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29 août 2013 4 29 /08 /août /2013 02:40

L'HABITANT DU TOMBEAU
Notes sur le sonnet "Le mauvais moine", de Charles Baudelaire. Citations entre guillemets.

 

1.
"LE MAUVAIS MOINE

 

Les cloîtres anciens sur leurs grandes murailles
Etalaient en tableaux la sainte Vérité,
Dont l'effet, réchauffant les pieuses entrailles,
Tempérait la froideur de leur austérité."

 

a) Qu'est-ce que "les cloîtres anciens sur leurs grandes murailles étalaient" ?

 

"La sainte Vérité", comme quoi la vérité se voit comme le Christ sur la Croix.

 

b) Quel effet le narrateur attribue-t-il à cet étalage de la sainte Vérité ?

 

Cette monstration de la Vérité a pour effet de réchauffer les pieuses entrailles. Ce n'est donc pas la Vérité en elle-même qui réchauffe, mais le spectacle de la Vérité. Les moines, ceux dont il était nécessaire de tempérer la froideur de leur austérité, exact contraire d'un plus attendu tempérer la chaleur de leurs embrasements - c'est dire qu'ils ne rigolaient pas, les frères - sont ici représentés par le mot "entrailles", lequel renvoie à une sorte d'intériorité consommatrice de piété, comme si, aussi bien que l'âme, le corps lui était voué, à cette sacro-sainte Vérité.

 

2.
"En ces temps où du Christ florissaient les semailles,
Plus d'un illustre moine, aujourd'hui peu cité,
Prenant pour atelier le champ des funérailles,
Glorifiait la Mort avec simplicité."

 

Comment, dans le second quatrain, sont présentés les moines des premiers temps du christianisme ?

 

Bien que "peu cités", et donc ignorés, les premiers moines sont appelés "illustres", puis dans un "atelier", en bons artisans de la foi, on suppose, surtout que cet atelier, c'est "le champ des funérailles" - autant dire qu'on plante des morts - et puis simples, simples, mais simples, ils "glorifiaient la Mort" comme tu achètes des pêches au marché, dis !

 

3.
"- Mon âme est un tombeau que, mauvais cénobite,
Depuis l'éternité je parcours et j'habite ;
Rien n'embellit les murs de ce cloître odieux."

 

En quoi est-elle étrange, la façon dont le narrateur se présente dans le premier tercet ?

 

Le narrateur se présente comme étant l'habitant de son âme, laquelle est "un tombeau" (dit-il). Donc, le narrateur habite le tombeau de lui-même. C'est un mort qui marche, qui se parcourt, se hante, et finit par ne plus se sentir, qui ne vit plus dans le temps des vivants, mais dans la durée, laquelle est bien ennuyeuse, j'imagine, cependant que le temps est bien court, c'est vous dire qu'il nous l'a mis profond dans l'os, Chronos.

 

4.
"Ô moine fainéant ! quand saurai-je donc faire
Du spectacle vivant de ma triste misère
Le travail de mes mains et l'amour de mes yeux ?"

 

Quelle est la question que se pose le narrateur ?

 

Après s'être traité lui-même de "moine fainéant", c'est-à-dire de tout seul qui n'en fiche pas une, le narrateur se demande comment faire de ce qu'il est - une "triste misère" - un "spectacle vivant", celui de sa propre vérité humaine, dont il serait l'acteur et le promoteur, au lieu d'en être le spectateur passif et dégoûté. On peut noter que ce dégoût est exprimé tout au long du sonnet par l'emploi de rimes peu agréables à l'oreille ("murailles", "entrailles", "semailles", "funérailles", "cénobite", "habite", "faire", "misère") et d'un lexique dépréciatif qui en devient quasi ironique, autodérisoire, plaisant presque (évidemment, le "cénobite", c'est-à-dire le moine des premiers temps, il sonne cocasse, le cénobite, façon crustacé bizarre) .

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 29 août 2013

 

 

 

 

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29 août 2013 4 29 /08 /août /2013 02:17

SUR UN BANC DEVANT L'HERBE

 

1.
Ce que fabriquent les chansons, de la nostalgie, et ce que fabrique la nostalgie, le regret de n'avoir pas pu, ou de n'avoir pas su.

 

2.
La chanson populaire donne un son à l'air du temps. Sa production en série et sa reproductibilité la voue au rappel, à la nostalgie. Ainsi, on la vend aussi bien aux jeunes gens qu'aux gens qui furent jeunes.

