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24 août 2009 1 24 /08 /août /2009 01:35

LES PETITS SOLDATS DU PARANORMAL

On devrait donner des cours de prestidigitation dans les écoles : les gens seraient peut-être moins crédules. Rien de tel que l'application stricte des lois de la physique pour monter des tours et donner l'illusion de disparitions subites, de métamorphoses épatantes, de femme coupée en deux et de lapin sortant d'un chapeau.

Moi, pour ma part, sachant bien que l'on peut m'illusionner la mirette, j'ai tendance à me poser des questions sur tout ce que j'entends et tout ce que je vois. En tout cas, avec les émissions sur le paranormal que nous fourgue la chaîne Direct 8, je n'en crois pas mes oreilles d'entendre tant de sottises en si peu de temps.
Vous me direz, pourquoi en parler si ce sont des sottises ?
C'est que voyez-vous, le discours des petits soldats du paranormal (journaleux, pseudo-scientifiques, comédiens payés pour, doux illuminés et crapules charlatanesques) a évolué ces dernières années. Avant, ils étaient vraiment trop grossiers dans leurs affirmations, et à moins d'être particuliérement naïf, on n'arrivait pas y croire, à leurs surnaturelleries grotesques. Ils s'en sont aperçus, et ils ont passé leur discours à la machine à faire savant.
Tenez, un exemple... Vous vous souvenez que, juste avant la création de la secte de sinistre mémoire "Ordre du Temple Solaire", le fameux Jouret avait tenté de faire croire qu'il y avait aux Philippines des "chirurgiens aux mains nues" (berkh ! quelle horreur !) qui opéraient donc en utilisant seulement leurs mains nues (bin tiens !) et je ne sais quelle force psychique venue d'au-delà on ne sait où. Bon, le criminel Jouret s'est avéré une fort mauvaise publicité. Les films faisant preuve ont été soigneusement analysés, et il s'est avéré qu'il y avait pas plus de mains nues dans l'estomac des malades que d'honnêteté chez Berlusconi, mais des foies d'animaux apparaissant sur le ventre des "opérés" selon le principe du tour de passe-passe et de l'habile manipulation genre t'as rien vu, j't'embrouille. 
Et bien voilà que dans une "Grande Nuit du Paranormal" de Direct 8, on nous le ressert, le chirurgien à main nues spirito-chrétien des Philippines, mais cette fois-ci on nous précise qu'il se peut qu'il y ait des "tricheries sacrées" (ah ouiche !), c'est-à-dire des tissus ensanglantés (ça fait moins trash que du foie de porc) qui feraient croire au patient qu'on l'opère, mais qu'en fait c'est tout psychique s'il guérit... Euh ! Et ça coûte combien de se faire opérer par un bout de tissu passé à l'encre rouge par un Philippin qui se dit protégé par Saint-Michel ? Enfin, pour que le doute ne soit pas permis, il y a tout de même le témoignage enregistré d'une "chef d'entreprise" (ça fait tout de suite plus crédible que caissière à Aldi) dont le fils, - un certain Christophe (tiens, tiens, le prénom est quand même évocateur, Christophe, c'est-à-dire, le "porte-Christ") - dont le fils donc aurait été opéré et, nous précise-t-on, guéri d'un cancer du péritoine par le fameux tailleur philippin.
Je sais pas vous, mais moi qui suis ébahi par les exploits de nos chirurgiens occidentaux, en matière de greffe par exemple, ces histoires, elles me flanquent quelque peu la nausée.
Un autre exemple ? Eh bien, les OVNI, tiens ! Bin oui, quoi, les OVNI, ça c'est du costaud ! Donc, les voilà qu'ils reviennent, les gros mensonges soigneusement préparés pour pas qu'on s'interroge de trop sur l'état réel des progrès en matière d'industrie d'armement. Alors, jadis, il y a une vingtaine d'années, il y avait eu un écrivain de romans de S.F. en série qui affirmait que le monde était en fait dirigé par le Majestic 12, lequel était constitué de "Petits Gris" (non ! pas des escargots ! mais des extra-terrestres tout gris, à grosse tête. Très intelligent, ça, le Petit-Gris, et très méchant, encore plus méchant que votre belle-mère, votre beau-frère, votre voisin, rayez la mention inutile ; bref, un légionnaire avec un cerveau, vous voyez quoi ! ça rigole plus, là...) et de savants qui, ah les infâmes, collaboraient avec les "Petits-Gris" susnommés et protégés comme il se doit par toutes les grandes puissances (sauf peut-être Monaco, et encore, c'est pas sûr !). Bon, il écrivait comme une patate ; du coup, sa salade, il avait trouvé que ce moyen pour la vendre, le bonhomme. Grotesque et même pas rentable.
Maintenant, sur Direct 8, dans "La Grande Nuit du Paranormal", attention les yeux, c'est carrément à une ex tête pensante du CNRS (c'est vrai ça au moins ?, ou il a juste été barman au CNRS, le gaillard ?) à un ex-je-ne-sais-quoi donc du CNRS qu'on demande de raconter des niaiseries X-filesques sur les OVNI : un certain Jean-Pierre Petit, qu'on nous présente comme un astro-physicien, ou quelque chose dans ce goût-là, et qui nous vient, sans rire, nous révéler qu'en fin de compte, Roswell, c'était pas du pipeau, et que si les Américains étaient si en avance dans leurs programmes d'armement (il y aurait effectivement une quinzaine d'années de recherches qui séparent les USA de nous autres, les européens laborieux ; du reste, il n'y a qu'à comparer Internet et la boîte à coucous appelée Minitel pour mesurer l'écart), c'est pas pasque, les Américains, y investissent un max de fric dans la recherche/développement, ni qu'ils ont de sacrément bons ingénieurs et toutes sortes de spécialistes dans des spécialités qu'on connaît même pas le nom, c'est que, - c'est élémentaire, mon cher Watson -, ils ont hérité de la science extra-d'ici des armements par l'étude raisonnée des soucoupes volantes malencontreusement scrachées sur terre (1) (2) ! Ah la vache ! Là quand même, j'ai du mal  à l'avaler ! Enfin, il paraît qu'en France, le métier de chercheur paie mal ; c'est peut-être pas une raison pour raconter n'importe quoi à la pistache cosmologique sur les plateaux téloche et même, paraît-il, de publier des bouquins sur le sujet !
Bon, enfin bref, on voit que le cirque du paranormal a relancé sa grande parade d'animaux bizarres, d'incongruités multidimensionnelles et autres parallèles paranormalités pas croyables ; ce qui fait que, comme nous savons, grâce à la formidable Scully, que "la Vérité est Ailleurs" (3), nous ne  pouvons que nous interroger sur les raisons réelles de telles campagnes de bourrage de crâne... 

(1)
 Je me disais bien aussi, comment ils font pour toujours être en avance sur nous, ces obèses gardiens de vaches  bouffeurs de hamburgers ?
(2) On peut se demander pourquoi ceusses des cosmiques ailleurs ne viennent pas récupérer leur vaisseau perdu. J'imagine bien le dialogue :
-
Commandant Zorgh, commandant Zorgh, le Schtrompf 456 123 XYZ a dû atterrir de toute urgence dans le Nevada !
- Mais où le Capitaine Zurgh avait-il ses têtes (eh oui, des fois, ils en ont plusieurs). J'avais dit pas la Terre ! 
- Oui, c'est ennuyeux, ils ont des journalistes là-bas... Bon, qu'est-ce qu'on fait, on envoie Léon nettoyer tout ça et récupérer le Schtrompf ?
- Non... On laisse tomber, Zurgh rentrera tout seul, par la Quatrième Dimension, ça lui fera les palmes ! Pour le Schtrompf, qu'il reste sur terre ; de toute façon, que voulez-vous qu'ils comprennent à notre technologie hyper-psychique, ces obèses gardiens de vaches bouffeurs de hamburgers ?
(3) Ce qui veut d'ailleurs dire que la Vérité constitue un Ailleurs, un au-delà des illusions, un en-dehors des ombres qui s'agitent dans la caverne ou qui, grotesques et malhonnêtes, remuent dans les étranges lucarnes...

