne l'a-t-il pas écrit que le "diable était au clocher" ? - partout, dans les romans gothiques, les films d'épouvante - où il fait souvent grande impression
! -, les rêves des hommes, - j'ai moi aussi, dans un rêve, reconnu le diable et son complet-veston et sa grande politesse, partout et ici dans un album de bande dessinée où le diable a été "enseveli", mis sous terre donc comme un chrétien ordinaire.
Mis sous terre ; c'est dire qu'il peut réapparaître à tout moment, le prince des ténèbres, le porteur de lumière.
Euh... Je ne suis point sataniste, Dieu m'en garde ! je rappelle simplement ici qu'étymologiquement "Lucifer" signifie "qui porte la lumière".
Réapparaître, comme un virus endormi, une peste à laquelle on ne pense plus.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 30 décembre 2005

 

Commentaires

"cette idée selon laquelle la plus grande ruse du diable est de nous persuader qu'il n'existe pas." oui, Malin non? ;)

C'est peut-être l'antique peur du grand mechant loup, de la superstition, mais je n'aime pas trop l'évoquer celui-là.

Amitiés Chris

Posté par Chris, 30 décembre 2005 à 12:44

Je pense que la référence "la plus grande ruse du Diable est de nous persuader qu'il n'existe pas" se trouve peut-être dans saint Augustin. J'ai oublié.En tout cas, elle est fort ancienne et on peut la lire chez divers prédicateurs médiévaux... Baudelaire l'a reprise et JEan-PAul II l' répétée en public à plusieurs reprises.

Une légende veut que le Diable n'a eu qu'une seule fois peur dans sa vie: ce fut en entendant cette phrase. " Enfer et damnation! a t-il dû s'écrier, je suis découvert"!

MAis n'est-ce pas encore une ruse supplémentaire de "mijn heer van Belzébuth" comme l'appelait Charles Deulin dans ses "contes d'un buveur de bière"?

Que cette année vous soit douce et tendre comme une bière de mars trépignant d'impatience dans son fût, avant de s'écouler, van 't vat dans nos verres!

AUtre question: Le diable est-il flamand? Voici qui amuserait ma vlaamsitude originelle!

Posté par orlando de rudde, 31 décembre 2005 à 00:51
le diable?

Le diable? Le croyant que je suis pense que Satan, s'il existe en tant que personne, ce que je n'affirmerais pas avec certitude, est un être qui effectivement a une lumière, c'est peut-être l'étrange lumière du mal. Au bout du compte le diable a-t-il sa foction dans le grand mystère du monde...
Toujours est-il qu'il est un bon thème littéraire chez Bernanos, Green ou dans cette bd
Chaque homme

Posté par chaque homme, 31 décembre 2005 à 12:24

C'est l'ocasion de lire ou de relire LA sorcière, de Michelet, qui montre la familiarité du Diable en milieu rural avec le souffle d'une épopée!!! Livre extraordinaire! Foldingue et touchant au sublime!

Un régal!

Posté par orlando de rudde, 02 janvier 2006 à 18:12
Partager cet article
Repost0

commentaires

Recherche