 

3.
Le regret de son passé est sans doute un indice sûr de vieillissement. Je dois être très vieux alors, plus vieux encore qu'on ne le dit. Ou alors, c'est que l'être nostalgique obéit à une stratégie d'évitement de son présent, lequel est, par définition, cet espace incertain qui se décide soudain pour s'abolir dans l'immédiat.

 

4.
La condescendance de ce collègue : "Je lis quelquefois ton blog ; tes articles sont amusants". Et comme il s'est rué pour me proposer un projet ! Ne sait-il pas encore, depuis le temps, comme cela m'est pénible d'être contraint à la vulgarité du "projet", moi qu'un seigneur habita jadis.

 

5.
J'aime vraiment ça la chanson populaire. C'est très bien fait, ça, souvent, la chanson populaire. Elles vous disent les rêves des gens, les chansons populaires. Pas ce que sont les gens, non - il faut être prétentieux comme un sociologue pour prétendre dire ce que sont les gens - mais l'étoffe de leurs rêves, certainement, et ce à quoi ils renoncent.

 

6.
Les choses ne sont pas toujours comme on les imagine. La plupart du temps, le réel conserve l'avantage de la surprise.

 

7.
L'étrange lucarne est pleine de morts qui continuent à remuer. La technique a réussi à mêler les talents des morts à ceux des vivants. Il n'est pas vrai que nous vivons dans l'éternel présent, nous vivons dans l'éternel retour d'un passé que nous appelons présent. Et cet éternel retour, nous le ruminons, dans ce carré d'espace où nous vivons de manière à ne pas mourir trop vite.

 

8.
Quelqu'un de bien élevé n'écrit pas. Quelqu'un de bien élevé gagne de l'argent, et élève des enfants bien élevés qui n'écriront que si cela leur rapporte quelque prospérité. Je n'en démords pas de mon os, il faut être drôlement mal élevé pour écrire. C'est à cela aussi que je dois ma réputation de rustre. Il est vrai que je ne demande à être excusé que si je ne puis faire autrement ; et il est vrai que le talent des autres me surprend toujours.

 

9.
Je n'ai jamais trop apprécié la réputation d'ivrogne que certains ont cru malin de me faire. Moi qui n'aime rien tant que la lucidité et la belle logique. Et s'il m'est arrivé de boire, c'était presque toujours parce que je ne pouvais faire autrement que de supporter l'insipide présence de gens qui, parfois, ont la naïveté de me trouver sympathique. De fait, il est inutile de m'inviter à quoi que ce soit. Si j'ai la faiblesse d'accepter, en vertu de ce que j'ai écrit quelques lignes plus tôt, il est fort à parier que je vais boire plus qu'il n'est nécessaire pour passer pour un bon vivant.

 

10.
"Bon vivant" : quelle expression stupide ! Comme si ça pouvait exister, ça, des vivants qui soient bons.

 

11.
Je mourrai au dernier verre, mais, comme de toute façon elle aura sonné la cloche.

 

12.
Il m'arrive de contempler un carré d'herbe et de me dire que la mort, ce sera l'impossibilité absolue désormais de pouvoir me trouver sur un banc devant un carré d'herbe ; et même, ce carré d'herbe, je serai dessous ; et, sur le banc, quelqu'un d'autre, qui ignorera que je fus.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 29 août 2013

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28 août 2013 3 28 /08 /août /2013 17:59

LA TASSE CASSEE

 

La fille aux
Taches de rousseur aux longs li
Sses cheveux son
Café elle le boira pas, car pa
Ssée outre la table, la tasse, cassée qu'elle est.

 

Le visage se
Mire minaude dans le n
Oir du coup devant les dé
Bris il ne voit pas qu'il s'est bris
é.

 

La pluie se jette dans le jeu elle
Fourre ses doigts déliés dans l'enca
Drement elle fait craquer le tableau
De tout son horizon
Son paysage laisse passer des êt
Res dont les re
Gards inquiètent.

 

Le minois de la mignonne il s'est
Vidé et la chair de
Sa carcasse est tombée la nei
Ge est pleine de chevaux f
Ous fonçant vers toutes les ou
Vertures et se brisant.

 

Drôle de chose drô
Lement bizarre ce coin
De langage bon je vais manger du
Chorizo et avec la mayonnai
Se je vais me faire des frites se
Dit-il car je lis dans la tête de
L'homme que je balade l'ho
Mme dans mon poème l'homme
En train d'être sans exister l'homme au
Regard qui ne vous voit pas l'hom
Me sans soi-même l'homme reme
Ttant sur sa tête sans front ni mâchoire
Son galurin sans bord ni fond d'où ne s'é
Chappe aucun lapin l'homme sans
Peau ni squelette ni ombre.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 28 août 2013

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28 août 2013 3 28 /08 /août /2013 16:40

REPONSES AUTOUR DES CENOTES
Source : "Plongée dans le monde sacré des Mayas" de Alma Guillermoprieto, photographies de Paul Nicklen et Shaul Schwarz, in "National Geographic France", livraison d'août 2013, pp.34-57.