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 24 août 2009

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13 août 2009 4 13 /08 /août /2009 11:05

COBRAS ROYAUX

Il y avait eu déjà, il y a quelques semaines dans cet été 2009, l'histoire de cet habitant du Sud de la France mordu (ou piqué, comment doit-on dire ?) dans son sommeil par une araignée dite "araignée violoniste" (1). Ce qui est étrange rapport à ce que l'araignée violoniste est, nous dit LCI, originaire du Mexique et normalement inconnue sous nos climats. Quoi qu'il en soit, c'est arrivé, il y a eu hospitalisation, greffe de peau, et reportage à la télé.
Et voilà que j'apprends ce matin que je ne sais où, mais en France encore, il y aurait un Cobra Royal (je mets des majuscules parce que l'animal est, nous dit-on, particulièrement impressionnant autant que dangereux) qui se promènerait dans les herbes d'un de nos patelins.
C'est-y-pas qu'un collectionneur aurait laissé échapper quelques unes des pièces de sa collection ?
Ou que des trafiquants d'âmes animales aient été obligés d'abandonner leur cargaison dans la french cambrousse ?
Ou un laboratoire peut-être ?
Ou Fantômas ?
En tout cas, c'est bizarre, et si des araignées violonistes et des Cobras Royaux se mettent à circuler dans nos jardins à la française et les sillons de nos labours, y a tout de même de quoi s'inquiéter. Voilà sans doute qui pourrait faire fuir le touriste, le randonneur, le méditatif promeneur. Ce qui laisse songeur.

Dans le genre Cobra Royal, y a aussi Brice Hortefeux, le Ministre de l'Intérieur, qui vient fort heureusement de revenir sur la décision de suspendre l'incorporation de quelques centaines de "Cadets de la Police", qui avaient pourtant réussi leurs tests de sélection et dont beaucoup avaient même renoncé à un autre emploi pour pouvoir y rentrer, dans la nationale à uniformes.
L'annonce de cette suspension, "pour raison budgétaire", a causé un vif émoi et j'allais écrire qu'il était tout de même curieux que les banques qui avaient profité il y a quelques mois des largesses de l'Etat, et donc du contribuable, ne se soient pas proposées pour aider à financer la formation de ces futurs gardiens de la paix, étant donné qu'après tout, c'était là une manière de rembourser une petite partie de l'emprunt que nous leur avons consenti, d'autant plus que tous ces jeunes gens, au départ sans beaucoup de diplômes, et c'est là, du temps qu'il était à l'Intérieur, une des meilleures initiatives de Nicolas Sarkozy que cette "deuxième chance" donnée, que tous ces jeunes gens donc, allaient avoir pour profession de protéger les personnes et les biens, et donc banques et banquiers.
Enfin, apparemment, les médias ayant fort heureusement attiré l'attention de l'opinion sur la sottise de cette décision administrative, Brice Hortefeux a promis que l'incorporation de ces "Cadets de la Police" serait effective au 1er octobre 2009. Affaire à suivre en tout cas, car le propre du politique est de ne pas toujours tenir ses promesses...

(1) Son nom savant ne serait-il pas paganina arachnea, ou stradivaria arachnea peut-être ?

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 13 août 2009

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12 août 2009 3 12 /08 /août /2009 08:35

VERS LA PANDEMIE

Il ne se passe guère de jours, en ce mois d'août 2009, sans que l'on évoque l'épidémie de grippe A. Pour l'instant, il semble que cette fameuse grippe porcine soit certes très contagieuse, mais rarement mortelle. Du coup, on parle même de "grippette", et l'on fait remarquer qu'elle ne fera sans doute pas plus de morts que la grippe saisonnière habituelle. Certains même s'étonnent des précautions prises pour tenter de ralentir la progression du virus. C'est vrai que si cette grippe n'est pas plus dangereuse que l'habituelle visiteuse de nos automnes, on se demande pourquoi mettre tant de gens en quarantaine, ou du moins en isolement, pourquoi préconiser le port du masque et rappeler, par des plaquettes explicatives que l'on distribue dans les entreprises, quelques mesures élémentaires d'hygiène, de sorte que dans beaucoup de bureaux, les employés ne se font plus la bise (ce que j'ai toujours trouvé pour ma part, cette bise du matin entre collègues, d'une niaiserie sans nom), voire évitent de se serrer la main ; pourquoi laisser entendre, comme le fait le Ministre de l'Education Nationale, Luc Chatel, ce mercredi 12 août 2009, que l'on est prêt à fermer, s'il le faut, toutes les écoles du pays, pourquoi stocker tant de médicaments, et mettre au point si vite que c'en est quasi miraculeux, un nouveau vaccin...
Certains, à gauche, imaginent que le capitalisme utilise cette épidémie pour détourner l'attention de la crise qui le mine.
Crisis ? What Crisis ?
Il est clair que l'éclatement de la bulle spéculative immobilière a fait des dégats, mais, en fait, elle a surtout permis une nécessaire redistribution des cartes. L'Asie, en particulier la Chine, en sort renforcée ; les Etats-Unis s'apprêtent à relancer leur fabuleuse machine à produire, les cours des matières premières vont repartir, d'ici peu, à la hausse ; l'Europe suivra, plus ou moins aisément.
Non, il ne s'agit pas de détourner l'attention. Au contraire, il s'agit d'attirer l'attention sur une menace bien réelle.
En effet, outre qu'il est toujours possible que l'on assiste à une mutation du virus de la grippe A qui transformerait la "grippette" en saloperie meurtrière, il est aussi, qu'en raison de la mondialisation des échanges, avec les voyageurs circulent aussi les virus. Peut-être aussi que le réchauffement du climat y apporte sa contribution, aux migrations planétaires des invisibles qui menacent.
Bref, comme me l'a dit naguère un collègue : le XXIème siècle sera le siècle des virus.
Tout se passe donc comme si, avec une certaine sagesse, les gouvernements préparaient doucement l'opinion publique à, plus ou moins long terme, une pandémie beaucoup plus grave, pandémie qui, puisque c'est éventuellement le cas déjà de la grippe A, pourrait toucher, nous dit l'Organisation Mondiale de la Santé, 30 à 40 % de la population de la planète.
30 % touchés par une grippette, ça peut aller. Mais s'il s'agit d'un virus particulièrement meurtrier...
D'où, c'est en tout cas mon avis, toutes ces précautions que l'on nous pousse, par anticipation, à prendre. Il est vrai que si la nature a horreur du vide, elle a aussi sa manière bien à elle de gérer l'hyperinflation des espèces...

Patrice Houzeau
Hondeghem, 12 août 2009

 

 

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6 août 2009 4 06 /08 /août /2009 05:16

