PARADOXE AVEC CHAT
Notes sur la très fictive et très instructive expérience dite "du chat de Schrödinger"
Connaissez-vous le paradoxe du chat de Schrödinger ?
Non ? Eh bien, écoutez voir...
En 1935, l'un des théoriciens de la physique quantique, l'autrichien Erwin Schrödinger (1887-1961) imagina cette expérience, qui n'est qu'une pure fantaisie de l'esprit mais qui nous aide, nous, les moins doués dans l'abstraction physique, à comprendre deux ou trois bricoles qui ne nous servent à rien mais qui font passer le temps.
Je me permets de vous rappeler que, d'après c'qu'on dit, "en mécanique quantique, le monde ultra-microscopique est décrit en termes de probabilités et le déterminisme classique n'existe plus". Je tire cette phrase d'un texte d'Olivier Esslinger (cf http://www.astronomes.com) ; j'ai juste rajouté l'adverbe "ultra" pour faire joli.
Autrement dit, et toujours d'après Olivier Esslinger,"on ne peut plus parler de la position d'une particule, mais seulement de sa probabilité de se trouver à un endroit donné".
Ce qui d'ailleurs me fait penser que généralement, de la plupart des êtres que nous fréquentons, nous ne pouvons que penser à la probabilité de leur position à tel endroit du temps et de l'espace. On a parfois des surprises ; tous les cocus vous le diront.
Donc Schrödinger, afin d'illustrer cette idée d'indéterminisme dans le tout petit-petit, donna l'exemple suivant :
Vous attrapez un chat, celui de la tante Berthe par exemple, celle qui a de grands pieds, de la moustache et qui fume des winnfields en regardant La Ferme Célébrités, et vous placez ce chat dans une boîte fermée. Ce qui en soi constitue une expérience intéressante.
Dans la boîte vous avez placé des bidules à faire passer le chat de sa vie de fainéant à moustaches à sa mort de "Madame Michu, vous z'avez pas vu mon chat ?".
Liste des bidules félinicides :
- un flacon de poison
- un tout petit peu de matière radioactive
- un gompteur Geiger
- trois ou quatre numéros de Pif le Chien avec son Gadget : un Michel Houellebecq à monter soi-même.
Suivez bien la manoeuvre car c'est pas évident : "Lorsque la première désintégration d'un noyau radioactif se produit, le compteur Geiger réagit en déclenchant un mécanisme qui casse le flacon et libère le poison mortel" (Olivier Esslinger). Le matou épouvanté se jette sur les numéros de Pif le Chien qu'il arrache et griffure frénétiquement dans l'espoir d'une porte de sortie ; le bec du stylo plume imitation Mont Blanc du Michel Houellebecq en kit made in Thaïlande lui crève l'oeil, puis l'autre pendant qu'c'temps-là, le poison fait son effet et voilà, c'est fait.
Olivier Esslinger commente l'expérience de la façon suivante :
"La désintégration d'un noyau radioactif est un processus purement quantique qui se décrit en termes de probabilités. Il est impossible de prévoir quel noyau se transformera en premier ou bien quand la première désintégration se produira. La seule chose que nous puissions calculer est la probabilité qu'un certain nombre de noyaux se soient désintégrés après un temps donné. Nous pouvons en particulier choisir une substance radioactive adéquate de telle façon qu'après cinq minutes, il y ait 50% de chances qu'un noyau se soit désintégré et 50% de chances que rien ne se soit produit.
Fermons donc la boîte et patientons pendant cinq minutes (on peut pendant ce temps-là aller voir l'excellent blog de l'écrivain Orlando de Rudder: http://orlandoderudder.canalblog.com. (1).) Puisque la désintégration atomique s'exprime en termes de probabilités, le sort du chat ne peut être décrit qu'en termes similaires. Après cinq minutes, il y a donc 50% de chances que le chat soit mort et 50% de chances que le chat soit vivant.