 

1.
C'est Chac, et même qu'on apprend dans le même article, qu'il existe "une longue prière" à faire pleuvoir qu'on appelle "Cha Chac". C'est qu'ça allitère que quand il pleut, c'est qu'il chaque donc, et que chaque fois qu'il drache chaque, c'est que le dieu Chac, il a écouté le Cha Chac des Mayas.

 

2.
Où ai-je entendu le rapide chaca-chaca-chaca, chaca-chaca-chaca battu par la foule d'un rituel ?

 

3.
Le temps fait pleuvoir ses chaques, qu'il ponctue de coups de théâtre.

 

Note : Si j'écris que le temps fait pleuvoir ses claques, qu'il ponctue de coups de théâtre, ça sonne mieux, non ?

 

4.
En noir, le seigneur, avec une tête de mort toute blanche, et des figurations de blanches côtes. Me donne à méditer que donner la vie, c'est orner ces blanches côtes de chair, c'est fournir aux squelettes assez de chair pour pouvoir se mouvoir incognito parmi les vivants.

 

5.
A chaque Madonne est-il son Seigneur de la Mort ?

 

6.
Sinon, dans les magazines, c'est pas ça qui manque, les seigneurs de la mort, les serviteurs de la camarde, plein partout, de massacreurs invisibles ; regardez-les, ils ont les yeux blanches et la dentition préparée. Leurs prêtres, ce sont nos politiques.

 

7.
Que voyaient-ils dans le ciel, les anciens yeux ?

 

8.
Avez-vous remarqué que, souvent, on emploie le présent de vérité générale pour les évoquer, les anciens dieux. On ne saurait être trop prudent.

 

9.
Qu'il aurait quatre côtés, le cosmos maya. Que moi, je me demande si la notion de côté a un sens quand on parle du cosmos, que j'ai l'impression qu'il a une infinité de côtés, le cosmos, c'est-à-dire qu'on ne peut pas l'appréhender avec notre géométrie, qu'il faudrait imaginer des droites qui sont à la fois des droites et des courbes, des points qui sont des points et des lignes, des qui sont à la fois des et qui n'en sont pas. Après, il y a l'ironie humaine, l'humour désespéré des humains; n'est-il pas dit dans cette légende qu'accompagnant les prières, "des garçons accroupis imitent le bruit que font les grenouilles quand il pleut" ?

 

10.
Une flamme sans feu, la lumière. La vraie lumière, celle qui illumine.

 

11.
C'est sur des gouffres où se rassemble la pluie, prend corps la pluie, que les Mayas alignèrent leurs escaliers vers le ciel.

 

12.
Ils font du bruit, et sécrètent des créatures revendicatrices qui rampent et rôdent, des champs aux fermes.

 

13.
"Un Chac différent". Comme la pluie multiplie sa divinité, le tonnerre multiplie ses jarres, et l'humanité multiplie ses bouches.

 

14.
Qu'il existe quelque part un "Culte de la croix qui parle" ne m'étonne guère, et me réjouit presque. Celui que l'on appelle ailleurs "le dieu maigre" est aussi un dieu de parole. Existe-t-il un dieu muet, une divinité sans langue, un très-puissant analphabète ? Chaque dieu existe par son expertise. Chaque dieu est un maître en quelque chose. Le seul Dieu est l'expert en créatures, et son art est de leur forger des âmes, lesquelles ne sont pas toujours assez fortes, assez trempées, pour ne pas se briser, et parsemer l'être d'un tas d'éclats, plus ou moins petits mais noirs et tranchants.

 

15.
Le son que font les garçons évoquant les "grenouilles dans la pluie du soir".

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 28 août 2013

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28 août 2013 3 28 /08 /août /2013 16:29

QUELQUES QUESTIONS AUTOUR DES CENOTES
Source : "Plongée dans le monde sacré des Mayas" de Alma Guillermoprieto, photographies de Paul Nicklen et Shaul Schwarz, in "National Geographic France", livraison d'août 2013, pp.34-57.

 

1.
Dans l'article que, dans le numéro d'août 2013 de National Geographic France, Alma Guillermoprieto consacre aux Mayas, il est fait mention d'un "dieu de la Pluie". Quel est son nom ?