LE SCANDALE

Ces derniers jours, beaucoup d’indignation d’un peu partout pour dénoncer le retour des bonus pharaonesques distribués par les banques à leurs traders. Les banques anglo-saxonnes avaient déjà annoncé qu’elles s’apprêtaient à récompenser grassement leurs meilleurs spéculateurs professionnels ; et voilà que l’on apprend que, dans notre France si bien pensante, la BNP s’apprêtait à faire de même (à hauteur de 1 milliard d’euros, dit-on, fichtre !). Du coup, cris d’orfraie à gauche, et même à droite pour fustiger une pratique qui, nous déclare-t-on sans rire, consiste à persister dans un système qui, via la crise dite des subprimes, a causé la faillite de la finance mondiale (rien que ça !).
Mes doux agneaux, la crise des crédits hypothécaires américains n’est jamais que l’éclatement d’une bulle spéculative, exactement comme on crève un abcès. C’est spectaculaire mais pas mortel, et, en tout cas, pas pour le système libéral mondialisé qui en a vu d’autres et qui prouve maintenant que c’est lui, toujours et encore, le plus fort.
Alors, vous me direz, ce n’est pas juste, les Etats ont prêté beaucoup d’argent à toutes ces banques, et donc anticipé sur les impôts à venir, et à peine recommencent-elles à dégager des bénéfices, qu’elles redistribuent une partie de cet argent à ceux qui justement sont responsables de l’éclatement de la bulle spéculative de l’immobilier... Eh oui, ce n’est pas juste, surtout si l’on pense qu’au même moment, on s’apprête à faire rembourser des aides à des agriculteurs et à des marins-pêcheurs déjà étranglés par la concurrence internationale…
Ce n’est pas juste, mais qui a dit que l’économie était affaire de justice ? Car le vrai scandale n’est pas dans les bonus reversés aux traders. Les banques ne peuvent tout simplement pas faire autrement que de rétribuer le mieux possible des personnes qui exercent ce métier difficile de prévoir à court terme ce qui va se passer sur les marchés. Imaginez que les banques françaises décident de plafonner de façon significative les fameux bonus en question, eh bien, elles risquent de perdre leurs meilleurs employés débauchés immédiatement par la concurrence anglo-saxonne ou asiatique. De plus, que fait un employé lorsqu’il s’estime floué ? Eh bien, au mieux, il fait un peu moins d’efforts, au pire, oh… c’est vrai que c’est le genre d’informations dont on ne parle pas dans les journaux, mais figurez-vous que le double jeu existe en économie comme ailleurs, et qu’il arrive que certains cadres supérieurs et autres éléments clés de la stratégie d’entreprise soient, disons… influencés par la concurrence pour un petit peu saboter le boulot… Donc, que les bonus hyper élevés reviennent, ce n’est jamais que l’application toute simple de la loi de l’offre et de la demande : le talent spéculatif est rare et précieux, donc il est très cher, et voilà tout…
Pas de scandale alors ? Eh si, quand même… Car, alors que la France se désindustrialise à toute allure, que les salaires stagnent, que les signatures de Contrats à Durée Indéterminée tendent à devenir exceptionnelles, que la consommation ne progresse pas et que la dette publique de la France commence à devenir préoccupante, sans parler du gâchis de la formation professionnelle (tant d’argent dépensé à quoi ?) et de la frustration croissante des surdiplômés qui, décidément, trouvent de moins en moins leur place dans une société où les universités, et même certaines « grandes écoles », leur ont largement raconté des bobards quant à la valeur marchande de certains diplômes, comment comprendre que les banques continuent à gagner autant d’argent ?… Eh ! C’est que le marché est mondial, voyez-vous, et que donc, ça commence à drôlement être intéressant que d’investir dans des entreprises ou des activités délocalisées en Inde, en Chine, au Brésil, dans les ex-pays de l’Est, et partout où les salaires sont bas, voire misérables, les fiscalités avantageuses, les syndicats inexistants et le droit du travail balbutiant. Après, tout est dans le produit financier que l’on vend au brave client qui a des économies et qui a voté à droite, mais avec un cœur un petit peu à gauche quand même, vu que, tout de même, la fonction publique, ça a du bon aussi... Pour l’instant, on reste modeste, mais vous allez voir, d’ici quelques mois, comme ils vont en fabriquer des portefeuilles folkloriques avec des actions bien rassurantes et un peu de truc-machin-chouette indo-chino-brésilien-suisso-turkmène (on est pas à ça près) éparpillé que vous vous en rendrez même pas compte… Et puis, l’économie ayant horreur du vide, que faire quand une bulle vient d’éclater ? On en prépare une autre, pardi ! Et pourquoi pas l’écologie ? C’est porteur, ça, l’écologie ! C’est populaire en plus ! Allez, on va en fabriquer des machines à dépolluer, à économiser, à énergétiser propre, à durabiliser plus, on va en construire des maisons bien aseptisées, bien claires et nettes comme le sourire d’un présentateur télé ; on va en faire voter des lois pour obliger les récalcitrants, - oh les mauvais citoyens -, à se mettre aux normes ; on va en faire faire des déclarations aux bonnes âmes, y a pas besoin de les influencer, elles s’écoutent parler toutes seules, les bouches d’or du développement durable, les gentils zozos de la décroissance, les chevelus de l’alternatif ; et puis, on va en prêter des sous, à tous ces braves gens pour qu’ils puissent se la payer, leur tirette électrique, leur maison écolo-économe, leurs produits du marché bio sponsorisé par nous autres, les banques, toujours plus proches de nos clients, c’est-à-dire de leur argent. Et puis, quand ça éclatera, à force de prêts, de saturation du marché, d’escroqueries diverses et de règlements de comptes, et bien, l’Etat viendra à notre secours, et on recommencera…
Et si l’Etat n’est plus assez crédible, ce sera l’Europe, et plus tard même, la Gouvernance Mondiale… Alors là, c’est sûr, nous serons les Maîtres du Monde.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 6 août 2009

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14 juillet 2009 2 14 /07 /juillet /2009 12:36

TOUT FLATTEUR...

"Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l'écoute" : a écrit Jean de la Fontaine dans Le Corbeau et le Renard. C'est ce que j'ai pensé lorsque, hier soir, lundi 13 juillet 2009, j'ai entendu ce proviseur d'un grand lycée parisien affirmer sans rire que remettre en cause la légitimité du chiffre de 86% de reçus au baccalauréat 2009 revenait à, je cite de mémoire, "injurier tous ceux qui avaient préparé le baccalauréat et l'avaient obtenu."
Monsieur le Proviseur, nous n'injurions personne. Nous nous demandons seulement si un tel nombre de reçus correspond réellement à une hausse du niveau général des bacheliers ou à une baisse d'exigence des examinateurs. C'est vous, Monsieur le Proviseur, qui vous moquez du monde en suggérant que tous les reçus au baccalauréat 2009 auraient  le niveau requis pour suivre des études supérieures.
Vous savez aussi bien que moi que l'obtention généralisée du baccalauréat revient à remplir les amphithéâtres d'étudiants par défaut (le baccalauréat n'étant plus depuis longtemps un moyen d'accès à l'emploi), et donc revient à nourrir la crise latente des universités. En outre, un nombre de plus en plus élevé d'étudiants masque la réalité de la situation réelle de l'économie (les personnes en formation n'étant pas comptabilisées dans les statistiques du marché de l'emploi), contribue à l'augmentation des loyers (suivant la loi du rapport de force entre l'offre et la demande), aggrave la dette de l'Etat (il s'agit quand même, Monsieur le Proviseur, de dépenses publiques), tend à dévaloriser la valeur de certains diplômes de l'enseignement supérieur, tend à la déqualification de nombreux emplois (il est que l'on trouve de plus en plus souvent de surdiplômés sans emploi ou occupant un emploi précaire ou peu rémunéré), tend à bloquer la promotion interne des personnels peu ou pas diplômés (c'est ainsi que de nombreux diplômés se retrouvent, - c'est souvent le cas dans la fonction publique -, à occuper des postes à responsabilités alors qu'ils n'en ont ni l'expérience, ni même parfois les qualifications requises), tend à la frustration de nombreux étudiants qui, d'ici quelques années, chargés de diplômes comme un mulet peut l'être de bagages, se retrouveront sans emploi sur un marché mondialisé où des salariés étrangers, peut-être moins diplômés mais plus expérimentés, occuperont cette place que vous semblez, Monsieur le Proviseur, leur promettre.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 14 juillet 2009

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8 juillet 2009 3 08 /07 /juillet /2009 14:19

IDENTITE DU FONCTIONNEL

Identité du fonctionnel. Le fonctionnel s’oppose au singulier. Par extension, l’administratif tend à exclure le cas particulier. L’utile, dont la légitimité est toute entière dans la garantie de la pérennité de la gestion des vivants et des morts, s’oppose à l’inutilité du point de vue particulier. La démocratie formelle tend ainsi à l’hyperbole de l’administratif : par exemple, le modèle français de la démocratisation de l’enseignement supérieur trouve sa légitimité dans son seul énoncé (le mot « démocratisation »). Ce faisant, il exclue toute critique qui viendrait du personnel politique, garant de la pérennité des institutions. Ainsi, la « démocratisation de l’enseignement supérieur » tend à pérenniser et à sur-légitimer les institutions de l’éducation nationale et des universités. Dès lors, les critiques contre le nombre anormalement élevé de diplômes délivrés, le manque de débouchés de bon nombre de filières prétendument professionnelles, la promotion, sous couvert « d’éducation à la citoyenneté » d’une idéologie égalitariste et étatiste, et la généralisation d’un « politiquement correct » hypocrite et ambigu, ne viennent que rarement du champ politique alors qu’elles sont maintenant courantes dans l’opinion publique. Il est à noter que bon nombre d’intellectuels, de droite comme de gauche, au nom d’un humanisme de bon ton, tendent à soutenir cette surlégitimation de l’éducatif. Ainsi, la France persiste-t-elle, par pur dogmatisme, dans l’illusion d’une  puissance économique   liée à un niveau élevé de culture générale, et se prive de la nécessité des spécialisations et du pragmatisme induit par l’expérience du terrain. Il est à craindre que le développement rapide de nouvelles puissances industrielles et commerciales, comme la Chine, l’Inde et le Brésil, lui apprenne bientôt à restreindre ses prétentions.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 8 juillet 2009

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21 juin 2009 7 21 /06 /juin /2009 10:52

LA FARCE VIRE AU TRAGIQUE

Juin 2009 : A relire à la lumière des événements actuels et du courage de ceux qui s'opposent, - depuis huit jours, manifestations quotidiennes au péril de la vie des manifestants, c'est que l'on ne badine pas avec la théocratie dans la République islamique - qui défient l'actuel bouffon dictatorial qui vient d'être, avec beaucoup de doutes quant à la régularité des élections, réélu à la tête de l'Etat iranien. 

