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24 septembre 2009 4 24 /09 /septembre /2009 03:45

DU SURCOÛT STRUCTUREL

Une remarque dans un récent article de l’indispensable Orlando de Rudder a attiré mon attention sur ce lien :
http://www.agoravox.fr/auteur/pierre-meur où je lis à propos du pétrole :

 
« - Pour justifier le prix du baril, on nous affirme que nous avons atteint le pic où la demande excède la production. Est-ce une réalité ou est-ce que la montée du prix du baril est volontairement accentuée vers le haut afin de rendre rentable l’exploitation de gisements qui ne pouvaient pas l’être en dessous d’un certain prix ? » (Pierre Meur).

 
A cela un commentateur objecte assez finement : « Relisez vous ! Quel intérêt pour les producteurs de volontairement augmenter le prix du baril pour exploiter des gisements coûteux s’ils avaient encore accès a des gisements peu onéreux ? »

Mais c’est là oublier que le capitalisme est aussi mise en œuvre des surcoûts. Les exemples abondent (armement, travaux publics, formation professionnelle,…) où les surcoûts ont été prévus et planifiés. Et je ne parle pas ici des dépassements de budgets circonstanciels. Nier l’existence de ces surcoûts, c’est, à mon sens, méconnaître la définition même du capitalisme qui est moins une recherche du profit immédiat qu’une organisation de l’économie visant à pérenniser les profits. En cela, il y a certes conflit entre financiers et producteurs, les premiers ayant tendance à spéculer à court terme, et donc à exiger des gains rapides de productivité ; les seconds visant à pérenniser leur entreprise et donc à planifier la production. C’est probablement l’abandon de la notion de surcoût structurel au profit de savants calculs de probabilités de gains rapides qui conduit le capitalisme à ces éclatements successifs de bulles spéculatives que furent la crise des « start-up » et celle, plus retentissante encore, des crédits hypothécaires.
Deux logiques s’affrontent donc : celle de la pensée magique du bénéfice mirobolant induit par la réorganisation constante des marchés (concentration des entreprises, mondialisation, coût des matières premières, etc…) et celle des nécessités de la production (réglementations, masse salariale, pression fiscale, investissement, flux tendu et carnet de commandes, concurrence, sous-traitance, niveau d’endettement, trésorerie, état du marché, etc…). Penser l’industrie du pétrole en ne prenant en compte que l’aspect financier conduit forcément à des erreurs d’appréciation. C’est ainsi que l’on oublie un peu vite le rôle stratégique du pétrole pendant la Guerre Froide et les conséquences actuelles des choix qui furent faits antérieurement à la chute de l’Empire Soviétique. Que la création, en 1960, de L’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) ait eu pour but de mettre fin à un état de trop bon marché de la matière première est certain. Mais comment expliquer que les faibles états du monde arabo-musulman aient, en fin de compte, pu imposer leur loi au marché et surtout aux grandes puissances militaro-industrielles de l’Occident ? Certains, un peu naïvement, y ont vu la puissance du puritanisme américain, qui, acceptant un pétrole cher, en finissait avec les « Trente Glorieuses » et leur course aux émancipations (féminisme, communautarisme, écologie, contraception, amour libre, alter-mondialisme, etc...). Je n’y crois guère. Je crois plutôt qu’il faut se souvenir qu’avant la chute du Mur (1989), personne n’aurait parié sur une fin si rapide, si proche et, à l’exception de la tragédie yougoslave, si pacifique, du système communiste ; qu’il faut se souvenir aussi que, dans les années 80, le Liban n’en finissait pas de se consumer dans la guerre civile ; que l’état d’Israël était tout aussi menacé que maintenant. En acceptant de payer beaucoup plus cher leur pétrole aux Pays du Golfe, les puissances occidentales se sont assuré des alliances sûres, et ont pu, jusqu’ici, garantir la sécurité d’Israël face à une toujours possible coalition des pays arabes.
C’est ainsi que bien des innovations qui pouvaient, d’une manière ou d’une autre, remettre en cause le règne de l’or noir, ne furent longtemps que projets plus ou moins vagues ou rares prototypes (ce fut, à mon avis, le cas de la voiture électrique).
Cette politique de stabilisation des fronts sonna, bien évidemment, la fin de la prospérité des Trente Glorieuses et le retour à un état précaire du marché du travail. C’est sans doute ce qu’ont du mal à avaler la plupart des exégètes du Grand Complot ourdi par les multinationales du pétrole. Que s’est-il donc passé ? Pas de complot, mais une série de négociations entre professionnels et politiques. On dit un peu facilement que les gouvernants sont « à la solde » des grandes compagnies. En fait, la stratégie semble être la suivante :
-         Maintenir le prix du baril à un niveau relativement « élevé » de manière à garantir la stabilité internationale, de ménager les réserves disponibles, d’éviter une surchauffe périlleuse (souvenons-nous de l’état de surproduction dans laquelle baignait l’Europe à la veille de la Première Guerre Mondiale), surchauffe de l’économie qui serait induite par une automatisation toujours plus grande des processus, l’ouverture des marchés de l’ex-Europe de l’Est et l’émergence des nouvelles puissances (Chine, Inde, Brésil, etc…).
-         Admettre ainsi la permanence d’un surcoût structurel garanti par les puissances occidentales et les Etats-Unis, en termes de chômage par exemple, de baisse des consommations, de prix « à la pompe », de protection des intérêts pétroliers dans des zones peu stables, etc…
-         Habituer les ménages des vieilles puissances industrielles à d’autres modes de consommation (énergies « propres », « alternatives », développement durable, etc…) de manière à susciter de nouveaux besoins, à ne pas aggraver le probablement inévitable et naturel réchauffement climatique, et arriver ainsi à une division mondiale des modes de consommation d’énergie.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 24 septembre 2009

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commentaires

O
<br /> Quelles "trente glorieuses"? L'époque où les stgatistiques du chômages étaient indigentes,L'époque des bidonvilles et du rachitisme des gamins pauvres? En France, c'est un peu plus tard que la<br /> reprise eut lieu, grâce entre autres , et malgré lui, à l'abbé Pierre: La crise du logement permit à Bouygues de faire fortune avec les escroqueries, magouilles, appels d'offres truqués que l'on<br /> sait! Ce fut le point de départ des cités actuelles ") problèmes" et cela a crée beaucoup de richesse...pour les entrepreneurs! Lasimple lecture des journaux d'époque montre que les<br /> "trentefglorieuses" sont un mythe! Ce fut l'un des pire moment de crise sociale et politique!<br /> <br /> <br />
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