Dans l'interprétation traditionnelle de la mécanique quantique, le chat n'est alors ni mort, ni vivant. Il se trouve dans une superposition de ces deux états. Ce n'est que quand nous ouvrons finalement la boîte que l'un des deux états possibles devient la réalité. Le chat est alors soit vivant, soit mort." (Olivier Esslinger).
Autrement dit, tant que nous ne voyons pas le chat, celui-ci est à la fois mort et vivant. Ce qui est la définition même des fantômes. (2)
De plus, il me vient à l'esprit que nos mémoires et nos affects quotidiens sont remplis de ces personnes que nous avons croisées jadis et que nous avons perdues de vue : sont-elles mortes ? sont-elles vivantes ? Tout est affaire de probabilités. Pour l'heure, nous pensons à elle comme étant ni mortes, ni vivantes.
Ainsi, les romans de Simenon sont remplis de ces personnages qui reviennent, de ces personnages dont on ne savait plus rien sinon qu'ils étaient peut-être morts, peut-être vivants.
D'une certaine manière, c'est le propre des personnages de fiction d'être à la fois morts et vivants. Ils existent puisque nous en parlons, nous nous en souvenons et ils peuvent même avoir de l'influence sur nous, c'est la définition même du mythe ; et pourtant, ils ne sont pas réels en ce sens qu'ils relèvent entiérement de l'imaginaire. L'encre qui les décrit n'est pas hantée. L'homme est peut-être le seul animé à être hanté ainsi de dieux, de fantômes, de fantasmes, de souvenirs.
Mais je vous le concède, si, dans le cadre d'un cours de physique, je puis bien accepter "qu'une particule se trouve dans une superposition d'états, chacun affecté d'une probabilité, cela devient très difficile lorsque l'on considère un objet macrocospique comme le chat en question". (Olivier Esslinger).
Donc, si je résume, il se pourrait bien que le regard que nous portons sur les êtres ait de l'influence sur leur état : tant que je n'observe pas la particule, celle-ci n'est que pure probabilité, elle est là et elle n'est pas là, il se pourrait qu'elle soit là et il se pourrait qu'elle n'y soit pas (on dirait le discours d'un philosophe d'une pièce de Molière). Elle est donc, cette particule, dans une "superposition d'états". Et c'est le regard que je porte sur elle qui lui donne une réalité, un "état".
Il en serait de même pour tout ce qui constitue cette matière dans laquelle nous nous débattons : chats, chiens, tantes Berthes, houellebecques quelconques, tracas administratifs, mains de ma soeur et culottes de zouave, vénus sans bras, vénus avec bras, auberges du chat qui pète, troquets du chien qui fume et tout ce fatras qui fait de nous des êtres occupés et dans lequel, nom de Dieu, nous essayons de mettre de l'ordre.
Mazette ! Qué dallage ! comme on dit à Maubeuge. Mais heureusement, Olivier Esslinger nous rassure tout de suite :
"L'idée d'un animal ni mort, ni vivant, mais dans une superposition de ces états est plutôt difficile à accepter. C'est à ce problème que la théorie des univers parallèles vient apporter une solution élégante." Ouf ! on a eu peur !
Notes : (1) : Intervention houzeauïste
(2) : A moins que les fantômes ne soient en fait que des explorateurs spatio-temporels qui nous viennent du futur et qui, pour des raisons techniques, ont du mal à rentrer en contact avec nous. Nous ne les reconnaissons pas et les prenons, - sots que nous sommes ! - pour des esprits sans sépulture alors qu'ils essaient certainement de nous transmettre de nouvelles façons de cuisiner le chou ou de nous expliquer que c'est pas trop la peine de se casser la tête vu que d'ici quelques années, grâce aux progrès fulgurants de nos chers premiers de la classe, nous aurons droit à une belle fin du monde en polychromie et multivision et que tout s'rait à recommencer...
Patrice Houzeau (ou peut-être pas)
Hondeghem (ou ailleurs) , le 6 octobre 2005 (ou à un autre moment)
Commentaires
Et si on remplaçait le chat par brigitte bardot, afin de ne pas nuire aux animaux? L'ennui, c'est qu'elle ne comprendrait rien à Pif le chien!