 

2.
Comment apparaît-il, dans le magazine, le "mythique seigneur maya de la mort" ?

 

3.
Dans cet article, il est aussi question d'archéo-astronomie. A votre avis, qu'est-ce que c'est ? (cf page 41)

 

4.
Page 43, d'après la légende de la photographie, que symbolise "l'autel rectangulaire" devant lequel un "chaman agenouillé récite des prières" ?

 

5.
Page 42, qu'arrive-t-il au "bord de l'eau" "quand la lumière le frappe" ?

 

6.
Que sont les cénotes et à quoi servent-ils ?

 

7.
Page 43, que font "les champs de maïs ayant attendu la pluie trop longtemps ?"

 

8.
Page 43, d'après l'article, que représente pour les Mayas "chaque coup de tonnerre" ?

 

9.
Qu'est-ce qu'un "Cruzoob" ? (cf page 51)

 

10.
A quoi correspondent, page 57, les onomatopées "hmaa, hmaa, hmaa" et "lek, lek, lek, lek, lek" ?

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 28 août 2013

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26 août 2013 1 26 /08 /août /2013 08:45

AUSSI FOURMI
En cogitant sur le poème "Terre !", de Henri Michaux.

 

1.
C'est plein de "i" partout. Il y en a tant et si que ça fourmille dans la farine, que ça siffle dans les sophistiquées, que ça frimousse, frétille, et rissole dans les frites, que ça rythme jadis aussi parmi nous pas que péris, pas que périscopes, péripéties, prétéritions.

 

2.
L'ici et le maintenant viennent d'ailleurs, du naguère et du là, et à peine sont-ils qu'ils sont ailleurs, dans l'encore et le tantôt. Le temps va si vite qu'on ne le voit pas passer ; c'est comme s'il ne passait pas ; c'est comme s'il était déjà passé. A partir de là, c'est tout de même difficile d'être à l'heure. C'est que, être synchrone avec les aiguilles, trotteuses, arpenteuses, armonteuses, menteuses, menteuses, menteuses, voilà qui relève de l'exploit. Ou de l'autosuggestion.

 

3.
Le temps sort de lui-même comme un oeuf de son oeuf.

 

4.
Qu'est-ce qu'une invitation ? Une outrecuidance qui consiste à faire accepter à quelqu'un, qui généralement ne vous a rien demandé, l'idée qu'il va perdre un peu de son temps en votre compagnie.

 

5.
Le réel est divisé par les pronoms ; les possessifs le dictent et se le transmettent. La véritable dynastie, c'est celle de la langue.

 

6.
Par définition, le passé ne nous appartient plus ; le futur ne nous appartient pas encore, et le présent nous file entre les doigts.

 

7.
Il est toujours épatant de constater que nous nous levons le matin en maugréant putain fais chier pour en arriver quelques quarts d'heure plus tard à "Monsieur Chaponpon ! Comment allez-vous ?"

 

8.
Qu'est-ce qu'écrire un livre ? Une outrecuidance qui consiste à proposer à quelqu'un de perdre un peu de son temps, et de son argent, à lire ce que vous-même parfois avez du mal à trouver intéressant.

 

Note : En ce qui concerne la musique, très souvent, ce n'est plus de l'outrecuidance, c'est de l'agressivité, de la violence, de l'intention manifeste de nuire.

 

9.
Qu'est-ce qu'une bonne musique ? Une indélicatesse qui vous rappelle que le temps file.

 

10.
Qu'est-ce qu'une mauvaise musique ? Une révélation de jusqu'où ils peuvent aller, les autres, pour vous enquiquiner.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 26 août 2013.

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26 août 2013 1 26 /08 /août /2013 08:23

QUESTIONS SUR EMPORTEZ-MOI NOUS AUTRES TERRE
Petites invites à lire et relire Henri Michaux.

 

Les trois questionnaires qui suivent peuvent servir de base à d'autres questionnaires, plus précis, plus scolaires. Ils ne sont donc pas inutiles. Néanmoins, la formulation de certaines questions peut certainement être améliorée. Evidemment. Bien sûr. J'en suis conscient.

 

I) Questions sur le poème "Emportez-moi", de Henri Michaux (in La nuit remue, La bibliothèque Gallimard n°90, p.224).

 

1) Dès le premier vers, que demande le narrateur ?

2) Quelles épithètes emploie-t-il pour désigner la "caravelle"?

3) Dans quel but fait-il cette étrange demande d'être embarqué, emporté, emmené ?

4) Dans la deuxième strophe, comment précise-t-il cet ailleurs où il désirerait se perdre ?

5) Dans la troisième strophe, comment s'humanise le lieu où il voudrait tant se perdre ?