SALVATEUR ECLAT DE RIRE

C'était il y a quelques jours, - nous sommes à la fin septembre 2007 -, le Président de la République Islamique d'Iran, qui avait à faire aux Nations Unies, était l'invité de la prestigieuse université de Columbia.
Conférence devant une salle remplie d'étudiants puis séance de questions (il faut bien avoir l'air de vouloir dialoguer !).
L'un d'eux pose la question de la répression des homosexuels en Iran, laquelle répression est, nous dit-on, féroce. (1)
Réponse de Monsieur Mahmoud Ahmadinejad, Président de la République Islamique d'Iran :
- "Vous savez, le problème ne se pose pas, car, contrairement à ce qui se passe aux Etats-Unis, je dois tout de même vous dire qu'il n'y a pas d'homosexuels en Iran." (2) (je cite de mémoire d'après ce que j'ai entendu à la télé, mais le contenu, je vous l'assure, y est). (3)
Eclat de rire de la foule des étudiants.
Evidemment.

Ah ! qu'il est salvateur, qu'il est réconfortant, ce rire des étudiants face au dictateur venu tout exprès de sa Perse lointaine pour passer pour une sinistre andouille.
Ce rire des étudiants américains, vous savez, il finira par le faire tomber, le dictateur.
Ce rire des étudiants américains, c'est une illustration de l'effet papillon : petite cause, grands effets. Il s'inscrit dans la suite de toutes les insolences, les impertinences, les salutaires bouffonneries qui, prenant l'esprit de sérieux et l'intolérance religieuse pour cible, finiront par les démasquer, les bons croyants, les hommes de sainteté qui utilisent le nom de Dieu pour justifier tortures et massacres.
Regardez l'Eglise catholique : deux ou trois siècles d'insolences, quelques volumes de Rabelais, de Voltaire, quelques dizaines de chansons paillardes et plus personne ne prête attention aux opinions du pape en matière de moeurs (4), et il n'y a plus que les naïfs pour se marier puceau-pucelle.
Il en sera de même pour le fondamentalisme musulman, il finira par tomber tout seul, lapidé de moqueries, agoni de caricatures, percé de toutes parts de traits d'esprit. (5)

Notes
:
(1) Qu'elle soit féroce ou pas, il suffit qu'il y ait répression pour que tout être de raison soit légitimé dans son droit d'intervenir.
(2) Chacun sait, bien sûr, qu'il y a, de par la volonté du Tout Puissant, deux sortes d'êtres en Iran : les barbus, que l'on appelle aussi "hommes",  et les non-barbus, que l'on appelle "femmes".
(3) Je lis ceci sur le site du Nouvel Observateur : "En Iran, nous n'avons pas d'homosexuels. Nous ne connaissons pas ce phénomène, je ne sais pas qui vous a parlé de cela", qu'il a dit, le tartuffe.
(4) Cependant qu'il continue à jouer un rôle politique non négligeable, comme on l'a vu avec Jean-Paul II, lequel les a bien roulés, les petits chefs communistes de Pologne et d'ailleurs.
(5) Il paraît que certains se sont offusqués, arguant du faible niveau intellectuel de l'individu, de l'invitation faite par l'Université de Columbia à Monsieur Mahmoud Ahmadinejad, Président de la République Islamique d'Iran. Au contraire, c'est justement ce qu'il fallait faire : "mettre le roi à nu" ! Pour une fois, on a osé lui rire au nez ; pour une fois, on n'a pas pris un ton de circonstance diplomatique pour s'adresser à lui ! L'Université s'est payé sa fiole ! Qu'elle en soit remerciée !

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 26 septembre 2007

Commentaires

Il est très rare en vérité je vous le dis que les barbus me fassent rire. Mais là... et en plus il a la tête de dangereux abruti qui va avec sa bêtise.

Réjouissant.

Posté par Chris, 26 septembre 2007 à 18:16

Hé oui!Comme le peuple (où est-il?) l'université (elle est là!)est un garde-fou! c'est pourquoi ele doit ête privilégiée tandis que le spoit doit être promu avec la culture! Il n'y a pas assez de savants! La république a besoin de savants! pour contrer le monde bourgeois du fric, du libéralisme... Et l'université agace...Mais elle est raison ardente,même dans sa folie! Vive Rabelais,l'universitaire! Vivent les Goliards! Vive Gandhi, même,pur produit des humanités copurchic britanniques et si peu Indien! Vive Joe Dassin! Alma Mater: on manque d'étudiants! La ménagère doit apprendre à gouverner l'Etat! L'ignorance est une impolitesse, voire une agression incivique! Pas de vie active avant Bac+5: c'est de l'exploitation agravée puisqu'on n'a pas la distance par rapport aux luttes planplan des syndicats insuffisants! Ca il faut le savoir,la culture pour agir cruellement contre les patrons! Tous dangereux! Tous pires que les gauchistes!
Mais ne tombons pas dans l'excès: je pense qu'il serait hors de propos d'envoyer une mission d'information et de coopération en Iran pour enseigner l'homosexualité, théorique et pratique sous l'égide d'éminents spécialistes, à cette bande d'ignorants qui ne savent pas ce que c'est! Il y a des limites à l'entraide entre les peuples! Non mais des fois!
Posté par ruru, 27 septembre 2007 à 09:01
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20 juin 2009 6 20 /06 /juin /2009 18:06

NOTES ANTI-PEDAGOGISTES (20 juin 2009)

Replâtrage.
En tentant de concilier culture et économie, projet culturel et marché de l’emploi, les théoriciens du B.E.P. (diplôme qui, dans sa forme actuelle, est condamné) ont jadis commis une erreur lourde de conséquences.
Les Lycées Professionnels constituent un outil de développement économique et non de replâtrage culturel.

Professionnalisation.
J’imagine des filières de professionnalisation des métiers de la culture non pas seulement pos-baccalauréat mais aussi avant le bac, au niveau du lycée. On pourrait y former les futurs techniciens de la culture (ingénieurs du son, créateurs et administrateurs de sites internet, monteurs, graphistes, etc…) et cela sans attendre l’obtention d’un bac dit « général » dont on voit maintenant qu’il sert trop souvent à remplir les amphithéâtres de filières universitaires honorables et pauvres en débouchés professionnels ; du reste, elles ne sont pas faites pour ça.

Du modèle républicain.
L’échec actuel d’une grande partie du système éducatif français relève de ce qu’il est moins un outil de formation qu’un instrument de promotion du modèle républicain.
S’il ne se réforme pas, il sera battu sur son propre terrain et ouvrira malgré lui la porte à tous les communautarismes.
Une école sans influence autre que celle de l’intérêt administratif de la nation, une école au service de l’intégration républicaine, cela peut se concevoir. Dès lors, ce modèle dominant devra laisser à d’autres types d’établissements (Centres de Formation des Apprentis, établissement privés, institutions communautaristes) le soin de former la main d’œuvre de demain.

Multiplication des symboles.
Michel Tournier dans Le Roi des Aulnes remarque que l’hyperinflation symbolique annonce un effondrement événementiel et critique des valeurs, ce que l’on appelle aussi une catastrophe.
C’est donc le processus de symbolisation de tout qui condamne l’humanité.
A moins que nous acceptions de vivre avec un nombre limité de symboles.
La religion est justement cette limitation du nombre des symboles au service de la destruction de tous les autres.