6) Que demande-t-il enfin ?

 

II) Questions sur le poème "Nous autres"? de Henri Michaux, (in La nuit remue, La bibliothèque Gallimard n°90, p.114).

 

1) A quelle personne s'exprime le narrateur ?

2) Dans la première strophe, que constate-t-il ?

3) En quoi la deuxième strophe du poème s'oppose-t-elle à la première ?

4) Qu'est-ce qui caractérise les "chevaux" de ce poème ?

5) Où sont-ils "arrivés", ces gens que trimbale le pronom "nous" ? (cf "De plus, nous sommes arrivés aux...")

6) Dans la dernière strophe, en quoi l'emploi du verbe "entrer" est-il signifiant ?

 

III) Questions sur le poème "Terre !" de Henri Michaux (in La nuit remue, La bibliothèque Gallimard n°90, p.237).

 

1) Quelle est l'assonance qui domine le premier vers ? Quel en est l'intérêt ?

2) Quel sens pourriez-vous donner au troisième vers de ce bref poème ?

3) Et à l'avant-dernier, quel sens ?

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 26 août 2013

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26 août 2013 1 26 /08 /août /2013 05:31

HISTOIRE DE FAIRE CROIRE
En cogitant sur le poème "Nous autres", de Henri Michaux.

 

1.
La personne utilisée est fréquente. Elle fait foule. C'est par elle qu'il s'exprime, le narrateur. C'est plein de bouches, tout ça partout, de bouches, bouches, bouches, auxquelles l'encre donne langue.

 

2.
Il constate que ce n'est pas facile tous les jours. Ontologiquement pas facile. Que l'être, c'est essentiellement de l'échec. Du pas réalisé. De l'inabouti. De l'impasse. De l'autre.

 

3.
Au départ, c'est plein de pas possibles. Puis, on finit par en trouver, du possible. Mais il est tout troué, mité. Il file, il grogne, il griffe, il a des cornes, il vous prend tout, il vous transpire, il vous tanne, vous déserte, vous égratigne, vous hausse les épaules, vous désosse, vous édente, vous attrape, vous rape, vous pique vos sous et dis que dis que dis que que que que, que que que.

 

4.
Ces dadas ne sont pas des tartes aux pommes. Ces dadas ne sont pas des autres déçus. Ces dadas ne sont pas des fantômes flottants ; ils ne hennissent pas dans la flûte des airs. Ces dadas ne se prennent pas pour de grands écrivains. Ils ne croient pas qu'on les lise. D'ailleurs, on ne les voit pas. Ils passent dans leur miroir sans tain, leur miroir si souple qu'on le sent à peine passer, sur sa peau comme un souffle.

 

5.
Bien sûr, c'est au nom du sens que nous affirmons que rien n'a de sens, et c'est au nom du réel que nous affirmons que tout est illusion. Mais il faut bien un Menteur. Mais il faut bien un Truqueur. Le Diable a plus d'une langue.

 

6.
Dieu, lui, ne dit rien. On parle à sa place. On lui secoue la tête de bas en haut et de haut en bas, de bas en haut et de haut en bas, de bas en haut et de haut en bas, histoire de faire croire.

 

7.
Où sont-ils arrivés, ces gens que trimbale le pronom "nous" ? Ils en sont aux autres. Aux autres qui préparent leurs pièges d'autres, pour les faire trébucher, ceux du nous, pour les aimer, ceux du nous, les accueillir, les intégrer, les scolariser, les reproduire, les ceux du nous, pour les rallier à leur humanisme de bon aloi. Celui qui fait regretter les grands massacres. Celui qui, en vertu du "Si vis flouzem, oseillam, fricum, para bellum", vend des choses qui volent, qui roulent, qui rampent, qui filent, qui fusent, et qui explosent dans l'ailleurs, dans l'autre, là-bas.

 

8.
Elle, quand on la regarde, nos yeux tombent. C'est pour ça que nul, jamais nul, ne la voit, jamais.

 

9.
C'est qu'il y a tant d'entrées, et de sorties, et de trous, et de glissements, et de à la dérobée. Comment voulez-vous marcher droit ? Funambule aveugle sur un fil qui n'existe que parce qu'on y croit.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 26 août 2013

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25 août 2013 7 25 /08 /août /2013 05:09

SAGE, ET FOU, COMME UNE IMAGE
En lisant le poème "Emportez-moi", de Henri Michaux.

 

1.
Comme il n'est pas une frite, il ne demande pas qu'on l'emporte dans un cornet.

 

2.
En tout cas, elle n'est pas jeune et rude. Elle ne rue pas, ne se cabre pas, ne gigue pas sur la mer, ne hennit pas, ne hurle pas, ne chante pas en anglais ; elle a l'air de pas faire trop de bruit. On peut lui laisser ses oreilles tranquille.

 

3.
Il ne veut pas se retrouver ici et maintenant ; il est pris de cette envie d'être ailleurs et plus tard. C'est une sorte de nostalgie à rebours ; et je dirai aussi que c'est une sorte de Sehnsucht, comme disent les Allemands, bien je ne sache pas exactement ce que veut dire Sehnsucht - et, n'ayant aucunement l'intention d'aller en Allemagne dans les cent prochaines années, à vrai dire, le sens exact de Sehnsucht, peu me frise - mais ça fait intello-à-qui-rien-d'humain-tagada-tsoin-tsoin d'accorder ainsi à une langue étrangère, une langue à la fois si proche et si lointaine, une signification spécifique, une étrangeté qui nous fait penser - on ne le dit pas, on le suggère juste - qu'ils ne sont pas tout à fait comme nous, les autres, là-bas.

 

4.
C'est dans l'image poétique qu'il voudrait se perdre. C'est peut-être là le lot des poètes : ils se perdent dans leurs images. Ils sont là, comme derrière une verrière, qu'on croit qu'ils vont sortir, et ils sortent en effet, mais ce n'est pas eux - eux, ils sont toujours derrière la vitre - et, cependant, ils sont là, avec nous, et vont faire ce que nous faisons chaque jour, qui est nécessaire pour ne pas mourir, qui est nécessaire en attendant de mourir.

 

5.
On dirait bien qu'il veut hanter les corps, lui, là, comme si les corps étaient des images poétiques. C'est comme ça que l'on entame une carrière de profanateur de sépulture. Sauf que tout ça, c'est que de l'écriture, du poème, du pas grand chose et du je ne sais rien. Surtout si l'on songe qu'il y en a qui, et d'autres qui, et tous ceux qui, vous y avez pensé, à tous ceux qui ?

 

6.
Du reste, c'est ce qu'il demande en fin de compte. Il doit se prendre pour un chien. Il veut qu'on lui ouvre la terre pour qu'il en tire de l'os, de l'à-ronger, du restant.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 25 août 2013

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24 août 2013 6 24 /08 /août /2013 13:11

ET LES DIEUX LA LAISSERENT CHOIR
Notes sur le sonnet La Muse vénale, de Charles Baudelaire. Citations entre guillemets.

 

1.
"O muse de mon coeur, amante des palais,
Auras-tu, quand Janvier lâchera ses Borées,
Durant les noirs ennuis des neigeuses soirées,
Un tison pour chauffer tes deux pieds violets ?"
(La Muse vénale, premier quatrain)

 

Quelle figure de style vous semble dominer cette strophe ?

 

Baudelaire personnifie. Il humanise les phénomènes. Janvier n'est plus seulement un mois, mais une entité qui a le pouvoir de commander aux divinités du vent (les "Borées"). C'est que l'hiver nous bourre de borées, nous borde de neige, nous fout le froid partout. La forme "lâchera" est ici particulièrement expressive : Janvier lâche ses Borées comme on lâche les chiens.
On peut noter l'absence de majuscule à "muse". C'est qu'elle n'est plus la divine inspiratrice, mais une compagne de pauvreté ; d'ailleurs, elle a "deux pieds", comme tout le monde, ou presque. C'est par ironie que le narrateur l'appelle ici "amante des palais", celle qui inspira ses plus beaux vers à Racine, mais aussi celle que le poète a rêvé d'installer dans une belle demeure, avec cézigue tiens, dans le "luxe, le calme et la volupté". Au lieu de cela, la belle a des "noirs ennuis", pendant qu'il neige, et ne sait même pas si elle pourra se chauffer cet hiver.

 

2.
"Ranimeras-tu tes épaules marbrées
Aux nocturnes rayons qui percent les volets ?
Sentant ta bourse à sec autant que ton palais,
Récolteras-tu l'or des voûtes azurées ?"
(La Muse vénale, second quatrain)

 

Comment est-elle présentée, la "muse", dans ce second quatrain ?