Religiosité laïque.
L’école intégrationniste tend à limiter le nombre de symboles et, comme le montrent par exemple les imprécations de Philippe Meirieu contre les idôlatries de la télévision et la société marchande, critique furieusement l’hypersymbolisation de la société de consommation (par exemple, la « tyrannie des marques »). En cela, l’école intégrationniste tend au religieux, à la croyance en une sainteté laïque d’où, sans nul doute, sortiront les futurs Robespierre et autres tenants d’une terreur révolutionnaire basée, évidemment, sur des notions aussi hypocrites que « l’ordre juste », le « pacte républicain », la « bonne gouvernance », l’obligation de la « décroissance » et autres vertes et roses billevesées.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 20 juin 2009   

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20 juin 2009 6 20 /06 /juin /2009 17:52

L'ILLUSION INTEGRATIONNISTE

Entendu hier, vendredi 28 juillet 2006, sur France Culture, le philosophe Michel Onfray établir un distingo intéressant entre Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin.
En effet, selon Michel Onfray, les deux hommes s'opposent radicalement sur le terrain de l'intégration.
Contre l'intégrationnisme assez naïf de Dominique de Villepin (1) et d'une grande partie de la gauche, Nicolas Sarkozy aurait parfaitement compris que l'on ne peut sans dommages masquer les spécificités des communautés. Il est donc assez vain de proclamer que, par exemple, tous les élèves, quelque soit leur origine, peuvent à plus ou moins long terme se fondre dans le modèle laïc et républicain si vanté par les pédagogistes à la Meirieu (Philippe) et dont on a vu le succès éclatant lors des violences urbaines de novembre 2005 (2).
A mon sens, ce modèle laïc et républicain est souvent dommageable aux communautés. Ainsi, les homosexuels et les lesbiennes furent longtemps victimes d'une vision républicaine et scolaire centrée autour de la famille et qui donc excluait, ou plutôt refusait de voir que les moeurs étaient un domaine infiniment plus complexe que ce qu'en disaient les prêtres et les leçons de morale. De même, les filles furent longtemps cantonnées aux études courtes et les égalitaristes de la pédagogie ont longtemps nié l'existence d'enfants au développement intellectuel précoce et s'opposèrent même parfois à la création de cours adaptés aux cas des surdoués, lesquels surdoués n'arrivaient pas toujours à s'intégrer et souffraient donc terriblement dans leurs petits collèges bien étriqués et si "familiaux", n'est-ce pas ? (3)

On me dira : Oui, mais Houzeau, les choses ont bien changé et les pédagogistes que vous détestez oeuvrent justement dans le sens de la tolérance et du respect d'autrui.
Eh oui ! justement, ils font de la tolérance et c'est bien ça qui m'importune !
Je m'en fiche moi de leur tolérance de "bonnes âmes" ! Je n'en veux pas du pédagogue au grand sourire bien humain, avec barbichette syndicale en option, qui expliquera à ses élèves que l'homosexualité n'est pas une déviance mais une orientation sexuelle aussi naturelle que l'hétérosexualité (4).
Cet aimable prosélyte intégrationniste, je le mets dans le même sac que le facho de base qui pense qu'il faut les interner, les tantouzes et les gouines et, pour ma part, - et je sais que je vais vous choquer -, je n'en veux pas d'amis homosexuels ou lesbiennes because je les supporte pas, c'est tout.
Et je réclame aux pédagogistes et aux républicains si généreux avec la tolérance des autres le droit de ne pas apprécier les homosexuels, les lesbiennes, les gens qui ne parlent pas la même langue que moi, ceux qui viennent d'un autre pays que le mien, ceux qui ont une autre religion que la mienne.
Oh bien sûr, ne vous inquiétez pas, je n'ai rien contre toutes ces personnes et la richesse même de notre société occidentale dépend  de leur présence, de leur apport, de leurs différences elles-mêmes - et cela apparaîtra avec de plus en plus d'intensité au fur et mesure que les problèmes liés à la mondialisation se feront de plus en plus aigus -.
Je le sais, je le comprends, je l'admets.
Mais, soyons francs, qui d'entre nous ne pense pas quand il parle avec un protestant que ses paroles, justement, sont bien austères. Et quand nous nous rappelons que notre beau-frère est d'origine italienne, nous nous disons, pour nous-mêmes, à voix cachée, que c'est bien là une attitude de macho méditerranéen que de refuser à sa femme le droit de se promener toute seule dans la rue. Et ainsi de suite pour les Bretons têtus, les Flamands bouffeurs de patates, les Espagnols si fiers, les Polonais si buveurs, les Américains si ignares, les Japonais si polis et les Chinois si jaunes.
Tout cela, nous le pensons mais ne le disons pas.
Sauf quand on est en colère ou que l'on a trop bu.
Aussi, je suis parfaitement d'accord avec la vision communautariste que Michel Onfray suppose à Nicolas Sarkozy. L'on se doit de considérer les individus, et donc les élèves, non en fonction de je ne sais quelle lutte de classes - modèle marxiste auquel certains pédagogistes semblent continuer à adhérer en dépit de l'échec total de toutes les expériences collectivistes -, mais en fonction de leurs qualités et spécificités particulières, lesquelles dépendent moins du conditionnement social que du conditionnement culturel.
En ce sens, je donne raison aux Anglais qui considèrent que le turban porté par les élèves Sikhs ne dénonce en rien le contrat scolaire passé entre l'institution et son public. Quant au voile des élèves musulmanes, je trouve personnellement assez normal qu'elles puissent le garder en classe (5). Au moins, comme ça, les choses sont claires et l'on évite une partie de ce double discours que tout le monde se croit obligé de tenir afin de sauver les apparences.

NOTES
:

(1) On peut ainsi faire une lecture intégrationniste des projets du CNE (Contrat Nouvelle Embauche) et CPE (Contrat Première Embauche) que Dominique de Villepin a initiés. Il s'agissait de chercher à intégrer la communauté actuelle des jeunes demandeurs d'emplois en assouplissant en faveur des employeurs les conditions de licenciement et en allongeant jusqu'à deux ans la période d'essai. On voit à l'énoncé même de ces projets qu'ils étaient destinés à échouer. Il est à noter que la communauté étudiante s'est fortement mobilisée contre le CPE et a même réussi à faire reculer le Premier Ministre. Notons aussi que Nicolas Sarkozy a assez vite émis des réserves sur l'opportunité d'un tel projet.

(2) Philippe Meirieu sur son blog dénonce l'expression "émeutes urbaines" comme étant en l'occurrence exagérée. Certes, rien de comparable avec les antifada palestiniennes mais tous les salariés qui vivent en banlieue et qui ont vu leur voiture partir en fumée ont bien dû penser que ces "violences urbaines" ressemblaient plus à un début d'émeute qu'à un chahut d'étudiants.

(3) Ce refus de différencier les capacités des élèves est cependant plus le fait des "Républicains" que des "Pédagogistes" auxquels on doit une excellente pratique : celle de la pédagogie différenciée. Il s'agit de travailler non pas en fonction d'un ensemble classe que l'on s'obstine à croire homogène, - au besoin en en faisant taire les contestataires -, mais de travailler en fonction des pré-requis et des difficultés de chaque élève. Cette excellente vision des choses amène rapidement l'enseignant à penser en termes d'ateliers pédagogiques en fournissant à chaque élève (ou groupe de remédiation) une batterie d'exercices qui peut lui permettre de surmonter ses difficultés. Une classe est ainsi divisée en autant d'ateliers différents qu'il y a de problèmes. La préparation des exercices étant un travail assez astreignant, l'enseignant est ainsi amené à penser en termes d'équipe pédagogique, de ressources communes, etc...
Ah tiens, oui , je dis du bien des pédagogistes.
Cependant, il me faut ajouter que l'excellente idée de la pédagogie différenciée s'oppose à deux stupidités théoriques de la même école pédagogiste :

- la progression commune par niveau qui tend à obliger les professeurs d'une même discipline et d'un même établissement à établir au début de l'année une progression commune de leurs séquences pédagogiques afin que toutes les classes, à la fin de l'année, aient suivi le même programme, étudié les mêmes textes et subi les mêmes épreuves (dites "épreuves communes"). Je me souviens d'avoir officié dans un collège difficile où mes très obéissants collègues suivaient à la lettre ce dogme de la progression commune. Donc, en début de semaine, je trouvais dans mon casier les polycopiés tout prêts avec leurs exercices et synthèses de cours. L'étude suivie d'une oeuvre portait sur Cyrano de Bergerac de Rostand  (marrant parfois, assez niais souvent et sans réelle profondeur mais bah ! les professeurs de français ont souvent mauvais goût en matière littéraire). Le hic c'était que ma classe était une fausse classe de troisième générale ; elle l'était certes administrativement mais en fait, c'était une classe de type troisième techno (avec ses qualités et ses défauts). Du coup, - et je les comprenais parfaitement -, ils en avaient rien à secouer de Cyrano et d'ailleurs de la plupart des objectifs fixés par le collègue superviseur qui lui avait en charge - évidemment ! -, la classe des latinistes.
J'ai donc rapidement envoyé balader la progression commune. Mes très obéissants collègues s'en sont émus, m'en ont fait grief puis devant ma nonchalance méprisante, sont allés cafter auprès du principal d'où embrouilles, coups de gueule et mauvaise humeur de part et d'autre.
Rien de plus éloignée donc de la pédagogie différenciée que cette progression commune.

- La progression par objectifs n'est pas moins stupide et a d'ailleurs été dénoncée par himself Philippe Meirieu dans un éclair de lucidité et un entretien accordé au Monde de l'Education, il y a quelques mois, et si je ne m'abuse, à l'occasion de la publication de Lettre à un jeune professeur (le titre à lui seul indique le degré d'humilité de l'auteur ainsi qu'une tendance  au paternalisme  qui me donnent évidemment, immédiatement, irrépressiblement envie de lui rire au nez !). La progression par objectifs est l'antithèse de la pédagogie différenciée : il s'agit de fixer des objectifs à atteindre en se basant sur les pré-requis des élèves. Autrement dit, la classe progresse par paliers successifs (le formatif que ça s'appelle chez les utilitaires de la pédagogie) et l'on ne peut passer au niveau suivant tant que la majorité de la classe n'a pas atteint le niveau requis, c'est-à-dire n'a pas réussi à obtenir la moyenne de classe au contrôle (le sommatif qu'ils appellent ça, les comiques subventionnés). Philippe Meirieu lui-même a déclaré (si ! si ! je l'ai lu) que cette progression par objectifs ralentissait très souvent le rythme des classes et pouvait même décourager les meilleurs élèves obligés d'attendre leurs petits camarades moins doués (ou plus distraits). C'est d'autant plus vrai que les pédagogistes sont en faveur de l'hétérogénéité des classes afin sans doute que les plus rapides se rendent compte de la chance qu'ils ont d'être ainsi si vifs alors que tant de gamins ne viennent à l'école que parce que c'est prévu par la loi et les allocations familiales.
Bon, Philippe Meirieu a fait amende honorable, - c'est bien ! - mais, au nom de cette vérité d'hier devenue erreur aujourd'hui,  combien d'enseignants un peu trop individualistes se sont-ils faits rappeler au bon ordre de la progression par objectifs par des inspecteurs aussi théoriques que pontifiants ? Combien de professeurs se sont-ils vus reprocher par leurs chef d'établissement de ne pas afficher des moyennes trimestrielles positives alors que, n'est ce pas, si la progression par objectifs avait été faite comme il le fallait, nul doute que même la plus rétive des classes aurait dû réussir à la comprendre, cette chanson de Cabrel qu'on a donnée en épreuve commune ! Jusqu'au relativement inutile et souvent très mêle-tout C.O.P. (Conseiller d'Orientation Psychologue, - Attention, danger !) que j'ai vu ramener sa fraise en conseil de classe pour reprocher aux enseignants de décourager les élèves en leur mettant des notes trop basses !

(4) D'ailleurs, ce caractère "naturel" des orientations et pratiques sexuelles me semble sujet à caution.

(5) Sous réserve évidemment que ce port du voile soit la conséquence d'un choix délibéré de la part de l'élève et non l'effet d'une contrainte familiale ou communautariste (contrainte qui me semble, concernant le port du voile, assez inévitable). Pour faire amende honorable, il semble qu'en France l'ensemble des dispositifs sur l'interdiction du port de signes "distinctifs" ait fonctionné assez bien et qu'il ait permis d'éviter bon nombre de conflits. On observera donc la plus grande prudence dans ce domaine ; il serait stupide que, par idéologie, l'on supprimât un dispositif qui a fait ses preuves pour le remplacer par des décisions aventureuses et dogmatiques. Laissons cela aux socialistes : ce sont des spécialistes de ce genre d'erreurs.

Lien utile
: Si ce sujet de l'intégration vous intéresse, je ne peux que vous renvoyer au très intéressant texte de Véronique De Rudder que vous trouverez à l'adresse suivante :
http://www.islamlaicite.org/article111.html


Patrice Houzeau mais-non-je-ne-suis-pas-fasciste
Hondeghem, le 29 juillet 2006

Commentaires

L'intégration a toujours réussi avec des situations conflictuelles aussi graves qu'actuellement! Les textes facistes ou autres qui la refusaient sont exactement les mêmes qu'aujourd'hui compte tenu du style de l'époque.Les premier "émigrés" bretons étaient déjà considérés comme trop fanatiques religieusement... le discours est le même et ça s'arrange. Moi, les homos, j'y suis habitué. J'en connais et ça a commencé par Francis Poulenc, Cocteau, Jean Marais et j'en passe... Ils m'ont beaucoup apporté. Sur le port du voile, ce qui peut d'ailleurs s'étendre à d'utres signes, on aura profit à lire ce que ma soeur a écrit à ce sujet. C'est sur:
http://www.islamlaicite.org/article111.html
Bien sûr, né à Rome d'une mère à demi péruvienne et d'un père flamand, mais parisien, je n'ai guère de problèmes avec les émigrés d'ailleurs. Ma grand-mère, ça commença avec Apollinaire. Plus modestement, j'aime bien Rachid Mimouni, hector Biancchiotti entre autres. Le problème n'est pas dans les gens émigrés mais dans l'acceptation ou non de leur existence. Et, aujourd'hui, c'est grave!
On a raté Sangatte: pas mal d'ingénieurs de haut niveau, des scientifiques qui sont partis...Pendant que nos autochtones s'enfoncent dans une médiocrité affligeante!
Parfois, je me dis qu'il y a bien parmi ces français "de souche" paresseux, torves, incapables que l'on devrait reconduire à la frontière.Mais laquelle? Celle du néant mental d'un département sinistré?
Mais, patience! Avec le fascisme libéral, l'Amérique va devenir invivable pour les artistes, les savants, les poètes! Ils vont peut-être devoir immigrer.en France,par exemple. alors, ce sera chouette:ils inventeront le cinéma français comme les Hongrois, Polonais, Russes, etc. ont onventé le cinéma américain (avec des westerns dont la musique était souvent résolument slave!)...
Cependant, ça se passe déjà: la littérature malienne immigrée, comme celle du Maghreb en France se crée... c'est un peu comme la naissance du blues: on ne voit rien, mais ça bouge... Une culture naît! Ne l'ignorons pas! Elle sera féconde comme toujours quand il y a immigration! Elle secoue l'inertie et vogue la caravelle! C'est un espoir formidable! Au lieu de l'assumer, on préfère suicider le pays en refusant cette chance fabuleuse! Celle qui a toujours permis un envol!

Posté par orlando de rudde, 29 juillet 2006 à 18:17
ABSOLUMENT D'ACCORD

Absolument d'accord avec toi, Orlando, et tu as saisi je pense qu'elle était la part de provocation dans mon article.
Ce qui m'agace, c'est le discours béat de certains très "belles âmes" qui ne semblent pas voir à quel point les individus sont riches, denses d'une vie que la sociologie elle-même a du mal à définir et que c'est cette densité justement qui peut poser problème aux tièdes, aux bien assis du politiquement correct, aux dogmatiques du modèle républicain.
Quant aux Etats-Unis, certaines de leurs villes proches de la frontière mexicaine sont maintenant majoritairement peuplées par des latinos qui s'en sortent plutôt bien, qui ont envie de s'en sortir aussi bien que les WASP et multiplient les associations et les initiatives communautaristes.

Patrice Houzeau

Posté par Patrice Houzeau, 29 juillet 2006 à 22:17
Et bien...

"Jusqu'au relativement inutile et souvent très mêle-tout C.O.P. (Conseiller d'Orientation Psychologue, - Attention, danger !) que j'ai vu ramener sa fraise en conseil de classe pour reprocher aux enseignants de décourager les élèves en leur mettant des notes trop basses !"

Et bien, COP de mon état, je ne sais comment prendre ce réquisitoire, ou plutôt si, je ne le sais que trop bien... Compte tenu qu'il ne fait que délayer les miévreries d'usage à l'encontre des personnels d'orientation, et autres idées reçues, prêts-à-penser que vous vous faites forts de relayer, bien loin du moindre début de conception originale. Ces lignes sont un tissu d'imbécillités, compte tenu du fait que :

1)les prérogatives de la fonction de COP lui assurent le droit le plus absolu de participer à un conseil de classe, et de peser sur les décisions d'orientation. Les professeurs, ne vous en déplaise, ne sont pas les seuls juges, et c'est parfois très heureux ! Il ne s'agit pas de "ramener sa fraise", c'est bien plus que cela, cessez de vous prendre pour le roi de l'école.

2) "relativement inutile", c'est vous qui le dites, car cela m'amène à penser que vous n'avez jamais été professeur principal de troisième ou de seconde (vous savez, les paliers d'orientation). Ou alors, vous ne l'avez été que pour toucher l'ISO, et c'est marre.

3) "souvent très mêle-tout", absolument pas, nos missions sont clairement définies, vous n'avez qu'à vous y intéresser avant de nous prendre à parti.