 

Je ne sais pas si vous connaissez l'excellente et télévisuelle série Kaamelott, d'Alexandre Astier, mais si vous la connaissez, vous savez qu'à un moment, lassés des échecs et des fantaisies de la cour d'Arthur, les Dieux lâchent La Dame du Lac, la désenchantent, la renvoient à son humaine condition. La Muse spirituelle soudain connaît maintenant la faim, la soif, le froid. Réfugiée à Kaamelott, elle fait l'expérience amère de la fragilité de l'existence et de ses contraintes. Elle l'a dans l'os, la Dame du Lac. Et bien, la muse baudelairienne, l'ici vénale, elle est pareille. Si elle est encore de marbre (les divinités sont insensibles, sinon c'est qu'elles sont un poil trop faibles, et elles sont aussi statufiées - en tout cas jadis, car maintenant, je ne sais pas trop - taillées dans le, et dans le bronze, et la posture avantageuse et la belle jambe), ses marbrures peuvent être aussi causées par le froid ; c'est qu'elle se gèle peut-être, la muse. Ah on est bien loin des muses avec lesquelles le Joachim du Bellay se voyait faire des galipettes dans les prés la nuit, l'été, la poésie ! Si elle est toujours nocturne, elle ne peut guère qu'attendre les pleines lunes et leurs "rayons qui percent les volets". Est-elle encore du palais, la muse ? Certes, le mot est employé. Mais il n'a rien pour le flatter, le délicat de Mademoiselle. Elle a faim, elle a soif, et la "bourse à sec". L'or ? Il est aux étoiles, l'or, dans les "voûtes azurées", là-haut, là-bas, dans ton ancienne maison, du temps où tu fus divine, t'as qu'à croire.

 

3.
"Il te faut, pour gagner ton pain de chaque soir,
Comme un enfant de choeur, jouer de l'encensoir,
Chanter des Te Deum auxquels tu ne crois guère,"
(La Muse vénale, premier tercet)

 

Que nous apprend ce tercet sur le véritable statut de cette muse ?

 

La muse, par définition, elle tombe des nues peuplées de dieux divers et variés, aussi divers et variés que peut l'être la poésie. Elle est polythéiste. Et la voilà soumise au dogme du dieu unique, menée au Te Deum, vaporisée dans "l'encensoir". Est-ce elle qui chante ? Oui, si l'on admet que le narrateur, en parlant de son inspiratrice, parle de lui-même. Ma muse, c'est moi, nous dit-il en substance, et qu'en dépit de ses opinions, il est bien obligé de louer ce en quoi il ne croit guère. Il est vrai que l'on imagine mal l'auteur des Litanies de Satan et autres gothiques agaceries se mettre à bondieuser à la Hugo. Est-ce crédible ? Evidemment que oui : les rayons pieux des librairies sont chargés de livres très dévots écrits par des mécréants fumeurs de pipe et buveurs de bière (1). Et je ne serais pas plus étonné que ça d'apprendre que tel saint homme, que telle conscience éclairée par une spiritualité profonde, composât, dans ses moments d'égarement sans doute, des odes pornographiques, de licencieux romans, de roses rosses romances , sous pseudonyme, évidemment.

 

4.
"Ou, saltimbanque à jeun, étaler tes appas
Et ton rire trempé de pleurs qu'on ne voit pas,
Pour faire épanouir la rate du vulgaire."
(La Muse vénale, second tercet)

 

Comment dans ce tercet se confirme la vénalité de la muse ?

 