4) Question résultats scolaires, vous semblez ne pas tenir compte du fait que le système d'affectation à la Française se base quasi exclusivement sur les notes. Et bon nombre de vos confrères, dont vous, semblent persister dans l'ignorance volontaire de cette REALITE. Désolé, ce ne peut être le cas pour le COP, qui n'est en aucun cas responsable de cette organisation, mais qui se doit d'aider l'élève à se sortir au mieux de ce dédale.

5) Si je devais casser du sucre sur le dos de vos collègues et de vous-même chaque fois que je reçois en entretien un élève dont le niveau en telle ou telle matière est faible, alors que votre mission première est d'assurer ces apprentissages, je serais fâché avec les équipes éducatives depuis longtemps. Ce n'est pas le cas, nous travaillons en sympathie et en bonne intelligence. Gardez votre aigreur pour les vrais responsables du gâchis que vous observez.

A bon entendeur, salut.

P.S. : si vous pouviez exposer des théories un peu novatrices, pour changer, au lieu de nous ressortir des arguments éculés... Enfin, on fait l'école de demain avec les idées d'hier, et les moyens d'avant-hier, n'est-ce pas ?

Posté par shaolin, 27 novembre 2006 à 23:48
POUR SHAOLIN

Je ne vois pas ce qu'il y a de choquant à se baser sur les notes pour déterminer si un élève peut ou non poursuivre ses études. En conséquence, je ne vois pas au nom de quelle transcendance on affirme que tous les élèves doivent sortir de l'école avec un diplôme.
Désolé, mais je pense qu'un certain nombre d'élèves ne relèvent pas du système scolaire traditionnel et que, pour eux, l'apprentissage est sans doute la meilleure solution.
Vous défendez votre profession, et c'est tout à votre honneur, mais vous ne m'empêcherez pas de penser qu'il est absolument anormal qu'actuellement on remplisse les lycées généraux avec des élèves pour lesquels il serait bien plus judicieux de suivre une formation professionnelle.
J'ai travaillé en collège et j'ai souvent été surpris, et choqué, de la mauvaise image que l'on donnait des Lycées Professionnels aux élèves de troisième. L'orientation en LP y est souvent vécue comme une punition, un pis-aller, tandis que l'on ne cesse d'agiter la promesse du relatif prestige du Lycée général !
Résultat : les universités sont pleines d'éudiants dont on ne sait trop quoi faire tandis que certaines formations professionnelles (bâtiment, restauration,...) se vident bien que les débouchés existent !
Je n'ai pas encore entendu un COP dénoncer cet état de fait et j'ai souvent l'impression, - détrompez-moi si j'ai tort - que beaucoup de Conseillers suivent les consignes ministérielles et/ou rectorales : envoyer ce qu'il est administrativement possible d'envoyer d'élèves en seconde générale et le reste en LP.
Quant aux idées novatrices, je les laisse à Ségolène et Meirieu : il me semble que l'on n'a que trop innové déjà et pas assez formé de gens à exercer un métier. Ce qui, ne vous en déplaise, est la mission première, - et à mon avis la seule -, de l'école.

PS : Dois-je prendre ce " A bon entendeur, salut !" comme une menace ?

Patrice Houzeau
Hondeghem , le 29 novembre 2006

Posté par patricehouzeau, 29 novembre 2006 à 04:19
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20 juin 2009 6 20 /06 /juin /2009 17:21

 L'INDIVIDUEL ET LE SOCIAL 

      
Note sur quelques écrits de Philippe Meirieu 

  
       "L'apprentissage ne se décrète pas... et rien ne permet de l'imposer à quiconque. Tout apprentissage s'effectue, pour chacun, à sa propre initiative et requiert de sa part un engagement personnel : c'est le principe de liberté." (Philippe Meirieu, Bloc-notes à la date du 6 mai 2006, http://www.meirieu.com/)

Je n’ai pas de haine pour Philippe Meirieu. Si je le brocarde souvent, c’est qu’il fait autorité dans le paysage actuel de l’éducation nationale et qu’il est toujours assez vivifiant de se moquer de ceux qui font office de puissants.

Je n’ai pas de haine pour Philippe Meirieu mais, évidemment, moi qui me méfie beaucoup de l’Etat éducateur, j’ai donc presque toujours tenu en piètre estime cette immense machine à faire carrière que l’on appelle « Education Nationale » et le discours de ses idéologues, de droite comme de gauche d’ailleurs, m’insupporte.

Je n’ai pas de haine pour Philippe Meirieu mais il  paraît tellement « belle âme » parfois dans ses écrits, tellement convaincu que l’objectif des professeurs (les « pédagogues ») est de changer la société par la culture, le pipeau et le travail en équipe que je ne puis m’empêcher de sourire à certaines de ses phrases (par ailleurs, il écrit bien et rédige probablement ses livres tout seul au contraire des hommes politiques qui l’attaquent et qui signent parfois des textes qu’ils n’ont même pas lus; d'ailleurs, il ne fait pas de fautes d'orthographe, alors que moi, parfois...).

Evidemment, je me demanderai toujours en quoi le travail de l’enseignant devrait aider à changer la société ? J’ai l’impression que Philippe Meirieu a une vision un peu collectiviste, - ou coopératrice ? -de l’éducation ; je cite :

-
         "
Dans l'apprentissage, il est impossible de séparer l'individuel et le social : personne ne peut apprendre absolument seul et la manière d'apprendre révèle toujours une conception de la socialité, des rapports au savoir et au pouvoir. Il n'est aucune connaissance qui puisse être acquise en dehors d'une relation sociale et cette relation peut entretenir l'assujettissement ou, au contraire, permettre l'émancipation : deux démarches sont traditionnellement privilégiés dans l'histoire de la pédagogie pour leur « pouvoir émancipateur » : la démarche expérimentale et la démarche documentaire." (Philippe Meirieu, Bloc-notes)

Pour ma part, et je revendique cette subjectivité, je considère que l’enseignement d’un professeur est tout d’abord un service rendu à l’individu, en tenant compte de ses spécificités individuelles et non de je ne sais quel déterminisme socioculturel, certes bien connu des sociologues, mais dont je me fiche absolument dans ma pratique puisque l’élève en face de moi n’est pas le représentant d’une classe sociale mais un individu avec ses lacunes et ses qualités.
De ce fait, je ne me sens aucunement tenu à je ne sais quelle « démarche émancipatrice » ; mon but étant, sous forme de cours magistral et d’exercices, de donner à penser à chacun de mes élèves, je ne vois pas le rapport entre ce nécessaire développement de l’esprit critique et une quelconque relation de pouvoir autre que celle qui permet le bon déroulement du cours.
Ce qui n’implique pas que le cours doive être absolument silencieux ou qu’il ne puisse y avoir débat entre les élèves et moi, mais cette fameuse « démarche expérimentale », fort belle en théorie, n’est jamais qu’un épisode d’un cours bien construit et ne peut tenir lieu de séquence, en tout cas en Lycée général (où j’ai pourtant vu d’étranges choses comme ces notes de cours maigrichonnes prises par des élèves dont le professeur de français ne basait son étude des textes que sur un vague questions-réponses pénible autant pour lui sans doute que pour sa classe ; c’était une classe de première tout de même !) (1).

Quant à la "démarche documentaire", les fameuses « recherches » : on sait à quoi s’en tenir. Faites en-dehors des cours, elles donnent souvent le résultat suivant : un élève cherche et rédige la synthèse ; cinq copient sur le valeureux. Cette « démarche documentaire » n’est réellement efficace qu’en groupe (environ une demie classe) et dans le cadre d’une séance organisée au CDI par exemple. De plus, Philippe Meirieu écrit lui-même que « l’apprentissage ne se décrète pas » et qu’en conséquence « rien ne permet de l’imposer à quiconque ». Voilà une phrase qui me fait plaisir et je me demande bien au nom de quelle bonne conscience professionnelle on irait imposer à un élève une recherche qu’il n’a pas envie de faire. En pratique, beaucoup d’enseignants procèdent de la façon suivante : ils donnent les consignes de recherche à faire, ferment plus ou moins les yeux sur les travaux un peu trop semblables et sanctionnent d’un zéro le travail non rendu, tout en sachant que « oh et bien, ce n’est pas étonnant, celui-là, de toute façon, il ne rend jamais rien ! » ; variante pédagogiste : « celui-là, de toute façon, il ne s’intéresse à rien ! ».