Il n'y a pas que le bon dieu bien sûr, il peut aussi faire le pitre, le scribe nécessiteux (cf "pour faire épanouir la rate du vulgaire") ou faire la pute (cf "étaler tes appas") (2), et, quoi qu'il en soit, il doit faire bonne figure. Remarquez que le pleurnichisme a aussi ses clients. Dans notre début de XXIème siècle, où l'on publie à tour de bras des tas de livres qui ne se vendent pas, il y en a pour tous les mauvais goûts. Ce qui a l'air de marcher, c'est la sentimentalerie déguisée en aiguisée chronique contemporaine, les tourments du couple, cause qu'il y a toujours des gogos pour confondre littérature et psycho-mag. Il y a quelques jours encore, j'ai entendu un pauvre diable d'auteur étaler sur France Culture d'anémiques évidences sur les femmes qui nous quittent, ou que l'on quitte (je sais plus trop), que c'en est à se demander si les femmes et les hommes sont vraiment faits pour vivre ensemble, et qu'appelle-t-on vivre ensemble, et ne vaudrait-il pas mieux partager son existence avec :
- un pingouin,
- un tamanoir,
- une banque suisse,
- la discographie complète de Luc Ferry, accompagnée par les petits chanteurs à la croix de, et subventionnée par l'Association des Porteurs de Dentier Anonymes,
- une banque luxembourgeoise, ou monégasque (je ne suis pas difficile),
- la discographie complète de Jean-Luc Mélenchon, illustration sonore des Béruriers Noirs, et épingle à nourrice collector (dans sa version "tirage limité"),
- un paquet de promesses électorales (avec ruban rose, ou bleu, pour faire rêver selon les opinions),
- un tableau historique, car daté de 1994, dans le style "réalisme soviétique" représentant un Inpecteur d'Académie vantant les mérites du Travail en Séquences devant une assemblée jeune et dynamique d'Adhérents à la MGEN,
- un autre tableau, tout aussi historique (car daté de 2008) et de la même croûte, représentant un Inspecteur d'Académie dénonçant publiquement (c'est-à-dire devant une assemblée jeune et dynamique d'adhérents à la MGEN) les dérives technicistes du travail en séquences, dérives dues à une bande de rédacteurs de manuels auxquels l'Inspecteur a eu tort de faire confiance (Ah les social-traîtres !),
-  un faux vrai mensonge de Bernard Tapie,
- un vrai faux mensonge de Cahuzac,
- les "Oeuvres complètes" de Philippe Mérieu préfacées par Placid et Muzo,
- un abonnement à Ploutocrate Magazine,
- un étang sans eau avec son canard auquel manque l'oiseau,
- un redis-meuh-le-que-tu-m'aimeuh (avec ses cornes),
- les Collected Papers de Dominique Strauss-Kahn (Conférences, articles, notes de blanchisserie) préfacés par Ulla Turlute,
- un manuscrit du même Dominique Strauss-Kahn intitulé "Comment que j'm'a planté !" (authenticité non confirmée cependant),
- un échantillon de discernement communiste (fourni avec loupe, et même, dans certains cas, télescope),
- une hache avec toutes ses mains tendues tranchées,
- un plat qui se mange froid,
- un disque d'Elvis, un disque de Félix, un autre de Robert,
- les 60 ans de dessins de Siné (avec tout son talent),
- un élu local (avec ses menottes),
- un industriel local (avec ses pots-de-vin),
- une tranche de droit naturel,
- une paire de mains lavées (avec son Ponce Pilate),
- un vélo volé à Pérec,
- une langue verte quand on voit rouge,
- un scrongue (3) et tu aurais quand même pu faire la vaisselle pendant que j'étais au (là vous pouvez mettre n'importe quel cours de technique de bien-être asiatico-gymnaste, à moins que vous préfériez une réunion de militants indignés, ou la convivialité d'un club de n'importe quoi), bon, bref, un pauvre diable d'auteur donc, évoquant sur un ton sérieux les avanies du couple moderne, que j'en eus envie d'éventrer la radio, d'en extraire le petit bonhomme et de lui souffler dans les bronches - "Bouffe-donc un boeuf, bougre d'âne, et dévore un champ de patates, et engloutis quelques barriques de bières, puis va voir les filles, et après tu verras si ça t'intéressera encore les états d'âme de Totor et Titine !". C'est ce que j'avais envie de lui dire, moi, à l'écrivain. Ceci pour dire que le narrateur de La Muse vénale, il le voit pas très beau, le public, bigot, grossier, rate qui s'dilate, pas belles sonorités (cf l'assonance "guère" / "faire / vulgaire"). Pouah.

 

Notes :
(1) Consultez l'excellent blog d'Orlando de Rudder, vous serez édifié !
(2) : Lecteur lycéen, toi qui me lis, au moment de la rédaction de ta copie, je te conseille de préférer au vulgaire "faire la pute" le plus élégant "mimer la péripatéticienne". Sinon, il te reste le banal "faire le trottoir". Je ne te conseille pas non plus "pratiquer l'art de l'arpente des boulevards en bas nylon",  beaucoup trop littéraire - même si la tournure te ferait gagner une ligne - que ton professeur, il en écrira dans la marge, cf "Houzeau, Oeuvres complètes". Ou alors, tu me cites. J'en serais flatté.
(3) : Cependant, attention, vivre avec un scrongue suppose l'acquisition d'un gong, et la maîtrise de la langue gorgongne. Là-dessus, vous pouvez vous pencher sur certains écrits de Patrice Houzeau, qui est un auteur crypto-chose, évidemment, que sous la peau de ses écrits s'agite le ténébreux monde de la Gorgongne, qu'il ne peut expliciter sous peine de voir les yeux de ses lecteurs s'enfuir de leurs orbites en courant sur les cils de leurs mille-pattes. (4)
(4) - Monsieur Houzeau, où donc allez-vous chercher tout ça ?
- Dans le puits de mon génie où que j'suis tombé en regardant si la lune avait des nichons.

 

Patrice Houzeau
Hondeghem, le 24 août 2013

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