Post-Scriptum
: Ce "pouvoir émancipateur" devient même assez problématique quand il s'agit de travailler avec des élèves d'origine étrangère dont les habitudes de pensée, les opinions communautaires s'opposent au contenu même du cours.
Un exemple que beaucoup de professeurs d'histoire-géographie connaissent bien : le rapport des élèves d'origine maghrébine à la judaïté. On pourra donner autant d'éléments de réflexion que l'on voudra, insister, séquences costauds à l'appui (avec diagnostic sur les pré-requis, formatif, sommatif et tout ce qui prend du temps à préparer),
sur le caractère radicalement inhumain de l'antisémitisme, l'on aura au mieux des réponses attendues dans les devoirs, - l'élève évite tout problème avec l'institution en énonçant ce que l'institution est censée vouloir entendre -, mais que l'on écoute un peu les élèves discuter entre eux et l'on verra que, dans les faits, beaucoup tiennent  un double discours. Il m'est arrivé, et ce n'est qu'un exemple, de surprendre au détour d'un couloir cette réflexion d'une de mes élèves à une autre (2)  : "Oui, mais n'oublie pas que c'est une feuj..."
L'on me dira, bien sûr, que Rome ne s'est pas construite en un jour et qu'il faudra du temps avant que les préjugés du racisme ordinaire ne s'effondrent. J'entends bien, mais tout de même, je suis assez surpris que, malgré tant d'efforts de la part de nombreux enseignants idéalistes pour construire un discours tolérant et prêcher la bonne parole "multiculturelle", les replis identitaires soient encore si nombreux et si puissants, et pas seulement chez certains élèves de confession musulmane comme l'a montré en 2001 le recul des idées de la gauche démocratique au profit  d'un vote protestataire en faveur de l'extrême-droite.
D'ailleurs, - et là je suis perfide -, est-on sûr que les professeurs eux-mêmes, - qui généralement ne sont ni "pédagogistes" dans l'âme, ni réellement "républicains" au sens strict (3) dans leur pratique, mais tout simplement obéissants aux consignes qui leur tombent d'en haut -, est-on sûr que certains professeurs ne tiennent pas eux-mêmes un double discours ?
D'où la question que je poserai en conclusion : "ce pouvoir émancipateur" de certaines méthodes doit-il relever de l'école ? Est-ce bien au professeur de se mêler de la complexité  de ce "social" dans lequel, effectivement, nous baignons tous, élèves et maîtres, inspecteurs et familles, athées comme croyants ?

Notes
:
(1) En ce qui concerne les classes de première et la préparation au bac français, demander aux élèves de préparer les commentaires de textes est certes utile en tant qu'exercice intellectuel mais ne peut tenir lieu de cours magistral. Les élèves de première ont besoin, et sont d'ailleurs en demande, de cette parole du maître que certains pédagogistes semblent vouloir dénoncer. En effet, en l'occurence, rien ne peut remplacer la parole du spécialiste et le professeur de français en Lycée doit être vu avant tout comme un spécialiste de l'histoire de la littérature française. Demander aux élèves de première de préparer leur épreuve en les laissant "construire leur savoir", selon le mot d'ordre cher aux pédagogistes et que l'on peut retrouver sur le site de Philippe Meirieu, c'est perdre beaucoup de temps, - et l'année est courte pour transmettre un tant soit peu sérieusement les bases de ce que doit être une approche maîtrisée de quelques grands textes de l'histoire littéraire -. De quelque manière que l'on s'y prenne, et le cours magistral est en la matière ce qui fonctionne le mieux, l'élève se présentant à l'oral de l'épreuve de français doit absolument éviter le ridicule en ayant à l'esprit un commentaire structuré et riche d'éléments techniques et historiques que seul le spécialiste, - son professeur -, est en mesure de lui apporter.
L'on me dira que rien n'empêche le professeur  de laisser les élèves travailler en autonomie et préparer, sous forme de recherches documentaires, d'exercices de questions-réponses et autres "débats", leur inéluctable et nécessaire épreuve de français à partir du moment où, en fin de compte, par le biais d'une synthèse ou d'un polycopié récapitulatif, les élèves auront de quoi apprendre et nourrir leur performance.
Oui, mais en général, ce qui semble être une bonne idée, - bien "émancipatrice" n'est-ce pas ? -, tourne à la catastrophe : les élèves sachant qu'en fin de compte, ils auront le précieux "cours" garant de leur réussite ("avoir la moyenne"), ne s'investissent que plus ou moins bon gré dans ces "recherches" parfois fastidieuses que leur bon maître leur donne. On retombe ainsi dans le travers de "pour un qui bosse, cinq copient"; quant aux autres, ils font très consciencieusement semblant de travailler en se disant que, de toute façon, au besoin, ils iront demander au copain d'une autre classe le commentaire qu'il leur manque vu que leur professeur à eux, il leur fait des "vrais cours" et pas des "questionnaires à la con" et que si le copain, y veut pas, eh bien, c'est pas grave, on ira regarder sur internet et on le trouvera, ce fichu commentaire de la scène 2 de l'acte III de Dom Juan.
(2) Et pourtant, elles sont si agréables en cours !
(3) On tend à désigner sous le terme "républicains" les opposants à la mise en application de certaines idées du "pédagogisme". Les "républicains", que, de façon abusive, l'on classe à droite, s'opposent donc à Philippe Meirieu et dénoncent une main-mise du pédagogisme sur les référentiels (les contenus des programmes). Ce terme de "républicains" semble sonner comme un rappel de la nécessité de restaurer l'autorité de l'enseignant, dépositaire des valeurs de la république, face à des classes perçues non comme des ensembles hétérogènes mais comme des "sections" à discipliner, à maîtriser, à contrôler.

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 25 juillet 2006

 Commentaires

L'enseignement, depuis 1870, a profondément transformé la société.quant au problème "social", si mal posé, je crois qu'il est très psychologique! Ou socio-psy (voir: http://www.google.fr/search?hl=fr&ie=ISO-8859-1&q=n%E9vrose+de+classe&btnG=Recherche+Google&meta=lr%3Dlang_fr) et que ce n'est pas tant l'enseignement qui pose problème mais l'idéologie des "milieux"... Ce que l'enseignement et la conscription cherchaient naïvement à pallier en tentant de mélanger les classes sociales... Dans une optique "tous petits-bourgeois" ( et si possible radical-socialiste et fervente de la IIIe. République!) qui ne s'avouait pas

Posté par orlando de rudde, 25 juillet 2006 à 10:32~

Y a t-il de la subjectivité, de l'individu? De l'identité, cette tarte à la crème qui n'est que l'histoire de soi qu'on se raconte à soi-même (presque toujours un mensonge) et qui devient défaillance lors de la révélation qu'on s'est menti? L'appartenance, l'origine, le groupe social interdisant la "réussite"... Ca se trouve aussi dans une belle étude de Jean-Claude Kaufman: 'L'invention de soi"... La sociologie décoiffe et peut faire très mal! Elle est née comme ça! Quasiment dangereuse et, de ce fait, méprisée... N'empêche qu'elle voit juste et cogne fort!
IL y a une complémentarité indirecte entre le livre de Vincent de Gaulejac, "la névrose de classe" et l'invention de soi" de kaufmann que l'on peut relier à "la mise en scène de la vie quotidienne" d'Erwin Gofman, sur les rôles, la place au monde... Ces livres rejoignent la préoccupation "nouvelle" de l'histoire ou de l'anthropologie historique: on s'occupe de mentalités et de représetations.Et c'est l'accès au réel: hé oui, l'individuel et le social en dysharmonie fondent l'échec vital, qui peut commencer par être scolaire... Mais ce n'est pas l'école qui est en jeu, quelle qu'elle soit.. Mais bien les traces des mentalités anciennes opposées à l'école, à la République, etc... dûment intégrées par certains groupes sociaux et revendiquées par d'autres...
Il y a certes des conditions économiques. Mais comme toujours, elles sont secondaires et ne servent qu'à justifier le mental, le symbolique,le psychologique... IL n'y a pas de lois économiques,mais des décisions conscientes ou inconscientes.En revanche, il y a des "structures anthropologiques de l'imaginaire" (autre livre utile de Gilbert Durant) qui créent les mentalités,les représentations, comme les volontés de réussite ou d'échec. Encore faudrait-il savoir par rapport à quoi: échouer à son échec n'est pas forcément une réussite! Et l'invention de soi s'articule dans ces jeux de milieu et de résistance à son milieu.

On n'est responsable que de son milieu! Tout prisonnier a le devoir de tenter de s'évader!
Posté par orlando de rudde, 26 juillet 2006 à 06:33
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